28 avril [1743]
… Voltaire est rongé de soins et d'inquiétude, il sait tous les bruits qui courent sur son compte.
On dit que, piqué jusqu'au vif du peu de cas qu'avaient fait sur l'esprit de m. Boyer de Mirepoix les lettres soumises et rampantes qu'il avait écrites, qui, bien loin de lui mériter l'Académie, l'en avaient éloigné pour toujours, il avait traité de prestolets mm. de Mirepoix et de Sens. On assurait qu'il avait des ressorts puissants qui le mettraient au dessus de cette prêtraille, et qu'il trouverait le secret de faire agir les tétons de madame de La Tournelle en sa faveur; que cette favorite ayant été instruite de ce propos, lui dit, un jour qu'il vint lui faire sa cour à sa toilette, en lui découvrant sa gorge: ‘Eh bien, Voltaire, que feriez vous de mes tétons si vous en étiez le maître?’ et que le poète avait répondu, en se jettant aux pieds de madame de La Tournelle: ‘Je les adorerais’.
L'on prétend que le jour du compliment qui fut fait à l'ouverture du Théâtre françaïs, Voltaire envoya plusieurs billets d'invitation pour s'y trouver, et que dans celui qu'il écrivit à m. de La Reynière, il lui manda qu'il entendrait un discours qui ne serait pas celui du duc de Nivernais: l'apostrophe a fort fâché le duc, et lui a fait perdre son amitié. Il est vrai que Voltaire a dit à cent personnes que le discours qui fût fait à la clôture étoit de m. de Nivernais, et qu'il a prié l'auteur de la répandre dans Paris. La Chaussée et ce poète sont aussi brouillés pour le même compliment. Voltaire a prié l'auteur d'assurer tout le monde que la comédie qui est à la police est de m. Le Franc….