1738-12-13, de Gabrielle Émilie Le Tonnelier de Breteuil, marquise Du Châtelet-Lomont à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Voilà mon cher amy vne Epitre qui ie crois a grand besoin de votre reuision.
Nous attendons votre jugement p͞r n͞s y conformer, je v͞s suplie d'être inflexible, et de ne la donner à Praut que quand v͞s en serés content. Ie v͞s suplie d'escrire sur celle du plaisir et de ne la donner ni à Tiriot ni à personne. Apropos de Tiriot, votre ami a imaginé d'ôter Hermotime dans la ière Epitre et de mettre Tiriotà la place dont à v͞s dire vrai ie suis très en colère; p͞r mille raisons que v͞s deuinés sans doutte, sans que ie v͞s les dise, si on v͞s fait des propositions sur cela, ie v͞s prie de dire qu'Hermotime est bien mieux. Il est du moins plus doux et plus harmonieux. Il ne veut pas ie crois mettre le mot de Tiriot, il est heureusem͞t peu propre à la césure, mais enfin [je] ne veux pas même que le frontispice le désigne. Peutêtre mon crédit l'emportera t'il mais Tiriot est vn terrible aduersaire et si i'ay besoin de votre secours ie v͞s prie de ne me le pas refuser. Il ne faut pas en parler dans votre première lettre, mais seulement quand on v͞s Enuera les vers changés. Pardon de toutes ces minuties, mais v͞s saués v͞s y prêter, et qui plus est, v͞s y intéresser. La tragédie auance à vuë d'Œil. Adieu mon cher ami, v͞s saués si ie v͞s aime, et quel plaisir ie sens à v͞s le dire.