[July 1752]
Si je n'avais pas eu hier une terrible colique, accompagnée de violents maux de tête, je vous aurais remercié d'abord de la nouvelle édition de vos œuvres que j'ai reçue.
J'ai parcouru légèrement les nouvelles pièces que vous y avez mises, mais je n'ai pas été content de l'ordre des pièces, ni de la forme de l'édition; on dirait que ce sont les cantiques de Luther: & quant aux matières, tout est pêle-mêle. Je crois pour la commodité du public qu'il vaudrait mieux augmenter le nombre des volumes, grossir les caractères, et mettre ensemble ce qui convient ensemble, & séparer ce qui n'a pas de connexion. Voilà mes remarques, que je vous communique, car je suis très persuadé que nous n'en sommes pas à la dernière édition de vos œuvres. Vous tuerez & vos éditeurs & vos lecteurs avec vos coliques & vos évanouissements, & vous ferez, après notre mort, le panégyrique ou la satire de tous ceux avec lesquels vous vivez. Voilà ce que vous prophétise non pas Nostradamus, mais quelqu'un qui se connaît assez en maladies, & dont la profession est de se connaître en hommes. Je travaille dans mon trou à des choses moins brillantes & moins bien faites que celles qui vous occupent, mais qui m'amusent, & cela me suffit. J'espère d'apprendre dans peu que vous êtes guéri & de bonne humeur. Adieu.