1737-05-24, de Voltaire [François Marie Arouet] à Bonaventure Moussinot.

En réponse à la lettre du 17, mon cher amy, je vous dirai premièrement, que le balot de Joinville n'est point arrivé,

que je n'ay point receu la quittance faite à madame d'Aubigné, etc.

que j'attends avec impatience le pastel de la Tour,

que l'estampe qu'on a tirée sur ce pastel est horride, et misérable, n'en déplaise au graveur, mais peu je m'en soucie. Je ne prends point le party de mon visage.

J'ay receu le paquet de Hollande dans un balot venu par Bar sur Aube. Mais encor une fois point de nouvelles de celuy de Joinville.

Grand mercy des lettres circulaires, il les faudra réitérer. Mais à l’égard de mr de Richelieu qui ne me doit qu'une année, il ne me paroît pas qu'il soit de la bienséance d'exiger cette année dans le temps qu'il me procure le payement de 43200lt argent comptant.

Je crois donc qu'il faut accepter la proposition d'une délégation sur Bouillé Menard. Mr de Richelieu, ne me doit que 2900lt, dixième déduit, au premier de janvier 1737. Je consens de recevoir ces 2900lt en une délégation sur me d'Aubigné de Bouillé Menard en cas que cette dame doive encor 2900lt à mr de Richelieu. Je vous prie même d'arranger cela avec l'intendant. Il faudra en même temps qu'il vous donne outre cette délégation, la main levée des saisies, en forme. Par là on poura recevoir bientôt cette somme de 2900lt, en attendant celle d'environ 6000lt payable dans un an. J'en écris à mr le duc de Richelieu en conformité.

Cecy est donc mon cher abbé une affaire à suivre. Il s'agit de finir tout d'un coup, car moyennant ce transport de 2900lt en bonne forme, et cette main levée, j'auray droit sur tout ce que made Daubigné doit à mr de Richelieu. Je croi même que ce qu'elle doit encor à mr de Richelieu étant exigible je pouray exiger ces 2900lt sans attendre, et je me flatte que mr de Gennes, fermier général de Bretagne, qui agit pour me d'Aubigné, me donnera toutes les facilitez nécessaires.

Consommez donc cette affaire qui doit faire plaisir à mr de Richelieu et à moy. Mais en la consomant, tâchez adroitement de fixer quelque délégation à l'avenir pour être payé chaque année de ma rente de 4000lt la quelle commence au 1er janvier. Cela seroit d'une grande commodité, et je croi que Mr le duc de Richelieu, y donnera volontiers les mains.

A L’égard du portrait peint par Penel, n'en parlez point à Mr du Chastelet. On le fera payer d'ailleurs.

Voicy une lettre pour me de Bernieres, tante de mr le marquis de Leseau. Je prie mr votre frère de la porter, et d'avoir réponse. Je suis toujours en Angleterre!

A l’égard de mr le président d'Auneuil, vous pouriez l'aller un jour trouver au parlement, vous luy diriez que je peux savoir s'il a payé ou non cette demie année par ce que Demoulin qui recevoit pour moi, m'ayant emporté 20000lt a pu fort bien y mettre encor cette année; mais que je m'en raporte entièrement à mr Dauneuil.

Vale, ama me.