Monsieur,
Si on trouvoit plus souvent la commodité d'envoïer en France des pacquets, qui sont trop gros pour la poste, je n'aurois tant tardé à reconnoitre l'honneur que vous m'avés bien voulu faire.
On voit par cette pièce entr'autres, que la France a ses aigles, aussi bien que ses hiboux.
Par la manière dont on attaque la Philosophie Newtonienne, il me semble qu'on est convaincu qu'elle est vraie. Au moins on la combatte de la façon dont on a toujours combatu la vérité. Pour détruire l'erreur on n'a que la montrer telle qu'elle est, mais au contraire si on a affaire à la vérité, il est nécessaire de la déguiser & la représenter en monstre avant que de l'attaquer. C'est justement le moien dont on se sert à l'égard de Monsr Newton, mais c'est un moien qui devient bien inutile contre un défenseur assés clair voyant pour déveloper le vrai d'avec le faux, & assés habile pour le faire voir clairement aux autres.
Je vous supplie d'agréer une copie de cette pièce & de présenter l'autre avec mes très humbles respects à Madame La Marquise de Chastellet.
Je suis,
Monsieur,
Votre serviteur très humble & très obéissant,
Jurin
De Londres ce 1 Février 1740