ce 17 mars 1732
Voicy mr de Linant monsieur qui fait des vers pleins d'images et d'harmonie, et qui mérite par là votre bienveillance.
Je crois qu'il ira loin par ce qu'il a àprésent trop d'idées et de fougues. La fureur de la jeunesse se change par le temps en chaleur. Je désespérerois de luy si à son âge ses vers étoient raisonables. Il m'a paru baucoup plus sage que sa poésie, et je ne sçai rien de si bien qu'une conversation douce et une poésie vive. Vous mon cher Cideville qui possédez si bien ces deux talents encouragez les dans ce jeune élève. Il sera digne de vivre à Paris en bonne compagnie quand il vous aura veu quelque temps. J'envie le plaisir qu'il va avoir. Je ne peux m'empêcher de luy donner cette lettre afin que je sois sûr qu'on vous parle de moy. Vous m'avez envoyé versiculos dicaces et une épitre charmante. Adieu le cœur le mi[eux] fait, et l'esprit le plus aimable que je connoisse.
V.