[June 1745]
manuscritte, c'est madame d'Etiole qui l'a luy a envoyée, et elle a été signée Louis aulieu d'être signée Marville.
Il n'est pas mal de s'adresser à Cleopatre quand on veut réussir auprès de Cesar.
Savez vous que Roy, CHEVALIER DE ST MICHEL, votre bon amy, a fait un discours en vers au roy sur le succez de ses armes, dans le quel il dit qu'il ne veut voir sa majesté que comme père et comme époux, et où il me reproche d'avoir adjugé les lauriers selon mon caprice. Ce terme est un peu du chastelet. Croyez vous que vos amis que j'ay louez dans mon ouvrage soient contents de ce trait de satire? Cependant il va heurler et aboyer ces mauvais vers chez la Reine, et chez mr de Luines. Que ne sui-je comme m. le président le Camus! Je n'aurois point d'aboyeurs.
Les moutons de Berry qui ne suivirent pas d'abord assez vite leur beau chien au grand colier n'ont plus à se plaindre. Madame la duchesse du Maine m'a fait de beaux remercimens pour les meurtriers bleus qui portent des fusils rayez ou qui en doivent porter. Tout le monde me paroit content, et surtout le Roy. Je vous rends ce petit compte moins par amour propre assurément que par devoir. Vous vous êtes tant intéressé à cet ouvrage, qu'il est presque autant à vous qu'à moy, mais je suis à vous baucoup plus que tous mes ouvrages, et je seray toutte ma vie au nombre de ceux qui vous regardent comme le plus aimable homme de son siècle et qui ambitionent d'être admis dans votre société.
Depuis ma lettre écritte j'aprends que LE CHEVALIER DE ST MICHEL a fait une petite satire sur moy chétif dans la quelle il dit
et en marge il a mis les Daubeterres et les Castelmorons.
Cependant ce sont en effet les talons rouges, qui ont fait tourner les talons à la colomne anglaise. Ce fut entre autres Mr de Soubise qui empêcha que le poste d'Antoin ne fût abandonné et qui prit sur luy de désobéir au maréchal de Saxe, pour gagner la bataille. J'en sçai bien d'autres, et que dire du roy de Prusse? Il pleut des victoires, mais je ne songe qu'à un ballet. Adieu Atticus.
V.