Les origines de la peinture

Bibliographie

Barbieri, Giuseppe L’Inventore della pittura. Leon Battista Alberti e il mito di Narcisso[ + ]
Damisch, Hubert « L’inventeur de la peinture »[ + ]
Stoichita, Victor Ieronim Brève histoire de l’ombre[ + ]

Images

L’Origine de la peinture VASARI Giorgio

Medium : fresque

 

 Inventor picturae  JODE Gérard De

Medium : gravure

Commentaires : légende : « Et tu fili hominis sume tibi laterem, et pones eum coram te/, et describes in eo civitatem Ierusalem. Ezechiel 4. » (« Fils d’homme, prends une brique, place-la devant toi, et tu y traceras une ville, Jérusalem ».)

 

L’Invention du dessin  MURILLO Bartolomé Esteban

Medium : huile sur toile

Commentaires : Inscription sur le cartouche à droite : « tubo de la sombra/ origen/ la que admiras her/mosura/ en la celebre pintura ».

 

De l'invention de la peintureJODE Gérard De

Medium : gravure

 

L'Invention de la peintureVON SANDRART Johan Jacob

Medium : gravure

 

L'Invention de la peinture, lettrineVON SANDRART Johan Jacob

Medium : gravure

 

Pline l'Ancien (Gaius Plinius Secundus), Naturalis Historia, liber XXXV(redac: 77, trad: 1985) (15-16)(latin)

De picturae initiis incerta nec instituti operis quaestio est. Aegyptii sex milibus annorum aput ipsos inuentam, priusquam in Graeciam transiret, adfirmant, uana praedicatione, ut palam est ; Graeci autem alii Sicyone, alii aput Corinthios repertam, omnes umbra hominis lineis circumducta, itaque primam talem, secundam singulis coloribus et monochromaton dictam, postquam operosior inuenta erat, duratque talis etiam nunc. Inuentam liniarem a Philocle Aegyptio uel Cleanthe Corinthio primi exercuere Aridices Corinthius et Telephanes Sicyonius, sine ullo etiamnum hi colore, iam tamen spargentes linias intus. Ideo et quos pinxere adscribere institutum. Primus inleuit eas colore testae, ut ferunt, tritae Ecphantus Corinthius.

 6 sous-textes

Pline l'Ancien (Gaius Plinius Secundus), Naturalis Historia, liber XXXV, (trad: 1985) (15-16)(trad: "Histoire naturelle. Livre XXXV. La Peinture" par Croisille, Jean-Michel en 1985)(fran)(traduction récente d'un autre auteur)

La question des origines de la peinture est obscure et ne rentre pas dans le plan de cet ouvrage. Les Égyptiens affirment que cet art fut inventé chez eux, six mille ans avant de passer en Grèce ; c’est là manifestement une vaine prétention. Parmi les Grecs les uns disent qu’il fut découvert à Sicyone, les autres à Corinthe, mais tous qu’on commença par cerner d’un trait le contour de l’ombre humaine. Ce fut la première méthode ; la seconde, employant des couleurs isolées, fut dite monochrome ; par la suite on y apporta des perfectionnements, mais elle dure encore aujourd’hui. L’invention du dessin au trait remonte à Philoclès l’Égyptien ou à Cléanthe de Corinthe ; mais les premiers à le pratiquer furent Aridicès de Corinthe et Téléphanès de Sicyone, sans se servir encore d’aucune couleur : ils se mirent toutefois à parsemer de traits la surface à l’intérieur des contours et prirent ainsi l’habitude d’écrire à côté de leur œuvre le nom des personnages qu’ils voulaient peindre.

 

Pline l’Ancien; Landino, Cristoforo, Historia naturale di C. Plinio secondo tradocta di lingua latina in fiorentina per Christophoro Landino fiorentino, fol. 238r (italien)(traduction ancienne d'un autre auteur)

E incerto ne s’apartiene al nostro proposito quando fussi el principio de la pictura. Ma gli Egyptii affermano che fu trovata apresso di loro se mila anni innanzi che venissi in Grecia, ma è manifesto che loro predicano el falso. E Greci dicono alcuni che fu trovata da Sicioni, alcuni da Corinthi ma tuti s’acordono che fussi trovata da l’ombra dal huomo circumscripta colle linee e cosi fu la prima e la seconda era d’un colore solo e fu chiamata monocromathon laquale dura insino al presente tempo. Dicono che la lineare trovo Phylocle egyptio overamente Cleanthe Corintho. Et primi che la exercitorono furono Ardice Corintho e Telephane Sicyonio senza alcuno colore. Et nientedimeno spargeno le linee drento.

 

Pline l’Ancien; Brucioli, Antonio, Historia naturale di C. Plinio Secondo nuovamente tradotta di latino in vulgare toscano per Antonio Brucioli, p. 979 (italien)(traduction ancienne d'un autre auteur)

De principii della pittura è incerta la questione, E non apartiene al nostro proposito. Gli Egyttii affermano essersi trovata appresso di loro sei mila anni, avanti che passasse in Grecia, predicando il falso come è manifesto. Et i Greci dicano essersi ritrovata in Sicyone, altri apresso de Corinthi. Et tutti affermano essersi trovata dall’ombra dall’huomo circunscritta da linee. Et così essere stata tale la prima. La seconda di particulari colori, e detta monochromaton, poiche fu trovata piu operosa, e dura tale anchora hora. Dicano essersi trovate quelle delle linee, da Philocle Egyttio, ó Cleante Corinthio. I primi che la esercitassino, furno Ardice Corinthio, e Telephane Sicyonio anchora senza alcuno colore, e nondimeno spargenti le linee dentro. Et percio è nostro intendimento descrivere quali dipingessino. Il primo che trovasse il dare loro il colore, con uno vaso pesto (come dicano) fu Cleophanto Corinthio.

 

Pline l’Ancien; Domenichi, Lodovico, Historia naturale di G. Plinio Secondo tradotta per Lodovico Domenichi, con le postille in margine, nelle quali, o vengono segnate le cose notabili, o citati alteri auttori… et con le tavole copiosissime di tutto quel che nell’opera si contiene…, p. 1086-1087 (italien)(traduction ancienne d'un autre auteur)

Non si sa certo, ne ancho fa al proposito nostro, quando la pittura havesse principio. Ma gli Egittij affermano, ch’essi ne furono inventori sei mila anni inanzi ch’ella passasse in Grecia, ma non è dubbio alcuno, ch’essi dicono il falso. I Greci, alcuni dicono h’ella fu trovata a Sicione, e alcuni a Corintho ; ma tutti s’accordano, che fosse trovata dall’ombra, tirandovi le linee intorno. Et cosi fu la prima, e la seconda era d’un color solo, e chiamossi monocromato, poiche fu trovata piu faticosa, e tale ancora hoggi dura. La pittura delle linee dicono, che fu trovata da Filocle Egittio, overo da Cleanthe Corinthio. I primi che la misero in uso, furono Ardice Corinthio, e Thelephane Sicionio, ancora senza colore alcuno, e nondimeno vi sparsero le linee per entro. Et perciò intendo di contare quegli, ch’essi dipinsero. Il primo, che trovasse il dar loro il colore, con un vaso pesto, come dicono, fu Cleofanto Corinthio.

 

Pline l’Ancien; Du Pinet, Antoine, L’histoire du monde de C. Pline second… mis en françois par Antoine du Pinet, p. 928-929 (fran)(traduction ancienne d'un autre auteur)

Note marginale :
  • [1] Linearis pictura

Et quant à l’origine de l’art de peinture, on n’en sçauroit parler resoluement : aussi n’est ce mon principal dessein. Toutesfois, les Egyptiens se vantent, l’art de peinture avoir esté practiqué en leur region, plus de six mille ans avant qu’il fust question d’aucune peinture en Grece. Mais ce est notoirement faux. Et quant aux Grecs, les uns tiennent que l’invention de peindre vient de Chearema de la Moree, et les autres afferment que c’est de Corinthe, tous neantmoins conformément disent que la premiere peinture se fit à pourfiler seulement l’ombre d’une personne : et que par apres on commença à couvrir ce pourfil de une couleur seulement : et appelloit on ceste sorte de peinture, Monochroma, c’est à dire pourtrait d’une couleur. Et de fait, encores que l’art de peinture se soit agencé depuis : pour cela neantmoins les pourtraits d’une couleur n’ont esté abolis, car ils durent encores. Et quant à l’invention de peindre par linges (sic) [1], et de faire les traits de peinture, on l’attribue à Philocles Egyptien ou à Cleanthes de Corinthe. Et neantmoins on tient que Ardices Corinthien et Thelephanes de Chiarenia, furent les premiers qui firent estat de cest art : et toutesfois ils n’avoyent pas de couleurs, et si usoyent de tous les traits de peinture, tant du pourfil, que de ceux de dedans, car ils ne faisoyent que charbonner. Quoy qu’il en soit, il ne fera que bon de mettre icy les pieces qu’ils ont fait leur temps. Touchant l’invention de peindre avec couleurs, on dit que Cleophantus Corinthien fut le premier qui commença à barbouiller de tests de pots cassez.

 

Pline l’Ancien; Poinsinet de Sivry, Louis, Histoire naturelle de Pline, traduite en françois [par Poinsinet de Sivry], avec le texte latin… accompagnée de notes… et d’observations sur les connoissances des anciens comparées avec les découvertes des modernes, (vol. 11), p. 173 (fran)(traduction ancienne d'un autre auteur)

Quant à l’origine de l’art de la peinture, on ne trouve là-dessus qu’incertitudes et contradictions, qu’il n’entre pas dans mon plan de discuter. Les Egyptiens soutiennent qu’elle fut inventée chez eux six mille ans avant que les Grecs en eûssent la moindre connoissance. On sent la vanité et le peu de fondement de cette jactance egyptienne. A l’égard des Grecs, ils prétendent, les uns, qu’elle fut inventée à Sycione ; les autres, à Corinthe : mais tous tombent d’accord que ce qui lui donna naissance fut d’abord un simple trait calqué fidelement sur l’ombre d’un homme ; et qu’ainsi la premiere peinture fut monogramme, c’est-à-dire à un seul trait sans couleur : d’où il suit que la peinture monochrommate, ou à une seule couleur, est postérieure à celle-là, et ne peut lui être comparée pour le mérite de l’invention, Ces deux sortes de peintures subsistent encore aujourd’hui, précisément telles qu’elles furent inventées. La peinture linéale ou le dessein au simple trait creusé, eut pour inventeur, soit Philoclès Egyptien, soit Cléanthès Corinthien. Mais ce qu’il y a de reconnu et de certain c’est que les premiers artistes qui exercerent cet art, furent Ardicès de Corinthe, et Téléphanès de Sicyone ; ensorte toutefois qu’ils ne s’en tenoient pas au simple trait terminal, et jettoient plusieurs autres traits dans l’intérieur du dessein : mais le tout avec si peu d’art, qu’ils étoient obligés d’écrire à côté de chaque portrait le nom de la personne. Le premier qui fit des desseins colorés, fut Cléophante de Corinthe, qui imagina à cet effet de faire des crayons d’une pâte faite avec des tessons de terres de couleur, broyés et réduits en poudre.

 

Quintilien (Marcus Fabius Quintilianus), De institutione oratoria(redac: (95), trad: 1975:1980) (X, II, 7-8), p. 108 (latin)

 7. Turpe etiam illud est, contentum esse id consequi quod imiteris. Nam rursus quid erat futurum, si nemo plus effecisset eo quem sequebatur ? Nihil in poetis supra Liuium Andronicum, nihil in historiis supra pontificum annales haberemus ; ratibus adhuc nauigaremus, non esset pictura nisi quae lineas modo extremas umbrae quam corpora in sole fecissent circumscriberet. 8. Ac si omnia percenseas, nulla mansit ars qualis inuenta est, nec intra initium stetit ; nisi forte nostra potissimum tempora damnamus huius infelicitatis, ut nunc demum nihil crescat : nihil autem crescit sola imitatione.

 1 sous-texte

Quintilien (Marcus Fabius Quintilianus), De institutione oratoria, (trad: 1975:1980)(trad: "L’Institution oratoire" par Cousin, Jean en 1975:1980)(fran)(traduction récente d'un autre auteur)

C’est encore une honte de n’aspirer qu’à égaler ce que l’on imite : car, je le répète où en serait-on, si chacun n’eût fait que suivre son guide ? Nous n’aurions rien en poésie au-dessus de Livius Andronicus ; rien en histoire au-dessus des Annales des pontifes; on naviguerait encore sur des radeaux, et la peinture se réduirait à tracer les contours de l’ombre des corps. Passez en revue tous les arts, vous n’en trouverez pas un qui soit demeuré tel qu’il a été inventé, et qui n’ait fait aucun progrès.

 

Isidore de Séville (Isidorus Hispalensis), Etymologiae XIX(redac: (630), trad: 1995), "De pictura" (numéro XVI (cf Reinach 32)) , p. 121-123 (latin)

Pictura est imago exprimens speciem rei alicuius, quae dum uisa fuerit ad recordationem mentem reducit. Pictura autem dicta quasi fictura : est enim imago ficta, non ueritas. Hinc et fucata, id est ficto quodam colore inlita, nihil fidei et ueritatis habentia. Vnde et sunt quaedam picturae quae corpora ueritatis studio coloris excedunt et, fidem dum augere contendunt, ad mendacium prouehunt ; sicut qui Chimaeram tricipitem pingunt, uel Scyllam hominem sursum, caninis autem capitibus cinctam deorsum. Picturam autem Aegyptii excogitauerunt  primum umbra hominis lineis circumducta. Itaque initio talis, secunda singulis coloribus, postea diuersis ; sicque paulatim sese ars ipsa distinxit et inuenit lumen atque umbras differentiasque colorum. Vnde et nunc pictores prius umbras quasdam et lineas futuraeque imaginis ducunt, deinde coloribus implent tenentes ordinem inuentae artis.

Commentaires :  

 1 sous-texte

Reinach, Adolph (éd.), Textes grecs et latins sur la peinture ancienne. Recueil Milliet, (fran)(traduction récente d'un autre auteur)

La peinture est une image qui rend l’apparence d’un objet – qui dit peindre dit feindre. Toute image est fiction, non réalité […] Peu à peu l’art sortit de son chaos ; il découvrit la lumière et les ombres et les différences des couleurs. C’est pourquoi, aujourd’hui encore, les peintres tracent d’abord certaines ombres et lignes de l’image future, puis les remplissent de couleurs, observant les règles d’un art perfectionné.

 

Alberti, Leon Battista, De pictura(publi: 1540, redac: 1435, trad: 2004) (II, 26), p. 100-102 (latin)

Censebat Quintilianus priscos pictores solitos umbras ad solem circumscribere, demum additamentis artem excrevisse. Sunt qui referant Phyloclem quendam Aegyptium et Cleantem nescio quem inter primos huius artis repertores fuisse. Aegyptii affirmant sex milibus annorum apud se picturam in usu fuisse prius quam in Graeciam esset translata. E Graecia vero in Italiam dicunt nostri venisse picturam post Marcelli victorias in Sicilia. Sed non multum interest aut primos pictores aut picturae inventores tenuisse, quando quidem non historiam picturae ut Plinius sed artem novissime recenseamus, de qua hac aetate nulla scriptorum veterum monumenta quae ipsae viderim extant.

 2 sous-textes

Alberti, Leon Battista, De pictura, (trad: 2004) (II, 26), p.101-103 (trad: " La Peinture" par Golsenne, Thomas; Prévost, Bertrand en 2004)(fran)(traduction récente d'un autre auteur)

Quintilien pensait que les tout premiers peintres avaient l’habitude de circonscrire des ombres au soleil, et qu’ensuite seulement l’art s’était développé par ajouts. Certains racontent qu’un certain Philoclès, un Égyptien, et je ne sais quel Cléantès furent parmi les premiers à découvrir cet art. Les Égyptiens affirment que la peinture était pratiquée chez eux depuis six mille ans avant d’être introduite en Grèce. Et c’est de la Grèce à l’Italie, disent nos auteurs, qu’est passée la peinture après les victoires de Marcellus en Sicile. Mais il importe peu de s’attacher aux premiers peintres ou aux inventeurs de la peinture, quand notre objectif n’est certes pas, comme chez Pline, une histoire de la peinture, mais un examen tout à fait nouveau de l’art de peindre.

 

Alberti, Leon Battista, De pictura , (trad: 1536) (II, 26), p. 233-234 (trad: "[Della pittura]" en 1536)(italien)(traduction ancienne de l'auteur)

Diceva Quintiliano ch’e’ pittori antichi soleano circonscrivere l’ombre al sole, e così indi poi si trovò questa arte cresciuta. Sono chi  dicono un certo Filocle egitto, e non so quale altro Cleante furono di questa arte tra i  primi inventori. Gli Egizi affermano fra loro bene anni se’ milia essere la pittura stata in uso prima che fusse traslata in Grecia. Di Grecia dicono i nostri traslata la pittura  dopo le vittorie di Marcello avute di Sicilia. Ma qui non molto si richiede sapere quali prima fussero inventori dell’arte o pittori, poi che non come Plinio recitiamo storie, ma  di nuovo fabrichiamo un’arte di pittura, della quale in questa età, quale io vegga, nulla si truova scritto.

 

Ghiberti, Lorenzo, I commentarii(redac: (1450)), p. 81 (italien)

Furon dette arti create dall’ombra del sole, parato innanzi el sole alla forma virile. Gli Egyptii dicono essere stati essi, s’accordano l’ombra del sole liniata intorno a detta ombra fosse il principio e’l primo origine dell’arte statuaria e della pictura. F[i]locle fu lo inventore e fu d’Egypto; costui dié principi al disegno et alla teorica di tanta dignità.

 

Ghiberti, Lorenzo, I commentarii(redac: (1450)), p. 51 (italien)

Ma affermano gl’Egytii che ’l disegno, il quale è origine e fondamento dell’arte statuaria e della pittura, essere stata inprima in Egypto circa d’anni semila che in Grecia venissi o fosse in uso, ma vanamente dicono. E Greci dicono che essi non furono trovatori d’esso, alquanti dicono ch ’el disegno fu trovato da’ Corintii. Ma ciascuno afferma essere trovato colla ombra del sole parata innanzi alla forma dell’huomo virile. El primo fu Fylocle Egyptio, il quale la circundò dalle linie, overo fusse trovato da Creante Corintio, o da Talafane Sicinio. Senza alchuna cosa essi spargevano dette linie circundando dette ombre.

 

Filarete, Antonio di Pietro Averlino, dit, Trattato di architettura(redac: (1465)) (t. II), p. 581 (italien)

Eragli ancora quello che Quintiliano dice che ritraeva da l’ombra del sole delle figure, e poi si venne assottigliando a poco a poco l’arte. Eragli quello Filo egizziaco, el quale dice che lui fu de’ primi inventori d’essa pittura, la quale, come è detto, dice loro averla in uso ben se’ milia anni inanzi che’ Greci, in Italia essere venuta dopo le vittorie di Marcello avute in Sicilia.

 

Leonardo da Vinci, Libro di pittura(publi: 1651, redac: 1485:1519), « Come fu la prima pittura » (numéro t. I, § 129) , p. 210 (italien)

La prima pittura fu sol d’una linea, la quale circondava l’ombra dell’uomo fatta dal sole ne’muri.

 

Virgile, Polydore (Polydorus Virgilius), De inventoribus rerum libri tres. M. Antonii Sabellici de artium inventoribus ad baffum carmen elegantissimum…(publi: 1509, redac: 1499, trad: 2002) (livre II, chap. 24, §2-3), p. 344 (latin)

Picturam itaque, teste Plinio libro 7, Gyges Lydius omnium primus inuenit in Aegyptio, in Graecia vero Pyrrhus Daedali cognatus, ut Aristoteli placet, ut Theophrasto Polygnotus Atheniensis. […] Incerta igitur de picturae initiis quaestio est, nam et Aegyptii, eodem Plinio teste, ante sex milia annorum apud se inuentam quam in Graeciam transiret affirmant. Graeci autem alii apud Sicyonios, alii apud Corinthios repertam dicunt. Omnes ab umbra hominis linei circunducta, quod Fabius aperte testatur in 10, dicens : Non esset pictura nisi quae lineas modo extremas umbrae quam corpora in sole fecissent circunscriberet. Ac si omnia percenseas, nulla sit ars qualis inuenta est nec intra initium stetit. Quintilianus hactenus.

 

Pino, Paolo, Dialogo di pittura(publi: 1548), p. 122-123 (italien)

Iddio fu e pittore e scultore […] Ma, quant’all’invenzione umana, vi sono diverse openioni secondo Plinio. Lodansi gli Egizii, dicendo che tal arte suscitò da loro ; il ch’è falso. Gli Greci dicono che ne furono inventori. Altri dicono che li Scizioni la ritrovò (sic) ; altr’i Corinti. Ma sia come si voglia, tutti sono conformi nel modo dell’invenzione, affirmando che tal arte ebbe origine dall’ombra dell’uomo, et è molto credibile ; onde, affirmandosi un uomo nello spazio lucidato dal sole, Ardice, che fu il primo che l’isercitò come arte, contornava la detta ombra in terra o in altra sua materia con linee dette da noi profili, i quali furono trovati da Filocle egizzio over Cleante corinto. Costoro cominciorono a distinguer linee con un certo color nero nommato monochromaton.

 

Doni, Vincenzo, Disegno(publi: 1549), p. 11r (italien)

Ma se gl’ha a riguardare donde le derivano, non so come l’andrà, perche la pittura venne da l’ombra e la scoltura da gl’idoli.

 

Vasari, Giorgio, Le vite de’ più eccellenti pittori, scultori e architettori nelle redazioni del 1550 e 1568(publi: 1550:1568), p. 218 (italien)

Ma, secondo che scrive Plinio, questa arte venne in Egitto da Gige lidio, il quale, essendo al fuoco e l’ombra di se medesimo riguardando, subito con un carbone in mano contorno se stesso nel muro[Note contexte] ; e da quella età per un tempo le sole linee si costumo mettere in opera senza corpi di colore, si come afferma il medesimo Plinio ; la qual cosa da Filocle egizzio con più fatica e similmente da Cleante e Ardice corinzio e da Telefane sicionio fu ritrovata. Cleofante corinzio fu il primo appresso de’Greci che colori, e Apolodoro il primo che ritrovasse il pennello. Segui Polignoto tasio, Zeusi e Timagora caldidese, Pithio e Aglaufo tutti celebratissimi, e dopo questi il famosissimo Apelle, da Alessandro Magno tanto per quella virtù stimato e onorato, ingegnosissimo investigatore della calumnia e del favore ; come ci dimostra Luciano, e come sempre fur quasi tutti e’pittori e gli scultori eccellenti, dotati dal cielo il più delle volte, non solo dell’ornamento della poesia, come si legge in Pacuvio, ma della filosofia ancora, come si vide in Metrodoro, perito tanto in filosofia quanto in pittura, mandato da gli Ateniesi a Paulo Emilio per ornar il trionfo, che ne rimase a leggere filosofia a' suoi figliuoli.

 

Lomazzo, Gian Paolo, Il Libro dei Sogni(redac: (1563)), Leonardo Vinci e Fidia, entrambi pittori e scultori (numéro Ragionamento quinto) , p. 88 (italien)

La prima pittura di altro che di linee fatta non era, secundo il principio suo, che così del dintorno a l’ombra di l’uomo nacque, che fu in Sicione, abenché si dichi che in Egitto cotal cosa trovasse Gigie Lidio, et in Grecia un parente di Dedalo, chiamato Pirro, et altrimenti Euchir, et in Corinto un altro, che fu da molti tenuto per Polignoto ateniese ; la qual cosa non è vera.

 

Allori, Alessandro, Ragionamenti delle regole del disegno(publi: 1973, redac: 1563:1607), p. 1945 (italien)

E facendoci alquanto più da lontano, ti dico primieramente che, quando ebbe principio il disegno, è avvenuto in questo come in molte altre cose, che da un picciol principio son poi sempre venute ampliando e crescendo con la lunghezza del tempo, dalla quale gl’ingegni degli uomini si sono industriosamente affaticati ; e siamo quasi (possiam dir) certi che quelli primi, che volsero cominciar con l’arte a immitare dalla natura, cominciarono a dintornar le cose con una linea sola, o per via dell’ombra che fanno le cose battute dal sole, o sì veramente quelle che derivano dal lume ordinario di candela o lucerna, ricevuta che sia l’ombra sopra parete o muro o altra cosa piana ; e questo è quello ch’io chiamo disegno. Poi, quando divennero più industriosi, gli uomini cominciarono, quelle cose che avevano disegnate – come io ti ho detto – con una sola linea dintornandole solamente (da questo poi son derivati quelli che noi diciamo i dintorni), a cercar di dar loro con la spessezza delle linee ritondità e rilievo ; e questa è quella che fu poi chiamata pittura, la quale se da principio fu fatta con un color solo o con più, poco importa, sendo che chi pur fusse di questo curioso, vegga Plinio nel xxxv libro al quarto capitolo, il quale ne tratta sì degli antichi avanti a lui come di quelli che furono ne’ suoi tempi maestri eccellentissimi.

 

Borghini, Vincenzio, Selva di notizie(redac: 1564), p. 130 (italien)

I Greci chi dice in Sicione et chi dice in Corinto essendosi presa l’immagine da l’ombra dell’uomo, et che però la prima pittura fu chiamata lineare, la seconda d’un solo colore chiamata monochroma, di poi la più varia ch’ancora oggi è in uso.

 

Gilio, Giovanni Andrea, Degli errori e degli abusi de’ pittori circa l’istorie(publi: 1564), p. 12-13 (italien)

Non si può certamente sapere chi inventore di sì bell’arte fusse, conciossia che Plinio dica che gran lite fu già di questo tra i Greci e gli Egizzii, i quali si vantavano esserne stati inventori più di sei mila anni prima che i Greci notizia n’avessero. I Greci, ciò negando, dicevano che i Sicionii ne furono inventori gran tempo prima de loro. Altri furono d’opinione che i Corinti inventori ne fussero. Tutti però s’accordano che da l’ombra de l’uomo origine avesse, la quale fu in quei principii grossamente circoscritta. Filocre Egizzio fu il primo che con linee distinguesse le membra de l’uomo. Altri danno questa lode a Cleante Corinzio. I primi, poi, che senza colori l’esercitarono, furono Ardice Corinzio e Telefane Sicionio. Vi fu poi aggiunto un colore, col quale fu gran tempo esercitata.

 

Adriani, Giovanni Battista, Lettera a m. Giorgio Vasari, nella quale si racconta i nomi, e l’opere de’più eccellenti artefici antichi in Pittura, in bronzo, et in marmo(publi: 1568, redac: 1567) (t. I), p. 183 (italien)

Dicesi adunche, lasciando stare gli Egizii dei quali non è certezza alcuna, in Grecia la pittura avere avuto suo principio ; alcuni dicono in Sicione et alcuni in Corinto, ma tutti in questo convengono ciò essersi fatto prima semplicemente con una sola linea circondando l’ombra d’alcuno, e dipoi con alcuno colore con alquanto più di fatica ; la qual maniera di colore è stata, come semplicissima, in uso et ancora è.

 

Van Haecht, Laurens, Mikrokosmos Parvus mundus(publi: 1579), p. 73r (latin)

Phidiacus pastor pingendi repperit artem,

Sed rudis imprimis nec bene culta fuit.

Nam dum pascit oues viridi fortassis in agro,

Visa est ante oculos vnius vmbra suos.

Hanc notat et fuluae digitis impressit arenæ,

Ipsa recessit ouis, forma notata manet.

Post hunc, vt referunt, perfecte inuenit Apelles

Artem picturae commodiore via.

Scilicet vt graphijs depingeret omnia pictor,

Cypria sic Coa stat dea facta manu.

Sic igitur vates pictoris rite loquentis,

Et pictor muti nomina Vatis habet.

Hic etenim certo depingit cuncta colore,

Ille refert valida praelia gesta manu.

Commentaires : Lettre de l'image: Et tu fili hominis sume tibi laterem, et pones eum coram te, et describes in eo ciuitatem Ierusalem. Ezechiel. 4.  

 1 sous-texte

Van Haecht, Laurens, Mikrokosmos, (trad: 1630), "De l'invention de la peinture" (numéro LXXII) , fol. 73r (trad: "Le Microcosme contenant divers tableaus de la vie humaine representez en figures avec une brieve exposition en vers francois" en 1630)(fran)(traduction ancienne d'un autre auteur)

Certain berger voyant l'ombre et figure

D'une brebis qui prenoit sa pasture,

De son baston tirant un simple trait,

En contrefit l'image, et le portrait.

Et telle fut autresfois l'origine

De la Peinture art excellent et digne,

Cest asçavoir que quand on advisoit

L'ombre d'un corps on le contrefaisoit.

Mais peu apres Apelles peintre habile

Fit des pourtraits de façon si gentile

Qu'il amena l'art à perfection,

Et excella en sa profession.

Oeuvre il ny a science ni affaire

Que tout à coup quelcun puisse parfaire,

Mais peu à peu se void l'avancement

De ce qui est rude au commencement.

Oeuvres liées :

De l\'invention de la peinture (1630) gravure

 Inventor picturae  (1579) gravure

Commentaires : Lettre de l'image: I. Cor. 13.Quand la perfection sera venue, lors ce qui est en partie sera aboli.

 

Borghini, Rafaello, Il riposo di Raffaello Borghini : in cui della pittura, e della scultura si fauella, de’piu illustri pittori, e scultori, et delle piu famose opere loro si fa mentione ; e le cose principali appartenenti à dette arti s’insegnano(publi: 1584), p. 266 (italien)

Marque-page :
  • [1] Del principio della pittura.

[1] Del principio della pittura varie sono l’opinioni. Conciosiacosa che alcuni vogliano che ella appresso à gli Egitii si cominciasse ad esercitare, altri appresso a’ Greci, ò in Sicione, ò in Corinto; ma tutti s’accordano che circondando l’ombra dell’huomo con una sol linea primieramente si facesse, e poi aggiugnendovi un sol colore e ponendovi piu diligenza; ma però con semplice maniera alquanto si migliorasse; il che dicono haver insegnato Filocle d’Egitto, ò Cleante di Corinto.

 

Lamo, Alessandro, Discorso intorno alla scoltura, et pittura(publi: 1584), p. 5 (italien)

Non fu la Pittura da gli Egitii, o da Caldei, e la scoltura da’ Corinthii quasi ne’ primi secoli ritrovate ? E, se per sorte se mi dicesse, che particolari, e private persone insegnassero la Pittura, come furono il Lidio Gige, l’Egittio Filocle, et il Greco Cleante, i quali l’ombre, che i corpi naturali formavano in terra semplicemente contornando, furono della Pittura, che hoggidì si chiama ancora lineare, o graphide, i primi inventori e maestri, e dopo loro Erdice, et Elefane, che senza pur diversità di colori, cominciarono a spargere per cotali dintorni linee ; si mi puotrebbe per questo argomentare, che nobile non fosse la Pittura ?

 

Montjosieu, Louis de, Gallus Romae hospes. Ubi multa antiquorum monimenta explicantur, pars pristinae formae restituuntur. Opus in quinque partes tributum(publi: 1585), « Commentarius de pictura » , p. 1 (latin)

Graeci alii Sycione, alii apud Corinthios primum inuentam esse praedicant, rudibus primum initiis : nempe umbra hominis lineis in parietibus circumscripta. Vnde prima lineamenta ducere, uno verbo adumbrare dicimus.

 

Garzoni, Tommaso, La piazza universale di tutte le professioni del mondo(publi: 1585), « De’ pittori, e miniatori, et lavoratori di mosaico » (numéro Discorso XCI) , p. 289 (italien)

Altri dicono, che i Corinthii, o quelli di Scio dell’ombra dell’huomo furono i primi, che trahessero i principii di così eccellente professione. Ma Isidoro lib. 19 apertamente dice, che gli Egittii furono i primi, che con linee circonscrivessero il corpo humano, e Plinio nel 35 afferma, che Filode Egittio, o Cleante Corinthio trovòle linee della pittura. Cleophanto Corinthio poi, secondo Arato, ritrovò i colori, e Apollodoro Atheniese ritrovò il pennello.

 

Armenini, Giovanni Battista, De’ veri precetti della pittura(publi: 1587), « Dell’origine della pittura e della distinzione di essa in parti, con una breve diffinizione di ciascheduna » (numéro I, 5 ) , p. 57 (italien)

Egli è opinione commune, giovani onorati, de gli scrittori più famosi che la pittura si trovasse da gli Egizzii e che la sua origine si sia cavata dall’ombra dell’uomo, laonde dicono che fra i primi gli fu un certo Filocle egizzio et un no so chi Cleante corinzio, e che Ardice e Telefano si tengono fra i primi, che ne facessero essercizio e ciò era con le linee o contorni che si dica, solamente. Ci sono altri poi, che si hanno creduto che si usasse inanzi al diluvio. Ma secondo Plinio fu l’inventore Gige Lidio d’Egitto, il quale dice che, essendo al fuoco e risguardando la sua ombra, tolse un carbone e contornò se stesso.

 

Possevino, Antonio, Tractatio De Poesi et Pictura ethnica, humana et fabulosa collata cum sacra(publi: 1593), « Quinam pingendi præcepta tradiderint antiqui et recentes » (numéro caput XXIV) , p. 282 (latin)

Note marginale :
  • [1] Plin. li. 35.
Marque-page :
  • [2] Pictura quomodo inuenta

[1] [2] Plinius toto pene libro 35 hoc ipsum alia ratione est persecutus. Nam cum picturam primum inuentam tradidisset hominis vmbra circumducta, deinde ostendisset vmbram fuisse coloribus inductam, ac post modum linearum sine coloribus, addidit, omnes qui volunt eminentias videri, candicantia faciunt, coloreque condiunt nigro, magna prorsus in æquo extantia ostendentes, et in confracto solida omnia.

 1 sous-texte

Possevino, Antonio, Tractatio De Poesi et Pictura ethnica, humana et fabulosa collata cum sacra, (fran)(traduction récente d'un autre auteur)

Pline a soutenu la même chose dans presque tout le livre XXXV, mais avec d’autres arguments : après avoir dit que la peinture fut d’abord découverte en suivant le contour de l’ombre d’un homme, et avoir montré que la peinture fut une ombre recouverte de couleurs, et même faite seulement de lignes sans couleurs, il ajoute : tous ceux qui veulent qu’on voie les parties en relief, les peignent blanchissantes, et ils atténuent les autres avec du noir, présentant les grands objets au premier plan comme proéminents, et tous les corps solides comme réduits en miettes.

 

Van Mander, Karel,  Het leven der oude antijcke doorluchtighe schilders(publi: 1603:1604 ), « Voor-reden, op het Leven der oude Antijcke Doorluchtighe Schilders, soo wel Griecken als Romeynen », fol. 61v (n)

Marque-page :
  • [1] Schilder-const uyt Chaldeen, door Egypten in Griecken, te Room, en van daer herwaerts overgecomen.
  • [2] Versierige afcomst der Schilder-const uyt Narcisso.
  • [3] Pictura, een schaduwe van t’rechte wesen.

Eyndelijc, de Schilder-const is (nae al dit merckelijc bewijs) een seer oude Const, schijnende of sy aenvanckelijc met alle ander vernufticheit uyt Chaldeen door Egypten in Griecken, van daer te Room, en also herwaert is gecomen en verspreyt geworden. [1] Wat nu belangt van den eersten vinder der selver, oft hoe dese te voorschijn is gecomen, gelijc sy een edel vry Const is, die voormaels by den ouden Romeynen, niet dan van edel geboren lieden mocht wesen geoeffent, als Plin. in’t 35e. Boeck, in’t 10. cap. verhaelt, niet wesende gerekent onder den hantwercken oft Ambachten, dewijle sy de stomme suster is van de seer geestige Poeterije. Wort van eenige ooc aerdich versiert, datse haer afcomst heeft van Narcisso, die in een bloem is verandert, ter oorsaec dat sy de bloen van alle Consten is, dat daerom de gantsche Fabel van Narcisso niet ongevoeglijc op de selvige geduyt en can worden: want wat mach beter rijmen op de schoon gestaltenis deses Iongelings in de Cristallinige clare fonteyne schaduwende, dan een constich geschildert Beelt uytnemende wel na t’leven gedaen, van een geleerde hant eens Const-rijcken Schilders? [2] Ic verwondere my self al schrijvende, hoe wel dit te pas comt, bevindende onse Const alree een schaduwe van t’rechte wesen, en den schijn van het zijn vergeleken: want by dat eenige schrijven, soude dese edel natuersche Hemel-gave de dochter zijn van de Schaduwe. Mijn getuyge is den geleerden Quintilianus, wiens meyninge is, datse haren oorsprong heeft uyt de schaduwe die de Son geeft, [3] waer naer de Oude de hooft-trecken genomen souden hebben, omtreckende dese schaduwe.

 

Agucchi, Giovanni Battista, Trattato della pittura(publi: 1947, redac: 1603:1610), p. 241 (italien)

E si può tener per vero quel che dicono tutti gli autori, che il primo principio fosse insegnato dall’istessa natura, con l’ombre de’corpi ricevendo il lume; e che si sia cominciato a delineare i dintorni dell’ombre di essi, et indi a distinguere le membra, e poi le parti illuminate dall’ombreggiate: e si può dire, che (secondo afferma Plinio) la prima sorte di pittura fosse la lineare, ritrovata (com’egli dice) da Cleante Corinthio; e che Ardice Corinthio, e Telefane Sicionio, fossero i primi ad esercitarla senza colori, spargendo solamente delle linee entro le figure per finger l’ombre: e che Cleofante Corinthio fusse il primo, che la colorò di un sol colore.

 

Marino, Giovanni Battista, Dicerie sacre(publi: 1614), « La pittura, parte prima » (numéro Diceria I) , fol. 8v (italien)

Note marginale :
  • [1] Plin. l. 35. Ælian. Var. hist. L. 4. Petr. Vic. Var. lec. ca 76. et 82. Pet, Crin. de hon. discip. L. I. c. 11. Cœl. Rhodig. antiq. lect. L. 16. cap. 23.

La seconda parte, cioè la sperienza, ne’Pittori terreni è difettosa, percioche la Pittura non in un tempo solo, né da una sola persona hebbe perfettione, ma da molti, et appoco appoco ricevette accrescimento. [1] I Corinthii dall’ombra dell’huomo (come si disse) trassero i suoi principii. Gli Egittii furono i primi, che con linee il corpo humano circoscrivessero. Ardice Corinthio, e Telefane Sicionio la essercitarono senza colori. Venne poi pian piano l’arte a distinguer se stessa, e con le differenze de’colori, e de’lumi, e dell’ombre a formar le commessure.

 

Butrón, Juan de, Discursos apologeticos, en que se defiende la ingenuidad del arte de la pintura, que es liberal, de todos derechos, no inferior a las siete que comunmente se reciben(publi: 1626), « Discurso segundo, de los inventores de la pintura, y de sus principios », fol. 2v-3r (espagnol)

Aunque ay diferentes opiniones en la invencion de la pintura, pues unos en Grecia dixeron, que los Sicionios, otros que los Corintios la hallaron, segun Plinio ubi supra en el cap. 3. Graecii autem alii apud Sycionem, alii apud Corinthios repertam. En el modo todos concuerdan, diziendo, que tuvo principio de perfilar en la pared, o suelo la sombra de un hombre, como la claridad del Sol, o de una luz lo permitia, pareciendoles tenia alguna semejança con el todo. De Plinio es en el lugar citado, ibi. Omnes ab umbra hominis lineis circunduncta. Celio Calcagnino in tractatu de profectu, ubi de umbris, late. Facil es de créer este humilde principio, pues siempre lo fueron los que tuvieron todas las artes y ciencias, que oy vemos tan alentadas con el exercicio dellas : Omnium rerum principia parva sunt, sed suis progressionibus usa, augentur. De Ciceron es en el lib. 5 de finibus, y en el primero de las Tusculanas.

 

Espinosa y Malo, Felix de Lucio, El pincel, cuyas glorias descrivia Don Felix de Lucio Espinosa y Malo(publi: 1681), p. 42-43 (espagnol)

Dizen algunos, que en Grecia tuvo su origen, y otros afirman, que en Sicion, y muchos asseguran, que en Corinto ; pero todos convienen en que fue su principio el señalar lors perfiles por la sombra, y despues poco à poco se discurriò e los colores, cuyos primeros artifices se nombran en la comun historia, el Sicionio Telefanes, el Coranto Cleantes, y el Egyocio Philocles.

 

Carducho, Vicente, Diálogos de la pintura, su defensa, origen, essencia, definicion, modos y diferencias(publi: 1633), “Dialogo Segundo del origen de la pintura; quienes fueron sus inventores; como se perdio, y se bolvio à restaurar; su estimacion, nobleza, y dificultad”, fol. 27r (espagnol)

Marque-page :
  • [1] Modo de començar la pintura
  • [2] Pinturas sin colores

[1] Aristóteles quiere, que en Grecia fuesse hallada de Pirro; y aunque son tan varios los pareceres desta verdad, todos concuerdan en el modo que fue circunscribir con un carbon, ò otra materia una sombra, que casi siempre de humildes principios ha sacado el discurso del hombre heroicos fines, que han lucido en el mondo. A estos perfiles exteriores, no faltò quien se atreviesse a delinear los interiores y con la observacion y experiencia, poco a poco se fueron adelantando. Unos quieren que fuesse primero Filon Edipcio, otros que Eleante: continuaron con admiracion, Ardice, y Telefane, uno Corintio, y otro Escion [2]: pero pintaron sin colores, sólo con líneas, que a mi parecer serian como son oi las estampas, ò dibujos.

 

Leon, Antonio de (relator del Supremo Consejo de las Indias), Por la pintura, y su exempcion de pagar alcavala (publi: 1633), fol. 174v (espagnol)

La Pintura toda es puntos, y lineas prolongadas, ò corridas por el plano de una tabla, ò lienço, no imaginarias, sino practicas. Pictor enim (dixo el Filosofo de generat.) ubi primum lineas descripserit animantium, mox vario illinit colore, ac perficit. Principios fueron del Arte las lineas, pues con solas ellas pintaron Filocle, y Cleante, Ardices y Telephanes, como refiere Plinio lib. 35. cap. 3. de lineas  se forma el dibujo, que los Griegos llamaron Diagraficen, que se enseñava à los mañcebos nobles, como oi el escrivir, segun el mismo Plinio d.c. 10. Oi a la continuacion de las partes llaman lineamentos. Celebre es la competencia de Apeles y Protogenes, sobre tirar una linea en un plano, y el adagio del mismo Apeles : Nulla dies sine linea : por lo qual la Pittura es toda superficie. Y si como dixe Socrates, tambien professor del Arte, la Pintura imita, y representa lo que se vè : Pictura est imitatio, et repræsentatio eorum, quæ videntur, segun Xenoph. lib. 3. memor. cap. 29. si representa lo que se vè, y de nigun cuerpo, alomenos denso, vemos mas que la superficie, porque nuestra vista no penetra la cantidad : siguese, que la Pintura solo retrata las superficies. Proclo dixo, que la del cuerpo se retrata en la sombra. Plinio dict. cap. 3 Pedro Crinito lib. I. de bonest. Discipl. Cap. II. El Cavallero Marino dicheria de la Pittura. Bulengero lib. I. de Pictur. Cap. 3. y otros afirman, que la primera invencion de la Pintura fue por las sombras, delineando sus extremidades. Y siendo esto lo primero, fue, y es, lo mas dificil del Arte, por con fistir en ello el relieve de las figuras: rematar los cuerpos, y hallar modo de fenecer lo que se pinta, es lo mas raro del Arte: Extrema corporum facere (dixo Plinio d. cap. 10) et desinentis picturæ modum includere, rarum in successu artis invenitur. De que se sigue, que las pinturas no son mas que superficies, no matematicas, pero tan semejantes à ellas, que lo material, que en quanto al Arte tienen, solo la vista lo percibe, y el entendimiento lo abstrae: si bien en este ser consiste su mayor excelencia, pues careciendo, casi totalmente, de profundidad, la muestra à los ojos tan clara, que conoscemos lo eminente de los cuerpos por sus relieves, y lo progundo por sus sombras, siendo todo un plano.

 

Angel, Philips, Lof der Schilderkonst(publi: 1642, redac: 1641), p. 12 (n)

De eerste Schilderyen sijn gheweest niet meer dan alleen simpele ommetrecken, by de Latijnen ghenaemt linearis pictura, hier naer wiert ghevonden dese buyte-trecken te vullen met een der ley Coleur, het welcke by den Griecken geheeten wiert Monochroma, dat is, Schilderyen met eene Verruw'. Cleophantes heeft ghevonden het Schilderen op steen. Hygtenontes, Dinias, en Charmas sijn de eerste gheweest die Konterfeytsels maeckte met eenderhande verruw, Eumarus heeft eerst onderscheyt ghemaeckt tusschen Man en Vrou: Soo getuycht Plinij lib. 35. cap. 8. Simon van Cleonen, (welcke Stadt in Achaien leyt) heeft eerst waer-genomen de verkortinge. Siet daer van C. Vermander, in't beschrijven van 't leven der oude antijckse Schilders fol. 3. Eenen anderen Polignotus, als hier boven verhaelt, heeft de Vrouwe beginnen te Cieren met hulselen, en antijcke doorluchtighe Kleederen, Apollodorus heeft de eerste geweest die de schoonheyt heeft weten uyt te vinden, en heeft sijn Conterfeytsels met een vriendelijcke aenghenaemheyt verçiert, wech nemende de oude ghebruyckelijcke stuere onaerdicheyt, die de oude, als noch teer inde Konst sijnde, onderworpen waren.

 

Angel, Philips, Lof der Schilderkonst(publi: 1642, redac: 1641), 1, p. 10-12 (n)

Doch, wie hier van den eerste Vinder is gheweest, en is op heden ons noch niet recht bekent: Niet-te min sullen wy even wel daer so veel toe segghen als wy uyt de Oude hebben konnen by een raepen tot de naeste ghewisheyt. Plinius lib. 7. cap. 56. meynt dat het eene Gyges sy geweest, het welcke met de Vrbijnse Shrijver Polidoor in sijn 2. bouck op't 24. cap. over een komt. Desen Gyges is geboren in het Lantschap Lijdien, maer wanneer, en ten wat tijden, en heb' ick nerghens konnen nasporen: maer even wel kanmen daer so veel door afmeten, dat onse Konst daer so vrouch in swangh gaende, eenige voornemen Geesten ghebaert heeft, en van de selve sommighe vrouch in Italien over geset, gelijckmen sulcx uyt d'oude Schrijvers uyt vinden kan: onder allen Lion Baptista Alberit, die maeckt daer gewach van seggende: Dat de Lydiers de selve daer gebracht hebben, wanneer den Koninck Tyrrhenus van Lydien het sevende Rijck van Italien verwonnen en ingenomen hadde. Doch aen wie desen Gyges sijn Konst gheleert en overgeset heeft, en weetmen niet; sijn eerste navolgher die ons voorghestelt wert, is eenen Griecksen Phyrrhus, by sommige Euchier geheeten. Desen, seght Aristoteles, den eerste Schilder in Griecken geweest te hebben, het welcke strijt met 'tgevoelen van Theophrastus (na 'tgetuygen Plini) welcke meynt, dat het eene Polygnotus van Athenen geweest soude sijn.

Maer merckt hier eens de archlistighe eergiericheyt der Atheniers, dewelcke dese Eer-kroon der AEgyptenaren gaeren tot hun trecken souden, en haer die lof toe-eygenen dat sy voor de eerste Vinders van dese Konst gheacht soude worden, het welck hier uyt te waerschijnelicker is, om dat sy gemeenelick haer eygen Natie daer in vorderlijck waren, voornementlijck wanneer yemant tot een rouwe, en noch onbesneden Konste, yet aenghenaems of çierlijcx toe deed', die sy dan als voor de eerste Vinder hielden. Op die maniere gaet het hier met Polygnotus toe, om dat hy het Graveeren met gloeyende yseren op Yvoor en Lorchen-boomen-hout gevonden heeft, wert daerom van haer voor de eerste Schilder gehouden. Niet te min, so wert Gyges meest by alle gheleerde onder-souckers onser Konst voor de eerste Schilder ghehouden, hem toe passende den onverwelckte Lauweren-kroon, als vinder van de selve. Doch om de kortheyt te beneerstigen, so sullen wy Gyges als eerste Schilder hier mede voorstellen, en besien eens hoe onse Konst van hant tot hant allencxkens gevordert is geworden.

 

Ridolfi, Carlo, Le meraviglie dell’arte, overo le vite de gl’illustri pittori veneti, e dello stato(publi: 1648), p. 4-5 (italien)

Note marginale :
  • [2] Plinio libr. 35. Hist. cap. 3.
Marque-page :
  • [1] Gige Lidio primo pittore. Plinio lib. 7

Convengono nondimeno per lo più gli scrittori, che la pittura si traesse dall’ombra dell’huomo, [1] e che Gige Lidio Egittio fosse il primiero, che con stilo, o carbone dintornando l’estremo dell’ombra humana formasse alcune rozze figure ; e che da indi in poi gli huomini, assotigliando l’ingegno, dividessero le parti sue, aggiungendovi le ombre, il lumi, et i colori. Tra’ primi delineatori furono Filocle Egittio, Cleante, Ardice Corintio, e Telefane Sicionio. [2]

 

Vossius, Gerardus Joannes, De quatuor artibus popularibus, de philologia et scientiis mathematicis, cui operi subjungitur chronologia mathematicorum, libri tres, cap. V, De Graphice(publi: 1650), "De Graphice", §5 (numéro cap. V) , p. 64 (latin)

Si Graecos audimus, origo picturae fuit ex lineis membra hominis circumductis. Postea et intus lineas sparsere. Hinc deuentum ad picturam, μονοχρόματον, sive quae singulis fiat coloribus. Post et umbras invenere, ac lumen, aliaque. Plinius lib. XXXV. cap. iii : De picturae initiis incerta, nec instituti operis quaestio est. Aegyptii sex millibus annorum apud ipsos inventam, priusquam in Graeciam transiret, adfirmant, vana praedicatione, ut palam est. Graeci autem alii Sicyone, alii apud Corinthios, omnes umbra hominis lineis circumducta. Itaque talem primam fuisse : secundam singulis coloribus, et monochromaton dictam, postquam operosior inventa erat, duratque talis etiam nunc. Inventam linearem a Philocle Aegyptio, vel Cleanthe Corinthio. Primi exercuere Ardices Corinthius, et Telephanes Sicyonius, sine ullo etiamnum colore, jam tamen spargentes lineas intus. Ideo et quos pingerent adscribere institutum. Primus invenit eas colore testa, ut ferunt, trita Cleophantus Corinthius. Hunc, aut eodem nomine alium fuisse, quem tradit Cornelius Nepos, secutum in Italiam Damaratum, Tarquinii Prisci Romani Regis patrem, fugientem a Corintho injurias Cypselli tyranni, mox docebimus. Jam enim absoluta erat pictura, etiam in Italia. Quod antiquis Italiae picturis postea demonstrat.

 

Desmarets de Saint-Sorlin, Jean, Les Délices de l’esprit, dialogues dediez aux beaux esprits du monde(publi: 1658) (t. II, livre I), p. 21-25 (fran)

Je vous diray en peu de mots l’origine de ce bel art de la peinture. Perdix neveu de Dédale servoit à conduire tous les ouvrages ; un jour Apollon le trouva qui traçoit un dessin contre un mur ; et pource qu’il avoit le soleil à son dos, l’ombre de son corps paraissoit attachée contre le mur. Mon fils l’ayant quelque temps considerée, pria Perdix de demeurer en la mesme posture ; et cependant avec un charbon il traça contre le mur toutes les extrémitez de l’ombre, et forma une figure avec la mesme action que Perdix avoit en faisant son ouvrage. Depuis ce temps-là il se plût à tracer à l’ombre du Soleil plusieurs autres postures, avec les diverses situations des testes, et les différentes actions des mains. Mais pource que l’ombre ne marquoit que les extrémités, et ne pouvoit faire voir ny les yeux, ny la bouche, ny quelques autres parties, il suplea à ce défaut, en regardant la personne mesme, et en imitant ces parties, qu’il remplissoit sur la figure qu’il avoit tracée. Alors il trouva que cette imitation de la personne, étoit un moyen plus assuré et plus juste pour representer au naturel; pource que l’ombre faisoit ordinairement les figures plus grosses ou plus longues qu’elles n’estoient. Ainsi il se plaisoit à imiter diverses personnes ; et Perdix qui taschoit à le suivre en toutes ces sortes d’arts, s’exerçoit aussi bien souvent à tracer des figures : mais ils trouvoient tous deux que cette imitation de la Nature, n’estoit pas si parfaite, que celle par le moyen de la sculpture, qui representoit le relief. Toutefois Apollon ne voulant pas laisser cet art imparfaict, considéra que les choses ne paroissent relevées que par le moyen des jours et des ombres, et qu’en representant ces jours et ces ombres, le relief pourroit estre representé. Ainsi peu à peu il donna de la force à ses figures par les ombres ; mais elles estoient encore bien imparfaites, pource qu’ils ne representoient rien qu’avec du charbon ou de la pierre noire ; et il eust bien voulu representer la couleur aussi bien que l’action. Enfin dans ses voyages il trouva en diverses mines de metaux, du vermillon, de l’azur, du blanc, du vert, et plusieurs autres couleurs, qu’il destrempa avec de l’huile ; et par le meslange qu’il fit des unes avec les autres, il en composa une diversité infinie, par le moyen desquelles il faict maintenant representer toutes choses avec tant de justesse, qu’il semble que ce soit la nature même. Il fit alors assembler de grandes tables, qu’il appella tableaux, pour y faire ses peintures, afin de les pouvoir placer aux lieux qu’il luy plairoit ; et c’est ainsi qu’il a fait faire par ses ouvriers ces belles representations que vous voyez dans ces quadres.

 

[Félibien, André], De l’origine de la peinture et des plus excellens peintres de l’Antiquité(publi: 1660), p. 21-22 (fran)

Oüy, luy repliquay-je, mais les Grecs qui n’ont jamais manqué de s’attribuer autant qu’ils ont pû la gloire des Sciences et des Arts, escrivent aussi que ce fut à Sicyone ou à Corinthe, que la Peinture commença de paroistre. Mais pour vous dire vray les uns et les autres s’accordent si peu touchant celuy qui en fut l’inventeur, que l’on ne sçauroit qu’en croire : seulement ils conviennent tous que le premier qui s’avisa de désigner, fist son coup d’essai contre une muraille en traçant l’ombre d’un homme que la lumière faisoit paroistre. Mais nous ignorons le nom de celuy qui reduisit cette invention en pratique, et en fist un Art qui est depuis devenu si noble et si excellent. Les uns veulent que ç’ait esté un Philocles d’Egypte ; les autres un certain Cleante de Corinthe, et d’autres qu’Ardice Corinthien et Thelephanes de Chiarenia au Peloponese, ayent commencé à désigner sans couleurs et avec du charbon seulement.

 

Scheffer, Johannes, Graphice, id est, de arte pingendi liber singularis, cum indice necessario(publi: 1669), "Linearis pictura prima est ac antiquissima, sitque lineis comprehendentibus exteriorem pingedæ rei ambitum, intusque pro umbræ ratione sparsis" (numéro §20) , p. 65-67 (latin)

Non solent exemplaria ædificiorum aliter, quam pictura lineari, confici, unde et Philander eo loco : Graphis, linearis deformatio, sive designatio. Plinius eodem sensu usurpavit, ubi de Parrhasio lib. XXXV c. 10 : Multa graphidis vestigia extant in tabulis ac membranis ejus. Non possunt alia vestigia intelligi, quam quæ dixi, alioquin artis ipsius non vestigia in tabulis extassent, sed ars ipsa. Γραφικὴν significatione specialiori nominavit Athenagoras, ut ex verbis ejus statim adferendis apparebit. Ipsa lineis umbræ hominis aut alterius rei circumdatis, primum cœpit. Verba Plinii prædicto loco hæc sunt : Græci tradunt, picturam repertam, umbræ hominis circumducta. Itaque tale primam fuisse. Idem fere tradit Athenagoras in legat. pro Christ. Autoremque ejus Saurium quendam nominat. Vmbratilis pictura, inquit, inventa a Saurio, equi in sole umbram circumscribente. Quam umbratilem picturam appellavi, sciagraphiam ipse vocat, quæ vox occasione primæ inventionis excogitata, hodieque adumbrationem notat in pictoriis operibus, estque velut initium aut exordium reliquorum, uti loco alio monstrabimus. Et a lineari, de qua hoc in loco agimus, distincta est, quia rudior et inornatior. Interim linearis quoque prima vetustissimaque alia non fuit, sicut et Quintilianus testatur. Qui aperte ait, lineas extremas tantum in ea pingi consuevisse : Si, dicit, prioribus adjicere nefas fuisset, non esset pictura, nisi quæ lineas modo extremas umbræ, quam corpora in sole fecissent, circumscribit.

 

Pline (Gaius Plinius Secundus); Gronovius, Johann Friedrich (Johannes Federicus), C. Plinii Secundi Naturalis historiae, Tomus Primus- Tertius. Cum Commentariis & adnotationibus Hermolai Barbari, Pintiani, Rhenani, Gelenii, Dalechampii, Scaligeri. Salmasii, Is. Vossii, & Variorum. Accedunt praeterea variae Lectiones ex MSS. compluribus ad oram Paginarum accurate indicatae(publi: 1669) (vol. 3), p. 556-557 (latin)

[1]Graeci autem alii Sicyone, alii aput Corinthios repertam, omnes umbra hominis lineis circumducta. Itaque talem primam fuisse : secundam singulis coloribus, et [2]monochromaton dictam, postquam operosior inventa erat : duratque talis etiam nunc. Inuentam liniarem a Philocle Aegyptio, vel [3]Cleanthe Corinthio. Primi exercuere Aridices Corinthius et Telephanes Sicyonius, sine ullo etiamnum hi colore, iam tamen spargentes linias intus. Ideo et quos pinxere adscribere institutum. [4]Primus inlevit eas colore testae (ut ferunt) trita, Cleophantus Corinthius.

Note de bas de page de l'auteur :
  • [1] Græci autem alii Sicyone, alii apud Corinthios repertam]. Lege : Græci autem alli Sicyone, alii apud Corinthios repertam summis umbra hominis lineis circumducta, etc. Hic videmus linearum picturam eam dici, quæ ad hominem exprimendum, non solam ejus umbram lineis circumscribit et determinat, quod primi picturæ inventores faciebant, sed quæ intus etiam lineas spargens, lineamenta corporea effingit. Salmas. pag. 5 b.
  • [2] Monochromaton.] Μονόγραμμον alii vocant, ab unica et eadem semper linearum specie, quo modo Epicuros lib. 2 de nat. deorum, monogrammos deos vocat, eosdem semper, qui nec ira mutentur, nec lætitia : quamvis tenues et decolores apud Lucilium Nonus exponat hoc versu :

    Vix vivo homini ac monogrammo. Dalec.

  • [3] Cleanthe Corinthio.] Strabo lib. 8 in Alphæonia Dianæ templo Cleanthis et Aregontis picturæ visuntur, hominum Corinthium. Alterius quidem Trojæ excidium, et Minervæ ortus : alterius Dianæ in cunis deportatio, opera plurimum laudata. Idem.
  • [4] [4] Primus inuenit eas colorare, etc.] Nimirum simplicissimus color conveniebat rudimentis artis ; quandoquidem absolutissimi etiam artifices, Apelles et ejus ætatis alii, non nisi quatuor coloribus pinxisse leguntur. Gelen.
 

Félibien, André, Noms des peintres les plus célèbres et les plus connus anciens et modernes(publi: 1679), p. 1 (fran)

L’art de peindre est si ancien, qu’il est difficile de bien savoir qui en est l’inventeur. Les uns veulent que Philoclès d’Egypte ait été le premier qui l’a mis en pratique ; d’autres en donnent la gloire à Cléante de Corinthe ; d’autres à Ardice aussi de Corinthe, et à Thelephanès de Chiarenia au Péloponnèse.

 

Pline l’Ancien; Hardouin, Jean, Caii Plinii Secundi Naturalis historiae libri XXXVII. Interpretatione et notis illustravit Joannes Harduinus,... in usum Serenissimi Delphini(publi: 1685), p. 177-178 (latin)

De picturae initiis incerta, nec instituti operis quaestio est. Aegyptii sex milibus annorum aput ipsos inventam, priusquam in Graeciam transiret, affirmant, vana praedicatione, ut palam est.[1] Graeci autem alii Sicyone, alii aput Corinthios repertam,[2] omnes umbra hominis lineis circumducta. Itaque talem primam fuisse : secundam singulis coloribus,[3] et monochromaton dictam, postquam operosior inventa erat : duratque talis etiam nunc. Inventam linearem dicunt a Philocle Aegyptio,[4] vel Cleanthe Corinthio. Primi exercuere Ardices Corinthius, et Telephanes Sicyonius, sine ullo etiamnum hi colore, jam tamen[5] spargentes lineas intus. Ideo et quos pinxere, adscribere institutum. Primus invenit eas colorare,[6] testae (ut ferunt) trita, Cleophantus Corinthius.

Note de bas de page de l'auteur :
  • [1] Graeci… Sicyone. Idem Plinius inferius, sect. 40. num. 24 de pictore Pausia : Sicyone et hic vitam egit : diuque fuit illa patria picturae.
  • [2] Omnes umbra. Omnes initia picturae in hoc posita fuisse aïunt, ut umbra hominis, aut alterius similiter rei, lineis tantummodo describeretur sine ullo colore. Idem fere tradit Athenagoras in legat. Pro christ. auctoremque ejus picturae Sauriam quemdam nominat, pag. 16. Καὶ σκιαγραφίας μὲν εὑρεθείσης ὑπὸ Σαυρίου ἵππον ἐν ἡλίῳ περιγράψαντος. Vmbratilem enim picturam, equi umbra in sole circumscripta saurias invenit. Vetustissimam hanc picturam linearem σκιαγραφίαν vocat, quo nomine hodie designamus adumbrationem primam in picturae operibus, quae veluti initium est, exordiumque reliquorum. Primis tantum lineis, ut ait Quintilianus, lib. 4 cap. 2 pag. 517 illa constabat : atque, ut idem alibi, lineas modo extremas umbrae, quam corpora in sole fecissent, circumscribebat. Solebat hoc genus picturae monogrammum vocari, quod una simplicique linea constabat. Nonius, cap. I. num. 168. Monogrammi dicti sunt homines acie pertenues ac decolores : tractum a pictura, quae prius quam coloribus corporatur, umbra fingitur. Ad eam allusit picturam Cicero, lib. 2. de Nat. Deor. cum Monogrammos Deos vocat.
  • [3] Secundam singulis. Alterum hoc genus picturae, coloratum scilicet, sed colore unico, qui tabulae toti aequaliter inducitur.
  • [4] Et monochromatonΜονοχρόματον vel μονόχρομον, ab uno colore. Picturam hanc monochromaton Quintilianus appellat simplicem colorem, lib. 12. cap. 10. p. 893. Clari pictores fuisse dicuntur Polygnotus : atque Aglaophon, quorum simplex color tam sui studiosos adhuc hahuc habet, etc. Monochromata Dalecampius cum monogrammis, quae fuere coloris expertia, male confundit.
  • [5] Vel Cleanthe. Alter hic a Cleanthe Corinthio, cujus picturas laudat Strabo, lib. 8. pag. 343.
  • [6] Spargentes lineas. Altera haec linearis pictura est, rudiore illa perfectior, quae primo loco explicata est : Nam illa lineis tantum fiebat comprehendentibus exteriorem pingendae rei ambitum : haec plurimas addebat alias intus pro umbrae ratione sparsas. Nominatur haec alias etiam graphis, Graeca imitatione. Vitruvius, lib. I. cap. I. ubi loquitur de architecto : Debere ait graphidos scientiam habere, quo facilius exemplaribus pictis, quam velit operis speciem, deformare valeat. Neque enim solent exemplaria aedificiorum aliter, quam pictura lineari confici. Hoc vero inventum picturae linearis Cratoni Athenagoras attribuit, loco ante cit.
 

Aglionby, William,, Painting Illustrated in Three Diallogues, Containing Choice Observations upon the Art(publi: 1685), Dialogue II, p. 36 (anglais)

Most of the great philosophers of Græce travelled to Ægypt for their learning, witness Thales, Pythagoras, Democritus, Plato, and many others; and it is likely that the artists might do the same: but however the place where painting first settled, was Corinth, or Sicyone; there being some dispute about those two towns, because there happened to be eminent masters at them both much about the same time, to wit, Cleanthes at Corinth, and Telephanes at Sicyone; but the art in both theses places was but in its infancy; those painters contenting themselves with drawing the outlines of one colour, and shaddowing them within: some time after, Cleophantus of Corinth invented variety of colouring; and that same master came into Italy with Demaratus, the father of Tarquinius Priscus, king of the Romans.

 

Catherinot, Nicolas, Traité de la peinture(publi: 1687), p. 2 (fran)

Les bergers ont esté non seulement les premiers rois, les premiers astronomes, mais aussi les premiers peintres. Car dans leur loisir ils desseignoient avec leur houlette les ombres de leurs brebis. D’autres attribuent l’invention de cêt art aux Égyptiens, et la perfection aux Grecs. Alexandre a le premier honoré la peinture. Dans la suite on a employé les planches de bois pour les peindre, mais d’une seule couleur, blanche, noire, ou autre.

 

Junius, Franciscus, De pictura veterum(publi: 1694) (I, 3, 1), p. 13 (latin)

Marque-page :
  • [1] Artes primitus nascentes imperfectionres esse solent

[1] Prima certe pictura nihil aliud fuit, quam umbra hominis lineis circumducta, teste Plin. Lib. XXXV, cap. 3. Athenagoras quoque Legatione pro Christianis meminit, σκιαγραφίας εὐρεθείσης ὑπὸ ἵππον ἐν ἡλίῳ περιγράφαντος· γραφικῆς δὲ ὑπὸ Κράτωνος, ἐν πίνακι λελευκωμένῳ σκιὰς ἀνδρὸς καὶ γυναικὸς ἐναλείψαντος : Vmbratilis picturae inventae a Saurio equum in sole umbra circumscribentis. Graphicae vero a Cratone in tabula dealbata viri et mulieris umbras delineantis. Respexit ad rudia haec artis primordia Quintilianus in eo loco quem mox plenius adducemus, Si prioribus, inquit, adjicere nefas fuisset, non esset picture, nisi quae lineas modo extremas umbrae, quam corpora in sole fecisset, circumscribit. Exinde semper ab hac prima consuetudine adumbrandi vox obtinuit. Quis pictor omnia, inquit Quint. VII, 10, quae in rerum natura sunt, adumbrare didicit ?

 1 sous-texte

Junius, Franciscus, De pictura veterum, p. 208 (fran)(traduction récente d'un autre auteur)

Il est certain que la première peinture ne fut rien d’autre que « l’ombre d’un homme relevée avec des traits », selon le témoignage de Pline, livre XXXV, chap. 3. Athénagoras évoque également, dans son Ambassade pour les chrétiens, « la peinture faite en relevant des ombres inventée par Saurios qui traça les contours d’un cheval placé au soleil et l’art du dessin inenté par Craton qui dessina les ombres d’une femme et d’un homme sur une tablette blanchie. Quintilien s’est penché sur ces débuts grossiers de l’art dans ce passage que nous citerons bientôt plus longuement : « S’il avait, dit-il, été interdit d’ajouter à nos devanciers, il n’y aurait de peinture que celle qui trace les contours d’une ombre projetée par des corps placés au soleil ». Depuis, le verbe adumbrare (relever l’ombre d’un corps, reproduire) qui vient de cette première pratique a persisté. « Quel peintre, demande Quintilien, a appris à relever l’ombre (adumbrare) de tous les corps qui se trouvent dans la nature » ?

Commentaires : Trad. Nativel, 1996, p. 208

 

Dupuy du Grez, Bernard, Traité sur la peinture(publi: 1699), p. 50 (fran)

Les uns soutenoient qu’elle[Explication : la peinture.] avoit commencé à Sicionne, les autres à Corinte ; quelques-uns en attribuoient l’invention à un Égyptien qui avait pour nom Philoclès ; et enfin d’autres soutenoient que c’étoit un bourgeois de Corinte, apellé Cleante, qui en fit la première tentative, par le moyen du contour de l’ombre d’un homme, qu’il traça sur une muraille. Nous avons pourtant reconnu depuis par la découverte de l’Amerique, que cette invention n’a pas été particulière aux Egyptiens ou aux Grecs, puisque les Ameriquains savoient faire des idoles et des figures de toute sorte d’animaux, lorsque Cristofle Colomb y fit sa premiere navigation. Mais pour revenir à ce que Pline en a écrit : il dit qu’Ardices de Corinte, et Telephanes de Sicionne, furent les premiers qui exercerent cet art. Il est vrai qu’on ne sauroit déterminer en quel siècle ils ont vêcu.

 

Palomino, Antonio, El museo pictórico y escala óptica(publi: 1715:1724), “Del origen de la pintura y sus primeros inventores”, §4 (numéro Tomo I, Teórica della pintura, I, 2) , vol. 1, p. 99 (espagnol)

Pero como quiera que sea, omitiendo estas opiniones, todos concuerdan en el modo con que fué hallada, que fué circunscribiendo, o delineando la sombra de una figura ; que siempre las cosas grandes comienzan de principes humildes : nada fué juntamente inventado, y perfecto. ¿ Qué arte hay, que desde luego fuese arte ? ¿ Qué cosa no la cultiva el tiempo ? Así les llama Quintiliano : Rudos principios de la que había de ser arte.  

 

Palomino, Antonio, El museo pictórico y escala óptica(publi: 1715:1724), “En el derecho canónico”, §7 (numéro Tomo I, Teórica della pintura, II, 2) , vol. 1, p. 240 (espagnol)

Además, que el dibujo, desde el primer siglo de la Pintura en Grecia, se llamó pintura linear, por componserse sólo de las líneas, o contornos, que circunscriben la figura; y después se llamó monocromata, por componerse de un color solo; pero ya actuada de claro y obscuro; en que fueron célebres en la primera de líneas, Filocles Egipcio, y Cleantes Corintio; y en la segunda, ya manchada, pero de un solo color, Cleofanto Corintio: luego el dibujo no es más que pintura de un color solo: luego aun en el sentir de los opuestos, por legítima consecuencia es permitido el pintar en día de fiesta; y consiguientemente es arte liberal.

 

Durand, David, Histoire de la peinture ancienne, extraite de l’Histoire naturelle de Pline, liv. XXXV, avec le texte latin, corrigé sur les mss. de Vossius et sur la Ie ed. de Venise, et éclairci par des remarques nouvelles(publi: 1725), p. 11 (fran)

Pour en venir maintenant à l’histoire de la peinture, il faut savoir d’abord, que nous n’avons rien que de fort incertain sur son origine. Il est vrai que les Égyptiens se vantent de l’avoir inventée, plus de six mille ans avant qu’elle passât en Grèce. Mais chacun sçait, que ce n’est pas la seule prévention de ces peuples, où le mensonge et la vanité sautent aux yeux. À l’égard des Grecs, ils se partagent sur cet article. Les uns donnent la gloire de cette invention à Sicyone[1], et les autres à Corinthe : mais ils conviennent tous que les commencemens en furent fort simples ; qu’elle ne consista d’abord, qu’en une ombre grossière, terminée, ou plutôt circonscrite par une seule ligne, justement comme l’ombre même de nos corps, à l’opposite de la clarté ; et qu’ainsi la première et la plus ancienne maniere de peindre n’alla pas plus loin. Ils ajoutent que la seconde ne fut proprement que cette ombre même, formée d’une seule couleur, qu’on nomma, dans la suite, monochromate, ou couleur-unique, lorsque la peinture eut fait plus de progrès ; comme on la pratique encore dans les desseins, ou dans certains ouvrages de blanc et de noir, dont nous aurons lieu de parler. À l’égard du simple-trait, il fut inventé, à ce qu’on prétend, par un nommé Philocles, Égyptien, ou par un certain Cleanthe de Corinthe ; mais ni l’un, ni l’autre, n’ont jamais fait profession de dessein, ni de peinture. Ce fut un autre Corinthien, nommé Ardices, ou un Sicyonien, nommé Telephane, qui commencerent à l’exercer ; à la vérité encore sans couleur, mais en ajoutant, au premier trait, ces lignes et ces distinctions intérieures, qui forment les membres et les drapperies

Notes au texte latin, p. 168 :

(Z) Primi exercuere Ardices Corinthius et Telephanes Sicyonius. Les autres avoient dessiné par amusement ; mais ceux-ci en ont fait un art et l’ont exercé. Sine ullo etiamnum hi colore. Ce hi est de l’éd. de Venise, et y vient fort bien : Ardices et Téléphane firent profession de cet art naissant ; mais ils n’usoient point encore de couleur : c’est à dire, de couleur gaye, comme, du minium, du cinabre, de la rubrique, qu’on employa dans la suite : jam tamen spargentes lineas intus ; cependant ils n’en demeurerent pas à cette simple circonscription des objects, ils y ajouterent des traits, des lignes, des contours intérieurs, qui perfectionnerent le dessein. C’est ce que les Grecs et les Latins, après eux, ont apelé Graphis, ou Graphice. Notre Pline dans la vie de Parrhase : Graphidis uestigia exstant in tabulis et membranis ejus, ex quibus proficere dicuntur artifices : et dans celle de Pamphile : huius auctoritate effectum est Sicyone primum, deinde et in tota Graecia, ut pueri ingenui omnia ante graphicen, hoc est, picturam, in buxo docerentur. Aristote recommande la même chose, et la raison qu’il en donne est singulière ; c’est afin qu’étant devenus grands, non seulement ils ne soient pas trompez dans l’achat ou dans la vente de ces sortes de choses, mais principalement afin qu’ils se forment le goût, et qu’ils deviennent connoisseurs en fait de beautez : De Rep. Lib. 8 c. 3. Vitruve veut aussi que l’architecte possède l’art du dessein, Graphidos scientiam habere, quo facilius, exemplaribus pictis, quam uelit operis faciem deformare ualeat Vitruv. Lib. 1, c. 1. Il paroît par un passage de Philostrate que les Anciens avoient porté cet art jusqu’à une grande perfection : on peut fort bien appeler peinture, dit-il, ce qui n’est composé que de simples lignes, sans couleur, et où l’ombre et la lumière, c’est-à-dire le blanc et le noir, artistement mênagez, nous y font trouver, avec la ressemblance et la beauté, les sentiments et les passions de l’ame, comme on les voit dans les meilleurs tableaux. On y voit le sang, les cheveux, la barbe, le cotton qui ne fait que commencer à poindre ; on y remarque toutes les differences des teints et des tempéramens ; on y distingue un homme blanc, d’avec un brun ; un blond d’avec un noireau ; un homme à cheveux gris d’avec un chatain. On va même jusqu’à exprimer avec de la craye blanche, ou du crayon rouge, un indien, un more, qui paroîtra tel, au premier coup d’œil. Son nez camard, ses cheveux crépez, ses jouës pleines, ses levres grosses, ses yeux ouverts, et je ne sçai quel aspect d’étonnement, qui y domine, feront juger d’abord, que c’est un Noir qu’on a voulu faire ; C’est ainsi à peu près que raisonne l’historien d’Apollonius de Tyane, Liv. II ch. 7.

Note de bas de page de l'auteur :
  • [1] Au couchant de Corinthe, dans le Péloponnèse.
 

Rollin, Charles, Histoire ancienne, tome XI, livre XXIII(publi: 1730:1738), « De la peinture » (numéro livre XXIII, ch. 5) , p. 119 (fran)

Note marginale :
  • [1] Plin. l. 35. cap. 3

Il en est de la peinture comme des autres arts, c’est-à-dire qu’elle a eu des commencemens très grossiers et très imparfaits [1] L’ombre d’un homme marquée et circonscripte par des lignes y a donné naissance, aussi bien qu’à la sculpture. La première maniére de peindre tira donc son origine de l’ombre, et ne consista qu’en quelques traits, qui se multipliant peu à peu formérent le dessin. On ajouta ensuite la couleur.

 

Batteux, Charles, Les Beaux-Arts réduits à un même principe(publi: 1746), p. 124 (fran)

Ce fut alors, à proprement parler, que les arts sortirent de la nature. Jusque-là tous leurs éléments y avaient été confondus et dispersés comme dans une sorte de chaos. On ne les avait guère connus que par soupçon, ou même par une sorte d’instinct. On commença alors à en démêler quelques ébauches. C’était beaucoup : il n’était pas aisé de trouver ce dont on n’avait pas une idée certaine, même en le cherchant. Qui aurait cru que l’ombre d’un corps, environné d’un simple trait, pût devenir un tableau d’Apelle, que quelques accents inarticulés puissent donner naissance à la musique telle que nous la connaissons aujourd’hui ? Le trajet est immense.

 

Watelet, Claude-Henri, Sur la poésie dans l’art de la peinture, Conférence lue à l’Académie royale de peinture et de sculpture le 8 juin 1748(redac: 1748/06/08), p. 129 (fran)

Il me paraît simple d’en inférer que les premiers inventeurs de la peinture, frappés des beautés de la nature, se sont livrés à ce qu’elle leur inspirait. La première suite de leur admiration a dû être d’imiter ce qui les charmait ; ils en ont cherché les moyens et, sans entrer dans les détails de ceux qui les premiers ont pu s’offrir à eux, sans nous arrêter à découvrir si l’ombre et si le cristal des eaux ont été leurs premiers guides, il est vraisemblable que l’image des corps a été le premier but qu’ils ont atteint.

 

Caylus, Anne-Claude Philippe de Tubières, comte de, « Réflexions sur quelques chapitres du XXXVe livre de Pline » (publi: 1759, redac: 1752:1753) (t. XIX), p. 252 (fran)

Note marginale :
  • [1] l. XXXV, chap. 3
  • [2] Liv. II de la nat. de. dieux

Selon Pline, l’ombre que porte sur une surface qui lui est opposée un corps placé entre cette surface et la lumière qui le frappe de ses rayons, a fourni la première idée du dessein. Quelqu’un, ou plus intelligent ou plus oisif, s’étant arrêté à considérer l’ombre qui se peignoit ainsi sur une surface unie, s’avisa de contourner cette ombre, en traçant sur cette même surface une ligne qui la renfermoit, et qui en décrivoit exactement le contour extérieur : et lorsque l’ombre eut disparu, le simple trait qui conservoit la forme de l’ombre, montra quelque ressemblance avec l’objet qui avoit produit l’ombre. Une tête d’homme, vûe de profil et ainsi figurée, ne pouvoit en effet manquer d’être reconnoissable.

Pline renferme tout cela en deux paroles : après avoir dit que les Égyptiens et les Grecs se disputoient l’honneur d’avoir inventé la peinture, il ajoûte que, quant à la forme de l’invention, l’on en convenoit unanimement, omnes umbrae hominis lineis circumductae ; suivons le même auteur dans son récit. Ce que le hasard avoit fait naître fut bientôt réduit en art. Avant qu’on se fût servi d’aucune couleur, deux artistes, Téléphane de Sicyone et Ardicès de Corinthe, avoient déjà commencé à perfectionner le dessein. On a vû que dans son origine il étoit tout à fait informe : il ne consistoit que dans la circonscription des contours extérieurs des objets ; les deux nouveaux artistes, toûjours à l’aide du seul trait, et sans sortir encore de ce qu’on nomme proprement dessein, tentèrent d’exprimer les parties que le contour extérieur renfermoit, telles, par exemple, que les yeux, la bouche, le nez, etc. dans un visage vû de face. C’est ce qu’il faut entendre par ces paroles de Pline du même passage, iam spargentes lineas intus : et en effet de même que les formes extérieures se dessinoient par le moyen du trait, il falloit, pour ainsi dire, répandre d’autres traits dans l’espace que ces contours extérieurs renfermoient, pour rendre sensibles les parties qui y étoient contenues.

Par là le dessein prit une forme régulière, et dès lors on commença à pouvoir discerner, et à reconnoître les traits des personnes que l’artiste avoit eu intention de représenter. C’est ainsi que j’expliquerois ce passage de Pline : ideo et quos pingerent (Ardices et Telephanes) adscribere institutum. Remarquons qu’il emploie le mot quos qui a rapport aux personnes, et que par conséquent il s’agit ici de portrait et non de représentation indistincte d’autres objets : autrement il se serait servi du mot quae qui est plus général. Cette remarque est nécessaire pour montrer que mon explication est préférable à celle que Jean-Baptiste Adriani et depuis lui le sieur Durant ont donnée du même passage de Pline. Le premier, dans sa lettre italienne écrite à George Vasari, le traduit ainsi : E percio che essendo le figure d’un color solo, non bene si conosceva di cui elle fossero imagini, hebbero per costume di scrivervi a pié, chi essi havevano voluti rassembrare. Le second, dans l’histoire de la peinture ancienne, l’explique de cette manière : les figures dans les commencemens étoient assez peu ressemblantes, pour avoir besoin d’écrire au bas du tableau les noms des objets qu’on avoit voulu représenter. Je ne rapporte point ce que dit à ce sujet le P. Hardouin, dans la crainte d’alonger un Mémoire déjà trop long, et je fais grâce de du Pinet.

Voilà deux explications bien opposées à la mienne. L’Adriani prétend que ce qui empêchoit les figures des deux artistes dont il est ici question, d’être ressemblantes, c’est que ces artistes n’y avoient employé qu’une seule couleur : les deux interprètes se réunissent pour trouver dans le manque de ressemblance, la raison qui déterminoit à écrire des noms au bas des tableaux. Mais ces deux explications sont aussi mauvaises l’une que l’autre ; et, si je ne me trompe, on ne peut pas donner aux paroles de Pline un autre sens que celui que je viens de proposer : sans cela Pline me paroîtroit inconséquent. Il fait un mérite aux deux Grecs d’avoir perfectionné l’art ; de l’avoir soûmis à des règles (exercuere) dans un temps où le secours de la couleur, si propre à rapprocher de la vérité la représentation des objets, leur manquoit absolument, sine ullo colore. Comment donc avoient-ils opéré ? De quels moyens s’étoient-ils servis pour hâter les progrès de leur art ? iam spargentes lineas intus : c’étoit en perfectionnant les formes ; c’étoit en améliorant le dessein, en ajoûtant de nouveaux traits à ceux que l’ombre avoit enseignés par hasard ; en un mot, en figurant par des contours les parties intérieures que l’ombre ne dessine point. Voilà ce qui les rendit singuliers, et ce qui commença à faire reconnoître les personnages qu’ils avoient entrepris de représenter ; car, encore une fois, c’étoient des portraits qu’ils faisoient, et le premier dessein qui donna l’idée de l’art, fut lui-même, comme tout le monde le fait, fait pour un portrait, et ideo quos pingerent adscribere institutum. Quoi, parce qu’ils avoient mieux fait que ceux qui les avoient précédés ; parce que la peinture, dans l’état où ils l’avoient mise, approchoit davantage de l’imitation de la nature, il en avoit résulté la nécessité d’écrire au bas de leurs tableaux ce qu’ils y auroient voulu représenter ; sans quoi on ne les eût pas reconnus, tant la ressemblance étoit peu exacte ? Ce raisonnement ne convient point à Pline ; il me paroît absurde, et c’est mal à propos qu’on le lui prête.

De l’invention du dessein il passe à l’origine du coloris ; cette seconde opération succéda à la première. Cléophante de Corinthe se servit le premier de terre pulvérisée et broyée très-fin : on dit qu’il broya des tests ou des morceaux de pots de terre, testa (ut ferunt) trita, et qu’il en composa une couleur.

La peinture prenait insensiblement des accroissemens, et se chargeant de détails, postquam operosior inventa erat, s’acheminoit à la représentation fidèle de la nature. Cependant elle ne consistoit encore que dans l’emploi d’une seule couleur pour chaque tableau, singulis coloribus : et quoique cette espèce de peinture ne fût pas entièrement dans les règles de la parfaite imitation, elle ne fut pas moins goûtée : elle a même passé à la postérité. Pline remarque qu’on la pratiquoit de son temps : elle étoit connue sous le nom de monochromaton, qui la désigne [1] : aujourd’hui elle est encore en usage ; c’est l’espèce de peinture que nous nommons camayeu. Il ne faut pas la confondre avec l’espèce de travail que les anciens appeloient monogramma, ainsi que l’ont fait quelques commentateurs de Pline. Par ce dernier mot il faut entendre de simples esquisses, des desseins où il n’y a que le trait, que nous appelons nous-mêmes aujourd’hui des traits ; et c’est dans ce sens que Cicéron disait que les dieux d’Épicure, comparés à ceux de Zénon, n’étoient que des dieux monogrammes et sans action ; ce n’étoient, pour ainsi dire, que des ébauches de divinités. Il est étonnant que M. l’abbé d’Olivet, qui montre tant de sagacité et de justesse dans l’interprétation des auteurs anciens, se soit contenté de rendre ces paroles de Cicéron, Monogrammos Deos et nihil agentes (Epicurus) commentus est [2] par celles-ci, Épicure les fait monogrammes et oisifs. On pourroit lui faire remarquer que ce n’est point là traduire en françois ; que ce n’est pas non plus entrer dans la pensée de l’auteur, que j’ajoûter dans une note, que le mot monogramme doit être pris pour une figure d’un seul trait ; qu’il falloit dire une figure au simple trait. La définition de Lambin, fondée sur celle que Nonius Marcellus avoit déjà donnée, est plus conforme à la pratique de l’art. Monogramme, dit-il, est un ouvrage de peinture qui ne fait que de naître sous la main de l’artiste ; où l’on ne voit même que de simples traits, et où l’on n’a pas encore appliqué la couleur ; quod solis lineis informatum et descriptum est, nullis dum coloribus adhibitis. On ne reprochera pas au savant académicien d’ignorer sa langue, ni celle qu’il traduit ; mais il faut aussi qu’il avoue que les règles et la pratique du dessein ne lui sont pas assez familières, et il ne doit point en rougir : combien d’autres, pour avoir manqué de ces connoissances particulières, sont tombés dans de pareilles fautes ? M. Rollin lui-même en est un exemple. En parlant des arts cultivés par les différens peuples de l’Antiquité, dont il a fait l’histoire, il a commis une infinité de méprises. Je ne veux point les relever : non que je craignisse de faire le moindre tort à la réputation de ce savant confrère, dont j’honore le goût avec tous les gens de lettres ; mais il avoue lui-même qu’il a emprunté tout ce qu’il dit en cet endroit d’autres écrivains, et en particulier du sieur Durand, que j’ai déjà critiqué, et que je critiquerai encore dans la suite de cet examen. Ce seroit une sorte d’injustice d’imputer à M. Rollin des erreurs qui ne sont point de lui : on ne peut lui reprocher que d’avoir pris avec trop peu de précaution des guides qui l’ont égaré.

 

Caylus, Anne-Claude Philippe de Tubières, comte de, « Réflexions sur quelques chapitres du XXXVe livre de Pline » (publi: 1759, redac: 1752:1753), p. 158-161 (fran)

Note marginale :
  • [1] chap. V
  • [2] Chap. IX
  • [3] Chap. VII

il me paroît naturel d’examiner ce qu’il faut entendre par les Monochromata, ou les Peintures d’une seule couleur, avant que de rapporter des exemples plus composés.

Cet article me paroît devoir être divisé en trois parties, pour être bien entendu. Pline en parle autant de fois dans son recueil, mais sans les distinguer. La différence des temps a dû cependant en apporter dans leur espèce. Je vais les rapprocher pour les faire mieux sentir, et les mettre à la fois sous les yeux.

Il dit donc que le trait ayant été la première opération, la seconde fut nommée monochromaton, qu’elle n’employoit qu’une seule couleur : secundam singulis coloribus et monochromaton dictam. Ce premier genre ne peut jamais être pris à la lettre, celui-ci même, qu’il regarde comme l’enfance de l’art ; c’est-à-dire qu’il n’y aura jamais eu une seule couleur, et qu’il y en aura toûjours eu deux, celle du profil ou de l’objet, tel (sic) qu’il soit, et celle de son fond. Quoique cette dernière ne soit point donnée, elle servira toûjours pour distinguer et détacher celle du peintre, autrement celle-ci ne se distingueroit pas, et ne seroit qu’un enduit : il faut donc se renfermer à dire qu’une couleur de chair générale, placée sur un fond, formoit ces premiers profils ; encore cela ne sera jamais véritablement exact. Car les peintures des sauvages, et de tous les peuples de l’Amérique, dont Pline nous rappelle précisément l’idée, en parlant de ces premiers temps, ont toûjours indiqué le blanc des yeux et le noir des sourcils ; ce qui est d’autant plus vrai, que ces objets sont les plus frappans et les plus détachés par les couleurs naturelles. La complaisance pour Pline ne peut aller, ce me semble, jusqu’à comparer les Grecs depuis la guerre de Troie aux Sauvages de l’Amérique, et c’est cependant, à peu de chose près, ce qu’il faut faire ; car en le suivant exactement, cette première peinture n’a été qu’une teinte générale, approchante de la carnation. On aura peine à se persuader qu’elle ait jamais été en Grèce jusqu’à ce point d’ignorance. Il est vraisemblable que les Égyptiens leur ont communiqué ce qu’ils en savoient, ainsi que des autres arts. Mais en supposant cette ignorance, elle ne peut avoir été d’une longue durée dans un pays policé, où cet art une fois trouvé, a été exercé par ceux que la Nature déterminoit à l’imitation.

On pourra m’objecter que, selon Hérodote, la communication des Grecs avec les Égyptiens n’a été considérable que depuis que Psamméticus fut monté sur le trône d’Égypte, environ six cens soixante-dix ans avant J.-C. ; et que cette première peinture ayant commencé en Grèce, on pourroit en accorder l’invention aux Grecs. Mais outre qu’avant la guerre de Troie, les Égyptiens avoient déjà communiqué aux Grecs quelques-unes de leurs connoissances, celle-là ne paroît pas être arrivée en Grèce d’une façon assez brillante et assez approfondie, pour n’avoir pas pû être apportée par le récit du voyageur le moins éclairé, ou du marchand le plus grossier.

La seconde manière dont il faut entendre les monochromata dont Pline fait mention, mérite plus de considération. Il fait une récapitulation [1] des artistes dont il a parlé, et dit : quibus coloribus singulis pinxissent… qui monochromatea genera picturae uocauerint. Il n’est guère possible qu’un genre si misérable ait été pratiqué par plusieurs peintres de suite, surtout dans un temps où la sculpture étoit aussi avancée. Il faut donc regarder ces derniers peintres comme ayant connu et pratiqué le clair-obscur, dont la sculpture elle-même leur donnoit une idée véritable. Il n’est pas nécessaire de définir ces clairs-obscurs, tels que nous les pratiquons aujourd’hui à l’huile, en détrempe ou au crayon, pour lesquels on emploie plus ordinairement le blanc et le noir, et auxquels on donne quelquefois le nom de camayeu. Il me suffit qu’on les imagine plus avancés que les premiers, et tels qu’une succession d’artistes a dû les produire dans un pays, qui tout au moins étoit éclairé sur d’autres articles. Mais supposé qu’on ne veuille pas être persuadé des différences que la pratique a dû nécessairement apporter dans ces monochromata, on conviendra bien que Zeuxis ne les a pas traités comme ces derniers. Cependant Pline se contente de dire, à la fin de ce qu’il rapporte de Zeuxis [2], Pinxit et monochromata ex albo. Cet éloge est assurément le plus grand que l’on puisse donner à un peintre, du côté de l’harmonie et de l’intelligence de la couleur ; car il faut être bien maître de cette partie, c’est-à-dire bien entendre la ruption des couleurs, pour tirer à l’effet, et ce qu’on appelle faire jouer ses figures par l’opposition du blanc sur le blanc.

On voit que les différences de ces monochromata sont considérables ; Pline les ayant confondues, sans rapporter de distinction, il m’a paru que je devois les expliquer.

Si l’on n’avoit pas d’aussi fortes convictions du sentiment de Pline sur la peinture, surtout par la bonté du choix qu’il a sû faire dans les extraits qu’il a rapportés, on pourroit lui reprocher d’avoir établi le principal mérite de la peinture sur l’espèce, la variété, l’éclat et l’abondance des couleurs ; car l’admiration et l’étonnement que lui causes les ouvrages d’Apelle, d’Échion, de Mélanthius, et de Nicomachus, semblent tomber sur ce qu’ils étoient faits avec quatre couleurs. Quatuor coloribus solis immortalia illa opera fecere, ex albis Melino, ex silaceis Attico, ex rubris sinopide Pontica, ex nigris attramento… cum tabulae eorum singulae opiidorum vaenirent opibus. [3]

Cet étonnement me paroît ne lui pas suffire ; il en témoigne un autre : il croit qu’avec un plus grand nombre de couleurs, et de plus belles encore, que l’on apportoit de toutes parts à Rome, les Romains avoient plus de tort de ne pas faire des choses aussi recommandables que celles qu’il vient de citer. Quel qu’ait été le sentiment de Pline sur ce fait, le mérite de la peinture n’a jamais consisté dans l’abondance et la richesse des couleurs. En effet une seule couleur, dont je viens de donner l’idée dans le monochromata de Zeuxis, suffira à un habile homme pour exprimer toutes les actions et tous les objets, et pour faire concevoir toutes les idées qu’il peut avoir. La multiplicité des couleurs est une facilité pour l’imitation, ainsi que pour une plus grande vérité ; et quoiqu’il faille convenir qu’elle est une difficulté de plus pour l’harmonie, la beauté et le mérite de l’exécution, elle n’est cependant pas l’essence de la peinture : sa partie principale consiste dans le dessein qui exprime l’action, dans la pensée qui conduit la main, enfin dans le génie si bien exprimé par la fable de Prométhée. Les desseins des grands maîtres, qui ne sont point coloriés, sont une preuve de ces vérités. Il est donc aisé de sentir ce qu’il étoit possible à de grands artistes de faire avec quatre couleurs, dont la combinaison subdivisée en demi-teintes, quart de teintes, huitièmes de teintes, etc. s’étend à l’infini.

Commentaires : mettre dans une fiche sur les monochromata?

 

Lacombe, Jacques, Dictionnaire portatif des beaux-arts ou abrégé de ce qui concerne l’architecture, la sculpture, la peinture, la gravure, la poésie et la musique(publi: 1752), art. « Peinture », p. 479 (fran)

La peinture eut, comme les autres arts, des commencemens très-grossiers et très-imparfaits. Il est naturel de penser que l’ombre qui retrace les objets en donna l’idée ; d’abord on se contenta de dessiner les principaux traits d’une figure ; on y ajoûta ensuite la couleur qui d’abord étoit unique dans chaque dessein.

 

La Nauze, abbé de, Mémoire sur la manière dont Pline a parlé de la peinture(publi: 1759, redac: 1753/03/20), p. 260 (fran)

Note marginale :
  • [4] Plin. Hist. Nat. VII, 56

La question, dit-il, qui roule sur les commencemens de la peinture, n’offre que des incertitudes […]. Mais ce ne sont encore que nouvelles incertitudes sur l’origine de la peinture parmi les Grecs : incertitude pour le lieu[1], les uns vouloient qu’elle eût commencé à Sicyone, les autres chez les Corinthiens : incertitude pour le nom des inventeurs, on nommoit ou Philoclès d’Égypte, ou Cléanthe de Corinthe : incertitude sur l’opération primitive qu’ils employèrent, et qui servit de préparation à la véritable découverte de l’art. On disoit, à la vérité, que ce début fut le contour d’une figure humaine, tracé autour de l’ombre d’un corps opaque[2], et Pline assure que tout le monde en convenoit ; mais quand on n’a rien à dire de mieux circonstancié sur un fait de cette nature, qui se perd dans l’obscurité des temps, c’est faire entendre qu’il est fondé sur des conjectures et des raisonnemens, plustôt que sur des témoignages authentiques et bien avérés. On ne pouvoit pourtant mieux faire, dans l’histoire obscure de l’origine d’un art, que de partir d’un point comme celui-là, et nous en partirons aussi avec Pline. Mais encore un coup ce serait aller au-delà de ses intentions, que d’y voir plus qu’une hypothèse vraisemblable et accréditée, après la déclaration qu’il a faite que les commencemens de la peinture sont incertains.

À la délinéation du simple contour, qu’il appelle une peinture linéaire, succéda une autre peinture linéaire plus parfaite[3], qui distingua par le dessein, et sans aucune couleur, les traits du visage renfermés dans l’intérieur du contour. Elle eut pour inventeurs Ardicès de Corinthe, et Téléphane de Sicyone ; et comme Aristote nommoit Euchir, parent de Dédale, pour le premier auteur de la peinture dans la Grèce [4], on pourroit peut-être soupçonner que l’habile artiste, désigné par le nom appellatif Euchir, a été le même qu’Ardicès ou que Téléphane, et qu’il aura vécu, ainsi que Dédale son parent, environ un siècle avant la guerre de Troie. Quoi qu’il en soit, ces deux auteurs des portraits dessinés furent, selon Pline, les premiers qui exercèrent l’art de représenter la figure sur une surface égale et unie. En effet, la première méthode, celle du contour extérieur, ne marquant pas les traits du visage et ne rendant point la personne reconnoissable, n’avoit donc point représenté la figure. Ils furent aussi les premiers, ajoûte Pline, qui écrivirent sur leur ouvrage le nom de la personne représentée. La précaution auroit été fort inutile dans la première méthode, qui ne représentant point la figure, n’auroit excité, par l’addition du nom, la curiosité ni de la postérité, ni des étrangers, ni de personne.

Note de bas de page de l'auteur :
  • [1] Graeci autem alii Sicyone, alii apud Corinthios repertam…. Inventam linearem dicunt a Philocle Ægyptio vel Cleanthe Corinthio.
  • [2] Omnes, umbra hominis lineis circumducta.
  • [3] Primi exercuere Ardices Corinthius et Telephanes Sicyonius, sine ullo etiamnum colore, jam tamen spargentes lineas intus.
 

La Nauze, abbé de, Mémoire sur la manière dont Pline a parlé de la peinture(publi: 1759, redac: 1753/03/20) (t. XXV), p. 235 (fran)

Le dessein est le fondement et la base de la peinture, et c’est aussi par là qu’elle a commencé : ceux qui les premiers exercèrent l’art, firent des portraits[1] simplement dessinés ; et Pline, qui nous instruit de cet usage des premiers temps, remarque, dans un petit fait des temps postérieurs, le talent singulier d’Apelle pour ce genre de peinture linéaire : l’artiste arrive dans Alexandrie, et parle à un inconnu dont on lui demande ensuite le nom ; il prend un charbon, et dessine dans l’instant sur le mur la figure de la personne, que tout le monde reconnut.

Note de bas de page de l'auteur :
  • [1] Primi exercuere Ardices Corinthius, et Telephanes Sicyonius, sine ullo etiamnum colore, iam tamen spargentes lineas intus.
 

La Nauze, abbé de, Mémoire sur la manière dont Pline a parlé de la peinture(publi: 1759, redac: 1753/03/20), p. 264 (fran)

On avoit donc connu jusqu’alors dans la Grèce la seule peinture linéaire, et non la peinture coloriée[1]. Après qu’on eut inventé cette dernière, plus recherchée que l’autre dans ses opérations, elle fut appelée peinture monochrome, parce qu’on y employa d’abord qu’une seule couleur dans chaque ouvrage, à moins que nous ne donnions le nom de seconde couleur à celle du fond sur lequel on travailloit. L’auteur de cette méthode, l’inventeur de la peinture proprement dite, fut Cléophante de Corinthe[2] ; il débuta par colorier les traits du visage avec de la terre cuite et broyée ; ainsi la couleur rouge, comme la plus approchante de la carnation, fut la première en usage. Les autres peintres monochromes, et peut-être Cléophante lui-même, varièrent de temps en temps dans le choix de la couleur des figures, différente de la couleur du fond. Peut-être aussi qu’ils mirent quelquefois la même couleur pour le fond et pour les figures, on peut le présumer par l’exemple de quelques-uns de nos camayeux, pourvû qu’on n’admette point dans les leurs l’usage du clair-obscur, dont la découverte accompagna l’introduction de la peinture polychrome, ou de la pluralité des couleurs, comme nous le dirons plus bas.

Note de bas de page de l'auteur :
  • [1] Itaque talem primam fuisse, secundam singulis coloribus, et monochromaton dictam, postquam operosior inuenta est.
  • [2] Primus inuenit eas colorare, testa ut ferunt trita, Cleophantus Corinthius.
 

Caylus, Anne-Claude Philippe de Tubières, comte de, « De la peinture ancienne » (redac: 1753/11/10), p. 239-240 (fran)

Selon Pline, l’ombre qu’un corps éclairé porte sur une surface opposée a fourni la première idée du dessein. Quelqu’un, ou plus intelligent ou plus vif, s’étant arrêté à considérer l’ombre qui se peignait ainsi sur une surface unie, s’avisa de la contourner en traçant sur cette même surface une ligne qui la renfermait et qui en décrivait exactement le contour extérieur ; et lorsque l’ombre eut disparu, le simple trait qui conservait la forme de l’ombre donna quelque idée de l’objet qui l’avait produit.

Il est constant que le profil d’une tête étant plus apparent et plus distinct, on doit croire qu’il fut le premier pratiqué.

 

Pernety, Antoine-Joseph, Dictionnaire portatif de peinture, sculpture et gravure avec un traité pratique des différentes manières de peindre dont la théorie est développée dans les articles qui en sont susceptibles. Ouvrage utile aux artistes, aux élèves et aux amateurs par Dom Antoine-Joseph Pernety(publi: 1756), p. VIII (fran)

Ce serait faire peu d’honneur à cet art admirable, que d’attribuer sa découverte à un pur effet du hasard, comme l’ont avancé quelques anciens auteurs. Quelques bergers, dit-on, traçant avec leurs houlettes des traits sur la terre, un d’eux s’avisa de suivre en traçant les extrémités de l’ombre que ses moutons y formaient. Pline dit, qu’une jeune fille traça sur le mur l’ombre de son amant, pour en conserver en quelque manière la présence ; et Philostrate, dans la vie d’Apollonius, ajoute à ce sujet, que les premiers peintres travaillant à remplir ce vide par des traits, apprirent peu à peu à y ménager les jours et les ombres avec une seule couleur, et celle du fond. Quoi qu’il en soit, il est à croire que la nature ayant fait les premiers portraits, elle fit aussi les premiers peintres. Elle inspira aux hommes le dessein de l’imiter, et peut-être que quelques circonstances singulières ont contribué à faire réussir leurs recherches. C’est tout ce qu’on peut accorder au hasard dans l’honneur de cette invention.

 

Jaucourt, Louis de, Encyclopédie, art. « Peinture », tome XII(publi: 1765), p. 268 (fran)

Après m’être étendu sur les charmes de la Peinture, je voudrois pouvoir découvrir l’origine de cet art, en marquer les progrès et les révolutions ; mais tous les écrits où les anciens avoient traité cette partie historique sont perdus ; nous n’avons pour nous consoler de cette perte que les ouvrages de Pline, qu’il faut lire en entier, et dont par conséquent nous n’entreprendrons point de faire ici l’extrait. C’est assez de remarquer avec lui, que la recherche qui concerne les commencemens de la peinture, n’offre que des incertitudes. Les Egyptiens, dit-il, assurent que l’art a pris naissance chez eux six mille ans avant que de passer dans la Grece, ostentation manifestement frivole. Il ne conteste point à l’Egypte d’avoir possédé les peintres les plus anciens ; il reconnoissoit même le Lydien Gigès pour le premier inventeur de la peinture égyptienne, soit qu’il n’en restât plus de son tems aucun monument, soit que les ouvrages y méritassent peu d’attention, parce que la politique des Egyptiens avoit toujours entretenu la peinture, selon Platon, dans le même état de médiocrité, sans aucune altération et sans aucun progrès ; mais les Grecs la porterent au plus haut point de grandeur et de perfection. De la Grece elle passa chez les Romains, sans y produire cependant des artistes du premier ordre. Elle s’éteignit avec l’empire, et ne reparut dignement en Europe, que sous le siecle de Jules II. et de Léon X.

 

Jaucourt, Louis de, Encyclopédie, art. « Peinture des Grecs », tome XII(publi: 1765), p. 270 (fran)

On disoit à la vérité que ce début fut le contour d’une figure humaine, tracée autour de l’ombre d’un corps opaque ; mais quand on n’a rien à dire de mieux circonstancié sur un fait de cette nature, qui se perd dans l’obscurité des tems, c’est se fonder sur des conjectures plûtôt que sur des témoignages authentiques. On ne pouvoit pourtant mieux faire dans l’histoire inconnue de l’origine d’un art, que de partir d’une hypothèse assez vraissemblable, ou du-moins accréditée.

 

Falconet, Etienne, Traduction des XXXIV, XXXV et XXXVI livres de Pline l’Ancien, avec des notes(publi: 1772) (t. I), p. 123 (fran)

Les commencemens de la peinture sont incertains, et c’est une discussion étrangère à l’objet de cet ouvrage. Les Égyptiens assurent qu’elle fut inventée chez eux, six mille ans avant qu’elle eut passé en Grèce ; mais il est évident que c’est une vaine jactance[1]. Les Grecs disent, les uns qu’elle fut inventée à Sicyone, les autres chez les Corinthiens ; mais tous conviennent que ses commencemens furent d’enfermer dans une ligne l’ombre d’un homme. Voilà quel a été son premier état : son second après qu’elle fut devenuë plus difficile a été de peindre chaque tableau d’une seule couleur ; et on la nomma monochromaton : cette manière de peindre subsiste encore. On dit que la peinture lineaire fut inventée par Philoclès, Égyptien, ou par Cléanthes, Corinthien (2) ; les premiers qui l’exercèrent furent Ardices de Corinthe et Téléphane de Sicyone, sans se servir encore d’aucune couleur ; mais pourtant ils répandoient déjà quelques traits en dedans.

Notes, t. I, p. 197 : (2) Il dit ailleurs, l. 7, c. 56, que ce fut Gygès qui inventa la peinture en Egypte ; Giges Lidus picturam in Aegypto instituit. Est-il croïable que la peinture, ayant été exercée en Égypte fort longtems avant qu’elle le fut en Grèce, elle n’y parvint cependant que dans l’état informe du silhouete, du patron, du simple contour tracé autour d’une ombre, après tant d’années d’invention ? Est-il croïable qu’alors, Ardicès et Téléphane, peintres grecs, n’en fussent encore qu’à marquer quelques traits dans l’intérieur du contour ? On aura plus sujet d’être surpris si, comme le dit Aristote, Euchir parent de Dédale est le premier auteur de la peinture en Grèce : il vivoit plus d’un siècle avant la guerre de Troye. Mais voici de quoi surprendre un peu davantage. Diodore nous aprend, l. I. s. 2, qu’il y avoit des statues colossales en Égypte au tems d’Osymandias ; c’est-à-dire plus de deux mille ans avant Pline, et près de mille ans avant la guerre de Troye. Je demande, s’il est vraisemblable que la sculpture colossale ait existé pendant mille ans et plus, dans un pays, sans qu’on se soit avisé d’y faire de la peinture ; car notez bien qu’on n’a pas dû commencer la sculpture par les colosses. Que la peinture et la sculpture des Égyptiens ayent été plus ou moins foibles, c’est de quoi il ne s’agit pas. Que cette date de mille années soit plus ou moins précise, en un mot, que le quicquid graecia mendax audet in historia de Juvénal soit plus ou moins aplicable à Diodore et à la chronologie de son tems, c’est ce que nous ne sommes pas obligés de savoir précisement ici. Il ne nous faut qu’une présomption, même un peu vague, que la peinture existoit avant le siège de Troie ; et nous l’avons si forte, qu’elle équivaut à une preuve. Ainsi, quels que furent les premiers inventeurs de l’un et de l’autre art, soit chez les Égyptiens, soit chez les Grecs, soit ailleurs ; il est prouvé de reste que Pline se contredit, qu’il consulte légèrement ses auteurs, et qu’il confond plus souvent les objets qu’il ne les distingue. Quand il lisoit et copioit un auteur, il ne se rappeloit pas toujours ce qu’il avait lu dans un autre, et les extraits alloient comme ils pouvoient.

Note de bas de page de l'auteur :
  • [1] Platon étoit loin de regarder la très haute antiquité de la peinture chez les Égyptiens, comme une fable : voici ce qu’il dit. Si l’on veut y prendre garde, on trouvera chez eux des ouvrages de peinture ou sculpture, faits depuis dix mille ans (quand je dis dix mille ans, ce n’est pas pour ainsi dire, mais à la lettre), qui ne sont ni plus ni moins beaux que ceux d’aujourd’hui, et ont été travaillés sur les mêmes règles. Plat. De legib. l.2. Ces règles étoient sévèrement préscrites par les loix du pays qui défendoient aux peintres et aux sculpteurs de rien innover dans l’art, et d’imaginer de nouveaux sujets ou de nouvelles attitudes ; en un mot, de s’écarter en rien de ce qu’elles avoient statué : ainsi Platon étoit fondé à dire qu’il n’y avoit ni diminution ni augmentation dans le progrès. Mais ce morceau est curieux en ce qu’il nous apprend aussi qu’il y avoit de la peinture plus de 9000 ans avant le siège de Troie, contre l’avis de Pline, qui va nous dire dans un instant, qu’il ne paroît pas que l’art existât avant cet époque. Retranchez raisonnablement tout ce qu’il vous plaira de la date de Platon, il restera encore assez pour prouver l’existence de la peinture avant la guerre de Troie.

    Peut-être cette inertie des Égyptiens dans les arts, et qui étoit si propre à en arrêter les progrès, avoit-elle une raison politique ; et, en ce cas, nous ne devons pas la blâmer. Mais je pense qu’en nous réstreignant aux seules vuës de l’art, nous n’irons pas jusqu’à dire avec M. le Comte de Caylus, jamais les Égyptiens ne se sont écartés des à plombs. Tous les peuples sages ont été fort éloignés d’un pareil défaut. Recueil d’antiquité Ier vol. p. 49. Certainement les statuaires égyptiens alloient droit devant eux ; on le voit dans leurs statues, et si bien statues, qu’elles n’ont en général ni mouvement, ni action, ni expression. À la vérité elles sont toutes d’à plomb ; mais tous les peuples sages ou non, qui se sont mêlés de peinture et de sculpture, ont fait leurs figures d’à plomb, sans la raideur égyptienne, quand le sujet ne réquieroit pas une action plus décidée. M. de Caylus ayant fait sa remarque à l’occasion d’une assez mauvaise tête de singe, et le singe n’inspirant pas volontiers le ton sérieux, nous supprimons le commentaire.

 

Falconet, Etienne, Traduction des XXXIV, XXXV et XXXVI livres de Pline l’Ancien, avec des notes(publi: 1772) (t. I), p. 148 (fran)

Ce fut ce dernier[Explication : Cimon.] qui inventa les têtes de profil (15), et qui varia les visages de ses figures, les faisant regarder ou de côté, ou en haut, ou en bas.

Notes, p. 234-235 : (15) Si le lecteur n’étoit déjà fait aux disparates de Pline, il pourroit s’étonner de celle-ci. Après avoir nommé Hygiémon, Dinias, Charmade, Eumarus, tous prédécesseurs de Cimon, il dit que Cimon inventa de peindre les têtes de profil, obliquas imagines. La peinture la plus informe, la plus grossière, a dû commencer par un trait de profil : Pline lui-même en raporte l’histoire dans la fille du potier Dibutade, qui fit le Silhouete de son amant. Mais personne ne croira que quatre peintres dont les noms méritoient de passer à la postérité n’aient pas été au-delà du profil ; parce que cela n’est ni dans l’ordre des choses, ni dans celui des progrès successifs de l’art, ni par conséquent croyable. En suposant que les Grecs n’aient pas pris l’art chez les Égyptiens ou chez les Etrusques, on croira sans peine que le premier esclave, le premier berger, auront été les inventeurs du profil en en traçant un grossièrement sur un mur, ou sur le sable ; usage qui s’est perpétué jusqu’aujourd’hui, et qui a produit l’art mesquin des Silhouetes. Il est donc contre toute vraisemblance, que Cimon, successeur de quatre peintres, dont le dernier avoit déjà fait faire des progrès à la peinture, en fut encore à inventer le profil. Il faut prouver aprésent, que c’est bien ce mot que Pline a dit quand il a écrit, hic Cimon Catagrapha inuenit, hoc est obliquas imagines, et qu’il n’a point entendu que ce fussent des têtes en racourci.

Chacun sait que feu M. le comte de Caylus avoit beaucoup de mérite, et particulièrement beaucoup de ces connoissances qui font un antiquaire recommandable ; mais chacun ne sait pas qu’il n’entendoit pas toujours Pline, dont cependant il a souvent parlé, et qu’il a souvent cité. Voici une de ses méprises sur cet auteur. Comme elle est adoptée par Mr. le chevalier de Jaucourt dans le 14e tome de l’Encyclopédie, page 258, il y a deux raisons de la rélever. Il faut entendre, dit-il, par le mot grec Catagrapha, et en latin obliquas imagines, non des visages ou des figures de profil, comme le père Hardouin le croit ; mais des têtes en racourci. Mr. de Jaucourt surprendra d’autant plus ses lecteurs instruits, que sachant très bien le grec, il sait que καταγραφη signifie perscriptio, conscriptio, delineatio ; et qu’en français, en apliquant ces mots aux arts du dessein, il veulent dire un trait, un contour, un profil. Mais suposez qu’on n’entendit pas le sens primitif de ce mot grec ; il ne sera question que de savoir comment l’entendoit Pline, et comment il l’a traduit. Catagrapha, dit-il, signifie, obliquas imagines ; et M. de Jaucourt sait bien que le mot latin obliquus, veut dire, de côté, en travers, transversal, et conséquemment de profil. Comment donc un si habile littérateur a-t-il pu se déterminer à dire aux contemporains et à la postérité, qu’obliquas imagines ne signifie pas des visages ou des figures de profil ? S’il fut seulement convenu, qu’obliquas peut signifier ce qui est renversé dans un sens contraire à sa position naturelle, aussi bien qu’il peut signifier un profil, on n’auroit eu rien à dire, sinon, que le mot καταγραφη ne peut jamais être entendu de quelque chose de renversé ou de racourci, et que l’intention de Pline a été de traduire ce mot dans son véritable sens. M. de Caylus, tom. 19. Mém. de l’Académ., importuné par ce mot grec, le passe à pieds joints, et dit : mais sans m’embarrasser de l’expression grecque, Catagrapha, qui se trouve, à ce que l’on m’a dit, diférement écrite dans les diférents manuscrits, il est à croire que, etc. Voilà qui ne sent point du tout le pédantisme. Cependant il sembleroit que, sans craindre d’en encourir le blâme, il faudroit, sinon s’embarrasser, au moins s’ocuper un peu du mot qui aide à trouver le sens d’une pensée, et qui même le détermine. Mais continuons à tâcher de rendre cette observation sans réplique.

Il faut pour bien entendre un auteur, 1° le lire tout entier, 2° observer le sens qu’il donne aux mots dont il se sert, 3° expliquer un passage par un autre où le même mot est nécessairement emploïé dans le même sens ; c’est la méthode analogique. Voïons donc dans un autre endroit de Pline ce qu’il entend ici par obliquas imagines. Apelles, dit-il (l. 35 c. 10 n°14), fit un portrait d’Antigonus qui étoit borgne, et imagina le premier la manière de cacher les défauts d’un côté du visage, en le faisant de profil ; afin que ce qui manquoit au visage parut plutôt manquer à la peinture, et il ne montra que le côté qu’il pouvoit montrer tout entier. Pinxit et Antigoni regis imaginem altero lumine orbam, primus excogitata ratione vitia condendi : obliquam namque fecit, ut quod corpori deerat, picturae potius deesse videretur : tantumque eam partem e facie ostendit, quam totam poterat ostendere. Voïons à présent le mot dont Pline se sert pour signifier un racourci : ce mot fournit si clairement le moïen d’entendre le passage mal interprété, qu’il n’est pas concevable comment d’habiles gens ont bien voulu s’y méprendre. Pline dit, l. 35 c. 11 sect. 11 n°24, Quand Pausias vouloit faire voir la longueur d’un bœuf, il ne le peignoit pas en flanc, mais en racourci, et savoit cependant faire paroître sa longueur. Cum longitudinem bouis ostendere vellet, adversum eum pinxit, non transuersum : et abunde intelligitur amplitudo. Adversus étant l’oposé de transuersus, il signifie bien et duement ce que les peintres et les sculpteurs apellent un racourci.

Pour fortifier encore cette preuve, observons que Pline, après avoir dit que Cimon inventa les têtes de profil, ajoute : et il varia les visages de ces figures, les faisant regarder ou de côté, ou en haut, ou en bas, respicientes, suspicientesque, et despicientes. Voilà trois diférens racourcis ajoutés au profil et que Pline en distingue fort clairement ; ce qu’il n’eût pas fait si le mot obliquus signifioit racourci, ou ç’eût été un bien pauvre écrivain, parce qu’il auroit dit, Cimon peignit les têtes en racourci, et il les peignit aussi en racourci. Être vu de profil et regarder de côté, n’est pas la même chose : l’un dépend du spectateur qui est censé placé de manière qu’il voie la personne de profil, quoiqu’elle regarde droit devant elle ; l’autre dépend d’un mouvement du col, qui fait que la personne réprésentée ayant le corps sur un plan, tourne et incline la tête sur un autre plan. Ainsi le Père Hardouin a eu raison de croire que Pline dit, que Cimon inventa les têtes de profil. M. le Comte de Caylus auroit dû entendre Pline comme le P. H. l’a entendu. M. Le chevalier de Jaucourt a juré ici, comme ailleurs, un peu trop légèrement in verba magistri ; et Pline a eu tort de dire que Cimon inventa les profils. J’avouë que cette discussion grammaticale est un peu longue pour n’être faite que sur trois mots ; j’avouë encore que n’étant point littérateur, je n’ai pas su la faire plus courte. Si d’ailleurs on la trouvoit déplacée de la part d’un artiste, on trouveroit sans doute aussi un peu singulier qu’un fort habile littérateur ait donné lieu à l’artiste de la faire.

 

Watelet, Claude-Henri ; Levesque, Pierre-Charles, article « Peinture chez les Grecs »,  Encyclopédie méthodique. Beaux-Arts(publi: 1788:1791), p. 639 (fran)

Hélène travailloit à une tapisserie sur laquelle elle représentoit les nombreux combats dont elle avoit été cause. Voilà donc dès le temps du siége de Troye, ou au moins dès le temps d’Homère, de la peinture d’histoire. On a lieu de penser que les couleurs en étoient variées ; mais quand ces tapisseries eussent été en camayeu, c’étoit toujours de la peinture.

Elle n’étoit, il est vrai, qu’en couleurs sèches ; mais Hélène ne faisoit pas de la tapisserie, sans que le dessin n’en fût tracé sur le canevas ; voilà donc la peinture telle qu’elle fut au moins dans son origine ; c’est-à-dire simplement linéaire. Mais si sa tapisserie devoit être variée de couleur, elle avoit apparemment sous les yeux un dessin colorié qui lui servoit de modèle, soit qu’elle l’eût fait elle-même, soit qu’il lui eût été fourni par quelqu’artiste ; voilà donc la peinture ayant déjà fait quelques progrès ; la voilà employant différentes couleurs au pinceau, et telle à peu-près qu’elle est encore aujourd’hui dans l’Orient.

Dans l’Iliade, lorsqu’Andromaque apprend la mort de son époux, elle est occupée à représenter en tapisserie des fleurs de diverses couleurs. Il devient donc certain que du temps d’Homère, la peinture n’étoit plus réduite au simple trait, ni même au camayeu, mais qu’elle employoit des couleurs différentes ; et il nous est permis de croire que l’ouvrage d’Hélène étoit un tableau d’histoire en tapisserie, dont les couleurs étoient variées.

L’existance (sic) de la peinture coloriée dès le temps d’Homère peut donc être posée comme un fait historique. C’est donc long-temps avant Homère qu’il faut placer les inventeurs de la peinture linéaire, Cléantes et Ardicès de Corinthe, et Téléphane de Sicyone : c’est même encore avant ce poète qu’il faut placer Cléophante de Corinthe, qui imagina de broyer des tessons de verre, pour colorier ses figures.

 

Émeric-David, Toussaint Bernard, Discours historique sur la peinture ancienne(publi: 1803), p. 2 (fran)

Les auteurs qui ont traité de l’origine de la peinture ont la plupart commis une faute essentielle ; ils n’ont pas assez distingué, dans cet art, les deux parties qui le constituent, savoir, le dessin et le coloris : l’un est l’ame de la peinture, et l’autre peut être regardé comme son corps. En séparant ainsi ces deux parties, ils auraient facilement jugé que l’art du dessin, qui consiste à tracer avec des lignes la forme de tous les objets visibles dans la nature, a dû précéder nécessairement de beaucoup l’art de remplir avec des couleurs l’espace intérieur déterminé par ces lignes, et par conséquent qu’on a dû dessiner long-temps avant de peindre. Aussi lisons-nous dans tous les historiens qui ont parlé de l’origine de la peinture le récit de certains faits diversement imaginés, mais qui viennent tous à l’appui de cette assertion : les uns disent qu’une bergère, pour conserver le portrait de son amant, conduisait avec la houlette une ligne sur l’ombre que le visage du jeune homme faisait sur le sable ; d’autres, que ce fut un certain Saurius qui traça sur la terre l’ombre de son cheval ; un plus grand nombre nous a transmis l’histoire de Coré, fille de Dibutade, qui dessina sur un mur le portrait de son amant, en suivant la ligne que faisait l’ombre de son visage, produite par la lueur d’une lampe : ceux-ci attribuent les principes du dessin à Craton, lequel arrêta sur une table blanche les ombres d’un homme et d’une femme ; ceux-là à Philoclès d’Égypte ; d’autres à Cléanthès de Corinthe ; d’autres à Ardice ou à Téléphane, qui commencèrent à dessiner sans couleurs, et avec du charbon seulement. Quelle que soit la version que l’on adopte, il est certain que le tracé des contours a été la première opération de la peinture ; mais l’homme, naturellement imitateur, chercha bientôt les moyens de perfectionner l’imitation qu’il voulait faire des objets qu’il avait sous les yeux.

 

Opie, John, Lecture I. On Design(publi: 1809, redac: 1806), p. 240-241 (anglais)

Painting, we are told, consisted, in its infancy, of mere outlines, and probably for a long time very little exceeded what we now see scrawled in a nursery by children who have never been taught to draw: the next step of the art was to monogram, or the addition of some parts within the contour; from thence it advanced to the monochrom, or paintings of one colour; and to this quickly succeeded the polychrome, or the application of various colours […]

 

Reinach, Adolph (éd.), Textes grecs et latins sur la peinture ancienne. Recueil Milliet(publi: 1985, redac: 1921) (Papyrus du IIe siècle (Reinach, 82))(grecque)

Col. VI, 14 : Σήμων Ἀθηναῖος· οὗτος 

εὗρε πρῶτος γραμμ[ήν,

τὸν τύ]πον (?) ἵππου ἐν λευκῶι

πίνα]κ[ι ἀ]λ[είψας τὴν 

σκιὰν· ] Ζεῦξις ὁ Ἡρακ-

λέω]της τὰ με. το…

Commentaires :

 1 sous-texte

Reinach, Adolph (éd.), Textes grecs et latins sur la peinture ancienne. Recueil Milliet, (fran)(traduction récente d'un autre auteur)

Sémon d’Athènes : il a le premier inventé le dessin, en noircissant le contour de l’ombre d’un cheval projeté sur un fond blanc.