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Type de textesource
TitreLa Manière de bien penser dans les ouvrages d’esprit
AuteursBouhours, Dominique
Date de rédaction
Date de publication originale1687
Titre traduit
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Editeur moderne
Date de reprint

, p. 155

Mais n’avez-vous point remarqué, ajoûta-t-il, que les idées tristes, telle qu’est l’idée de la mort, n’empesche pas qu’une pensée ne plaise beaucoup ? Comme les tempestes, les batailles sanglantes, les bestes farouches charment dans un tableau, au lieu d’effrayer, si elles sont bien représentées et bien peintes ; ainsi les objets les plus pitoyables ont de quoy plaire s’ils sont bien conceûs et bien exprimez. Car, selon la doctrine d’Aristote [[1:Rhet. Lib. I cap. II]], tout ce qui sera imité parfaitement, sera agréable, quand mesme ce seroit quelque chose d’affreux. Le plaisir qu’on a de voir une belle imitation, ne vient pas précisément de l’objet, mais de la réflexion que fait l’esprit, qu’il n’y a rien en effet de plus ressemblant ; de sorte qu’il arrive en ces rencontres qu’on apprend je ne sçay quoy de nouveau qui pique et qui plaist.

Dans :Cadavres et bêtes sauvages, ou le plaisir de la représentation(Lien)

(Second Dialogue), p. 187-188

[[4:suit Timanthe]] C’est aussi par cette raison, qu’au rapport du mesme Pline, les derniéres pièces des excellents peintres, et celles qui sont demeurées imparfaites, ont mérité plus d’admiration que les tableaux qu’ils avoient finis : car outre qu’en voyant ces piéces qui n’estoient pas achevées, on ne pouvoit s’empescher de regreter les grands maistres à qui la mort avoit fait tomber le pinceau des mains sur de si rares ouvrages, et que la douleur qu’on ressentoit d’une telle perte faisoit estimer davantage ce qui estoient d’eux, on entrevoyoit tous les traits qu’ils y eussent ajoûté s’ils eussent vécu plus long-temps, et on devinoit jusqu’à leurs pensées.

Dans :Tableaux inachevés(Lien)

(Second Dialogue), p. 187-188

Toutes ces pensées au reste sont de la nature de celles que Séneque nomme coupées et mysterieuses, ou l’on entend plus que l’on ne voit [[1:Sunt qui sensus præcidant, et hinc gratiam sperent, si sententia pependerit, et audienti suspicionem sui fecerit. Senec. Ep. 114]] ; comme dans ces tableaux dont Pline dit que quoy qu’il n’y eust rien de mieux peint, et que l’art y fust en sa perfection, les connoisseurs y découvroient toûjours quelque chose que la peinture ne marquoit pas, et trouvoient mesme que l’esprit du peintre alloit bien plus loin que l’art. [[1:In omnibus ejus operibus intelligitur plus semper quam pinguitur, et cum ars suma sit, ingenium tamen ultra artem est. Hist. natur. lib. 35. c. 10]] [[4:suite : tableaux inachevés]]

Dans :Timanthe, Le Sacrifice d’Iphigénie et Le Cyclope (Lien)