à Bruxelles [c. 10 August 1739]
Mon cher marquis philosphe, quelle étoile nous sépare avant de nous avoir réunis?
Vous êtes encore à Mastericht comme je le vois par votre lettre du 31 aoust et moi je pars sur la fin de cette semaine pour aller faire un tour à Paris où je resterai près de 3 semaines. Vous retrouverai je à mon retour? Pourrai je avoir le plaisir de relire vos ouvrages et de revoir l'auteur, que j'aime encore plus qu'eux?
Vous me demandez si je sais que Milton a fait autre chose que des vers. Vous n'avez donc pas lu ce que j'en dis dans l'article qui le regarde, à la fin de la Henriade? Pour vous en punir les Ledet et Desbordes ont ordre de vous présenter leur nouvelle édition en grand papier qui m'a paru très belle.
Permettez moi en vous remerciant tendrement de ce que vous avez fait de vous envoyer encore les pièces ci-jointes que je vous prie de recommander à Paupie. J'ai extrêmement à cœur que des choses si vraies et si authentiques soient publiées et j'ai un plaisir bien sensible à me voir défendu par vous contre un scélérat.
Les Français deviennent plus Romains que jamais, j'entends Romains du bas empire. Adieu, j'ai pour vous l'estime que je dois à ceux qui pensent comme les Romains de la république. Je suis ici dans un pays où il n'y a ni Scipions ni Cicérons, mais j'y joue au brelan, j'y fais grande chère et je me dépique avec les plaisirs de l'abandon où je vois ici les lettres. Vale et me ama.