1744-01-08, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Jacques Amelot de Chaillou.

Voicy monseigneur les propres mots souslignez de la lettre du trois janvier que je reçus hier au soir en chifre.

‘Une personne qui vient d'arriver d'Amsterdam m'assure positivement que le magistrat de cette ville avoit entièrement changé de sentiment, et qu'il insistera à la prochaine assemblée des états de Hollande sur les moyens de rétablir la paix. Je crois qu'on peut faire fonds sur cet avis.’

Vous n'ignorez pas monseigneur que le roy d'Angleterre a écrit aux états généraux qu'il les prioit de se joindre à luy pour l'élection d'un évèque de Liege, et qu'ils ont répondu qu'ils ne s'en mêleroient absolument pas.

Ce n'est pas une nouvelle bien importante que Mr Trevor ait demandé aux hollandois de munir les places où les trouppes de la république sont en garnizon, et qu'on luy ait répondu que c'est aux anglais à faire la moitié des frais; mais enfin cela prouve toujours qu'il y a de petites semences de zizanie.

Mais une nouvelle plus intéressante, et en même temps assez désagréable, c'est qu'il y a un traité de subsides entre l'Angleterre et Cologne. Je le sçai de science certaine, me dit mon correspondant.

Vous savez sans doute monseigneur qu'un homme cria, Vive le prince d'Orange! dans la grande église hollandaise le jour de l'an, à la Haye, et qu'il ne fut ny secondé ny réprimé.

Voylà touttes les nouvelles qui sont venues à ma connaissance. Je suis un serviteur bien peu utile, mais je vous suis attaché avec l'estime la plus juste, et avec le plus profond et le plus tendre respect.