Type de texte | source |
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Titre | De architectura |
Auteurs | Vitruve (Marcus Vitruvius Pollio) |
Date de rédaction | |
Date de publication originale | (-35):(-25) |
Titre traduit | De l\'architecture |
Auteurs de la traduction | Liou, Bernard Zuinghedau, Michel |
Date de traduction | 1995 |
Date d'édition moderne ou de réédition | |
Editeur moderne | |
Date de reprint |
, "De ratione pingendi parietes" (numéro VII, 5)
1. Ceteris conclauibus, id est uernis, autumnalibus, aestiuis, etiam atriis et peristylis constitutae sunt ab antiquis ex certis rebus certae rationes picturarum : namque pictura imago fit eius, quod est seu potest esse, uti hominis, aedifici, nauis reliquarumque rerum, e quibus, finitis certisque corporibus, figurata similitudine sumuntur exempla. Ex eo antiqui, qui initia expolitionibus instituerunt, imitati sunt primum crustarum marmorearum uarietates et collocationes; deinde coronarum et silaceorum cuneorum inter se uarias distributiones. 2. Postea ingressi sunt, ut etiam aedificiorum figuras, columnarum et fastigiorum eminentes proiecturas imitarentur : patentibus autem locis, uti exedris, propter amplitudines parietum scenarum frontes tragico more, aut comico, seu satyrico designarent : ambulationes uero, propter spatia longitudinis, uarietatibus topiorum ornarent ab certis locorum proprietatibus imagines exprimentes : pinguntur enim portus, promuntoria, litora, flumina, fontes, euripi, fana, luci, montes, pecora, pastores : nonnullis locis item signarent megalographiam habentem deorum simulacra, seu fabularum dispositas explicationes, non minus troianas pugnas, seu Vlixis errationes, per topia, ceteraque quae sunt eorum similibus rationibus ab rerum natura procreata. 3. Sed haec, quae ex ueris rebus exempla sumebantur, nunc iniquis moribus inprobantur. Nam pinguntur tectoriis monstra potius quam ex rebus finitis imagines certae : pro columnis enim statuuntur calami, pro fastigiis harpagae et mituli striati cum crispis foliis et uolutis, item candelabra aedicularum sustinentia figuras, supra fastigia earum surgentes ex radicibus cum uolutis coliculi teneri plures habentes in se sine ratione sedentia sigilla, non minus etiam ex cauliculis flores dimidiata habentes ex se exeuntia sigilla, alia humanis, alia bestiarum capitibus similia. 4. Haec autem nec sunt nec fieri possunt nec fuerunt. Ergo ita noui mores coegerunt, uti inertiae mali iudices conniueant artium uirtutes. Quemadmodum enim potest calamus uere sustinere tectum, aut candelabrum aediculas et ornamenta fastigii, seu coliculus, tam tenuis et mollis, sustinere sedens sigillum, aut de radicibus et cauliculis ex parte flores dimidiataque sigilla procreari ? At haec falsa uidentes homines non reprehendunt, sed delectantur, neque animaduertunt si quid eorum fieri potest nec ne. Iudiciis autem infirmis obscuratae mentes non ualent probare quod potest esse cum auctoritate et ratione decoris. Neque enim picturae probari debent, quae non sunt similes ueritati ; nec si factae sunt elegantes ab arte, ideo de his statim debet recta iudicari, nii argumentationis certas habuerint rationes sine offensionibus explicatas.
Dans :Grotesques(Lien)
, "De la manière de peindre les murailles" (numéro VII, 5)
1. Dans les autres appartements, c’est-à-dire dans ceux qu’on habite au printemps, en automne, en été, et même dans les vestibules et dans les péristyles, les anciens avaient accoutumé de prendre dans la nature même les sujets de leurs peintures. Et, en effet, la peinture ne doit représenter que ce qui est ou ce qui peut être, comme un homme, un édifice, un vaisseau, ou toute autre chose dont on imite avec exactitude la forme et la figure. Aussi les anciens, qui firent les premières peintures sur les enduits, imitèrent les différentes bigarrures du marbre, et firent ensuite des compartiments variés, traçant des figures rondes et triangulaires en jaune et en rouge.
2. Après cela ils en vinrent à représenter des édifices avec des colonnes et des frontons, qui se détachaient parfaitement sur le fond. Dans les lieux spacieux, dans les salles de conférences, par exemple, où les murs présentent de grandes surfaces, ils peignaient des scènes tragiques, comiques ou satiriques. Les galeries, à cause de leur longueur, furent ornées de paysages qu’ils animaient par des points de vue tirés de certaines localités; c’étaient des ports, des promontoires, des rivages, des fleurs, des fontaines, des ruisseaux, des temples, des bois, des montagnes, des troupeaux, des bergers; dans quelques endroits ils peignaient de grands sujets où figuraient les dieux; ou bien c’étaient des épisodes empruntés à la mythologie, ou les guerres de Troie, ou les voyages d’Ulysse; partout des paysages nulle part rien qui ne fût en harmonie avec les productions de la nature.
3. Mais cette belle nature, dans laquelle les anciens allaient prendre leurs modèles, nos goûts dépravés la repoussent aujourd’hui. On ne voit plus sur les murs que des monstres, au lieu de ces représentations vraies, naturelles ; en place de colonnes, on met des roseaux ; les frontons sont remplacés par des espèces de harpons et des coquilles striées, avec des feuilles frisées et de légères volutes. On fait des candélabres soutenant de petits édifices, du haut desquels s’élèvent, comme y ayant pris racine, quantité de jeunes tiges ornées de volutes, et portant sans raison de petites figures assises; on voit encore des tiges terminées par des fleurs d’où sortent des demi-figures, les unes avec des visages d’hommes, les autres avec des têtes d’animaux.
4. Or, ce sont là des choses qui ne sont pas, qui ne peuvent être, qui n’ont jamais été. Cependant ces nouvelles fantaisies ont tellement prévalu que, faute d’un homme qui soit en état de les apprécier, les arts dépérissent journellement. Quelle apparence, en effet, que des roseaux soutiennent un toit, qu’un candélabre porte des édifices, que les ornements de leur faîte, c’est-à-dire des tiges si faibles et si flexibles, portent des figures assises, ou que des racines et des tiges produisent des fleurs et des demi-figures ? À la vue de ces faussetés, il ne s’élève pas un mot de blâme ; on s’en amuse, au contraire, sans prendre garde si ce sont des choses qui soient possibles ou non. Les esprits obscurcis par la faiblesse de leur jugement, ne sont point en état d’apprécier le mérite, la beauté d’un ouvrage. Une peinture n’est pas digne d’approbation, si elle ne représente point la vérité. Il ne suffit pas qu’un sujet soit peint avec tout le prestige de l’art, pour qu’on doive immédiatement le juger avec avantage; encore faut-il que le dessin n’offre dans aucune de ses parties rien qui blesse la raison.