1735-03-16, de Voltaire [François Marie Arouet] à Cardinal Giulio Alberoni.

Mgr la lettre dont V. E. m'a honoré est un prix aussi flateur de mes ouvrages que L'estime de l'Europe a dû vous l’être de vos actions.
Vous ne me deviez aucun remerciment monseig. Je n'ay été que l'organe du public, en parlant de vous. La liberté et la vérité qui ont toujours conduit ma plume m'ont valu votre sufrage. Ces deux caractères doivent plaire à un génie tel que le vôtre. Quiconque ne les aime pas poura bien être un homme puissant mais ne sera jamais un grand homme.

Je voudrois être àportée d'admirer de plus près celuy à qui j'ay rendu justice de si loin. Je ne me flatte pas d'avoir jamais l'honeur de voir votre Eminence, mais si Rome entend assez ses intérêts pour vouloir aumoins rétablir les arts, le commerce, et remettre quelque splendeur dans un pays qui a été autrefois le maitre de la plus belle partie du monde j'espère alors que je vous écriray sous un autre titre que sous celuy de votre éminence dont j'ai l'honeur d’être avec autant d'estime que de respect.