1753-09-17, de Juliana Franziska von Buchwald à Voltaire [François Marie Arouet].

Je suis charmée de Vous pouvoir prouver par ma lettre d'avant-hier, que pour Vous écrire Monsieur il ne me faut pas toujours répondre: si cela n'est pas arivé souvent jusque ici ce n'est que ma discrétion qui en est la cause; la crainte de Vous importuner, de Vous enuyer a retenue ma plûme: mais cette crainte Monsieur ne Vous siéd pas: Vous qui écrivéz si divinement; il faudroit avoir le goût bien dépravé pour s'enuyer à Vous lire ou à Vous entendre; je brûle d'envie de Voir Votre histoire de l'empire; Vous voyéz bien Monsieur que je dois avoir eus le plaisir de recevoir Votre dernière aimable lettre: elle est sans date, c'est pour quoi je ne l'accuse point; cette enflure de Vos mains me chifone le coeur et l'imagination, je voudrois Vous savoir sans douleur et sans inquiétude; en un mot je voudrois Vous savoir heureu et content et je voudrois y pouvoir contribuer.

Je Vous parle de ma lettre de propositions de paix, de réconcillation, tandis que Vous sembléz dans la Vôtre, avoir encor le coeur bien ulcéré des avanies du Sr: Freytag: voilà des dissonences qui ne me pronostiques rien de bon; je ne Vous en blâme sûrement pas, mais je tremble que Vous ne soyéz choqué de ce que je Vous propose, du moins Vous devéz être persuadéz Monsieur, que mon intention est bone; je voudrois Vous savoir tranquile et je n'en vois point d'autre moyen; comptez Monsieur que Vous me feréz un véritable plaisir de m'envoyer le portrait de la vie de Potsdam, mais ce qui m'en fera bien d'avantage c'est l'histoire de Vos empereurs, je Vous le prouverai par ma reconoissance.

Toute ma famille Vous ambrasse de bien bon coeur, de même que la grande Maitresse qui Vous assure qu'elle oubliroit plus tôt son cathéchime, que Vous: je pense presque come elle, soit dit entre nous, car je crain le scandale, mais non d'être avec toute l'estime imaginable

Monsieur

Votre très affectionée amie et servante

LD

Il faut aimer Mad. la duchesse autant que je le fais pour lui pardomer l'affront qu'elle me fait. Je croi cependent qu'il faut encor faire grâce au pararelle en faveur de la nouveauté. Jamais le catéchisme et Voltaire n'onts étéz attelléz au même char. Souvenez vous je vous conjure que vous m'avéz donéz votre coeur, et je ne […] jamais vous le rendre. Outre votre cœur […] vous m'aviéz promis La pucelle.