à Paris 16 juin [1748]
Monsieur,
Cette fois-ci, c'est pour moi que j'implore les effets de votre médiation.
Tâchez que ma confiance dans la probité de mr de Hoensbruck ne me perde pas. J'ai prêté à mr du Chattellet douze mille francs, j'ai répondu à ses créanciers pour vingt cinq mille, je me suis dépouillé de tout sur la parole d'honneur de mr de Hoensbruch dont vous étiez garant. Il faut que je quitte Paris, et que je perde ma fortune et mon honneur, si mr de Hoensbruch ne m'envoie pas au moins une lettre de change de 25000 florins d'Hollande, tant pour me tirer de l'état où il m'a mis, que pour donner aussi quelque argent à madedu Chastellet. Je ne crois pas que mr de Hoensbruck ait le mauvais procédé de tarder plus longtemps, il faut vendre sa vaisselle et ses diamants dans de pareilles occasions. Il me forcera de quitter Paris, mais j'irai chez lui, je suis au désespoir. Mais j'ai encore la consolation de penser que votre nom mis au bas de sa promesse le forcera à la tenir. Je vous supplie de faire de cette négociation votre propre affaire, elle vous intéresse personnellement, elle compromet votre médiation, elle ruine un homme qui vous est attaché tendrement. Je n'ai d'appui que vous. Je suis avec la plus vive douleur, et le plus sincère dévouement
Monsieur
votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire