ce 13 au soir [July 1737]
Je reçois votre lettre du io.
Il y a plaisir mon cher amy à vous donner des commissions savantes tant vous vous en aquitez bien. On ne peut rendre service ny mieux ny plus promptement.
Je suis bien aise qu'on se soit aperçu de la méprise que j'avois devinée, et qu'on ait réparé le petit qui pro quo. Franchement il auroit été dur d'avoir les compliments de L'académie française aulieu des bons ouvrages de L'académie des sciences.
Je viens de faire sur le champ L'expérience que monsieur Grosse conseille sur le fer. J'ay pris un morceau de fer de 2 livres que j'ay fait rougir sur une tuile à l'air. Je l'ay pesé rouge, je l'ay pesé froid. Il a toujours été du même poids. J'ay pesé tous ces jours cy du fer, et de la fonte, enflamez et ensuite refroidis, j'en ay pesé depuis dix Livres jusqu’à mille livres. Loin de trouver le poids du fer rouge plus grand je l'ay trouvé toujours plus petit de beaucoup, ce que j'atribue à L'effet de la fournaise prodigieusement ardente qui aura enlevé quelques particules de fer. C'est ce que je vous prie de dire au sr Grosse quand vous le verrez.
A l’égard de l'homme qui a le secret du tombac qui se file, il n'est pas le seul, mais je croi qu'on n'en peut filer que très peu, et qu'il se casse.
Nous pourions bien prendre cet homme, et luy donner une chambre, un laboratoire, La table, et une pension de cent écus. Il seroit àportée de faire ses expériences au milieu des forges, et d'essayer de faire de L'acier ce qui est plus aisé assurément que de faire de L'or. S'il a le malheur de chercher la pierre philosophale je ne suis pas surpris que de six mil livres de rentes il soit réduit à rien. Un philosophe qui a six mille livres de rente a la pierre philosophale.
Cette pierre conduit tout naturellement à vous parler d'affaires d'intérest. Voicy donc le certificat que vous me demandez.
Je vous réitère mes prières pour qu'on écrive à mr de Guise sans délay. Adieu, je vous embrasse. Une autre fois nous en dirons davantage.