1738-10-18, de Voltaire [François Marie Arouet] à Graf Dietrich von Keyserlingk.

Très aimable Césarion,
Par votre épître j'apprends comme
Quelques vers griffonnés sur l'homme
Ont eu votre approbation.
J'ai peint cette absurde sagesse
Des fous sottement orgueilleux;
C'est à vous à vous moquer d'eux:
Vous n'êtes pas de leur espèce.

M. Michelet nous a envoyé, monsieur, les plans du paradis terrestre de l'Allemagne, car celui de France est à Cirey. Je ne sais ce que j'aime le mieux en vous, ou la plume de l'écrivain qui écrit de si jolies choses, ou le crayon qui dessine une si aimable retraite. Vous nous fournissez tous les plaisirs qu'on peut goûter quand on n'a pas le bonheur de vous voir. Madame la marquise du Châtelet va vous écrire. Elle est seule digne de vos présents; mais j'en sens le prix aussi vivement qu'elle. Nous sommes unis tous en Frédéric, comme les dévots le sont dans leur patron. Je serai, monsieur, toute ma vie, avec l'attachement le plus tendre, votre, &c.