à 2 heures et demie
V͞s aués trouué la seule manière de me consoler de votre absence, c'est de dormir.
Il m'a été impossible de v͞s escrire ce matin, on est venu lire la pièce chés moi d'abord que i'ay été éueillée, ie ne viens que de receuoir la vôtre, ie voudrois en receuoir de pareilles à tous les quarts d'heure. Non v͞s n'auiés point tort hier au soir de m'aimer à la folie mais v͞s aués encore s'il est possible plus raison aujourdhui. Ie vais paser dans ma chambre tout le tems qui s'écoulera jusqu'à ce que j'aye le bonheur de v͞s reuoir. L'aigreur et la fureur continuënt, il n'i a rien à faire auec vn tel caractère que de l'éuiter et de rougir de l'auoir aimé, surtout moi qui n'auois pas p͞r excuse l'illusion du goût et de l'amour, et qui cependant la regrette peutêtre plus que vous. Mandés moi coment v͞s v͞s serés trouué de votre médecine, ie crains qu'elle ne v͞s échauffe, et qu'elle n'irrite vos entrailles. I'ay promis au roy les provinciales p͞r ce soir, tâchés de les auoir, et aportés les moi. Adieu, ie v͞s aime passionnément, ie ne suis ocupée que de la manière de passer ma vie auec vous, sans être obligée de la passer ici, où ie vois qu'il est imposible que n͞s restions, mais il me seroit encore plus imposible de viure sans v͞s, je v͞s le jure, et ie v͞s le prouuerai toute ma vie.
[May-September 1748]