Type de texte | source |
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Titre | Les Reines de Perse aux pieds d’Alexandre |
Auteurs | Félibien, André |
Date de rédaction | |
Date de publication originale | 1663 |
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, p. 11
C’est en quoy on connoist qu’un ouvrier est excellent, quand il sçait si bien disposer son sujet, qu’au lieu de faire paroistre les defauts naturels de la personne qu’il peint, il les déguise adroitement sans rien diminuer toutefois de la veritable ressemblance. On remarque des plus fameux peintres et sculpteurs de l’antiquité, qu’ils representoient toûjours Périclés avec un casque, à cause qu’il avait la teste mal faite. Et quand Appelles faisoit le portrait d’Antigone, il le peignoit de profil pour cacher le defaut de ce prince qui n’avoit qu’un œil.
C’est pourquoy comme Alexandre penchoit naturellement la teste, nous le voyons icy peint d’une maniere si adroite, que cette action que le peintre a imitée, non seulement ne paroist pas un defaut, mais au contraire, il semble que ce seroit un defaut à la figure qui le represente, si cette action n’y estoit pas, puis qu’elle y donne beaucoup plus de grace et beaucoup plus d’expression.
Dans :Apelle, le portrait d’Antigone(Lien)
, p. 29-30
Anciennement ceux qui representoient la comedie avoient de coûtume de couvrir l’orchestre avec de la laine, afin d’émousser par cet artifice la voix du chœur qui chantoit sur le theatre. Et Alexandre ayant fait bastir dans la ville de Pella un lieu pour la comedie, et voulant pour le rendre plus beau et plus riche que le devant de la scene du theatre fût d’un bronze bien poli, l’architecte l’en empescha, luy remontrant que la voix des comediens paroistroit moins belle et moins douce à l’oreille, parce que venant à fraper contre cette matiere dure et polie, elle se rendroit trop éclatante.
Il en est de mesme dans la peinture, où la trop grande vivacité offense la veuë. C’est pourquoy Appellés cet excellent peintre se servoit d’un vernix dont il couvroit ses ouvrages pour diminuer la force des couleurs. Et l’on peut considerer dans ce tableau[[5:Les Reines de Perse aux pieds d’Alexandre de Le Brun.]] de quelle maniere le peintre les a éteinte et leur a osté de leur éclat et de leur vivacité naturelle, afin de les affoiblir et d’empescher qu’elles n’offensent la veuë par une trop vive lumiere.
Dans :Apelle, atramentum(Lien)