1751-07-23, de Louisa Ulrica, queen of Sweden à Voltaire [François Marie Arouet].

Je m'estois resservée le plaisir de vous témoigner moi même, combien j'ai étée satisfaite de votre lettre accompagnez d'une nouvelle Edition de vos ouvrages.
J'avoue que le remerciment auroit düe étre plus promt et je serois fâchée si le retardement pouvoit faire n'aitre en vous des idées qui seroit désavantageusse à ma façon de penser pour vous. Vous me rendrai toujours justice quand vous serai persuadée de l'Estime infinie que j'ai pour votre Esprit et vos talents, et je me ferai toujours un plaisir de vous témoigner quand les occasion s'en pressenteront. A l'attendant je vous envoie une bagattelle qui servira de souvenir de ces mêmes assurance. Vous m'obligerai infiniment si vous voulliez continuer de me faire part de vos nouvelles production. Je ne sçaurois asses vous dire la satisfaction que je trouve en les lisant. Vous y rassemblez l'utille et l'agréable, chose si rare dans tous les Ecrits de nos jours. La comparaison flatteuse que vous faite de la Reine Cristine et de moi ne peut que me faire rougir, je me trouve si inférieure en tout point à cette Princesse, dont le génie estoit infiniment au dessus de celui de nostre sexe. Je désirerois de pouvoir attirer comme elle les beaux Esprits à ma Cour, mais la mort de Descartes sert toujours de prétexte à Elluder toute les tentatives que je pourois faire. Souvenez vous je vous prie que Maupertuis fut en Suede, même en Laponie, qu'il vit à Berlin en parfaite santée, qu'il a changée la figure de la terre et que ce changement a si bien oppérée sur ce Climats que les Glaces n'y ont plus leurs Empire. L'hyver sçaura respecter des jours consacrés par Appollon et Minerve, à L'honneur de notre siècle. Vous voiez que jamais vie n'a estée plus en sûretée que la vôtre. J'espère qu'àpressent vous serai détrompez sur tous ces préjugés désavantageux de notre Climats et que vous me mettrai un jour à même de vous assurer de bouche de L'Estime infinie avec laquelle je suis

Ulrique