Type de texte | source |
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Titre | La Peinture, poëme |
Auteurs | Perrault, Charles |
Date de rédaction | |
Date de publication originale | 1668 |
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, p. 224
D’un autre plus fameux, la main prompte et fidèle
Peindra la Cythérée, et la peindra si belle
Que jamais nul pinceau n’osera retoucher
Les beaux traits que le sien n’avait fait qu’ébaucher.
Dans :Apelle, Vénus inachevée(Lien)
, p. 236-238
Quelques profanes voix ont dit que le hasard
Aux premiers des mortels enseigna ce bel art,
Et que quelques couleurs, bizarrement placées,
Leur en ont inspiré les premières pensées ;
Mais qu’ils sachent qu’Amour, le plus puissant des dieux,
Le premier aux humains fit ce don précieux ;
Qu’à sa main libérale en appartient la gloire,
Et pour n’en plus douter, qu’ils en sachent l’histoire.
Dans l’île de Paphos fut un jeune étranger,
Qui vivait inconnu, sous l’habit d’un berger ;
La nature avec joie, et d’un soin favorable,
Amassant en lui seul tout ce qui rend aimable,
Avec tant d’agrément avait su le former,
Que ce fut même chose et le voir et l’aimer.
Des eaux et des forêts les nymphes les plus fières,
Sans attendre ses vœux, parlèrent les premières ;
Mais son cœur, insensible à leurs tendres désirs,
Loin de les écouter, méprisa leurs soupirs.
Entre mille beautés, qui rendirent les armes,
Une jeune bergère eut pour lui mille charmes,
Et de ses doux appas lui captivant le cœur,
Eut l’extrême plaisir de plaire à son vainqueur ;
L’aise qu’elle sentit d’aimer et d’être aimée,
Accrut encor l’ardeur de son âme enflammée.
Soit que l’astre des cieux vienne allumer le jour,
Soit que, dans l’Océan, il finisse son tour,
Il la voit, de l’esprit et des yeux attachée
Sur le charmant objet dont son âme est touchée ;
Et la nuit, quand des cieux elle vient s’emparer,
Sans un mortel effort ne l’en peut séparer.
Pour la seconde fois, la frileuse hirondelle
Annonçait le retour de la saison nouvelle,
Lorsque, de son bonheur le destin envieux
Voulut que son berger s’éloignât de ces lieux.
La nuit qui précéda cette absence cruelle,
Il veut voir sa bergère, et prendre congé d’elle,
Se plaindre des rigueurs de son malheureux sort,
Et de ce dur départ, plus cruel que la mort.
Elle, pâle, abattue, et de larmes baignée,
Déplore en soupirant sa triste destinée ;
Et, songeant au plaisir qu’elle goûte à le voir,
Ne voit, dans l’avenir, qu’horreur et désespoir.
Amour, qui sais ma flamme et les maux que j’endure,
N’auras-tu point pitié de ma triste aventure ?
Je ne demande pas la fin de mon tourment ;
Mais, hélas ! donne-moi quelque soulagement.
Sur l’aile des soupirs sa prière portée,
Du tout-puissant amour ne fut point rejetée.
Sur le mur opposé, la lampe, en ce moment,
Marquait du beau garçon le visage charmant ;
L’éblouissant rayon de sa vive lumière,
Serrant de toutes parts l’ombre épaisse et grossière
Dans le juste contour d’un trait clair et subtil,
En avait nettement dessiné le profil.
Surprise, elle aperçoit l’image figurée,
Et, se sentant alors par l’amour inspirée,
D’un pinceau, par hasard, sous ses doigts rencontré,
Sa main, qui suit le trait par la lampe montré,
Arrête sur le mur, promptement et sans peine,
Du visage chéri la figure incertaine ;
L’Amour ingénieux, qui forma ce dessein,
Fut vu, dans ce moment, lui conduisant la main.
Sur la face du mur marqué de cette trace,
Chacun du beau berger connut l’air et la grâce,
Et l’effet merveilleux de cet événement
Fut d’un art si divin l’heureux commencement.
Par la nymphe aux cent voix la charmante Peinture,
Instruite du succès d’une telle aventure,
Vint apprendre aux mortels mille secrets nouveaux,
Et leur montra si bien comment, dans les tableaux,
Les diverses couleurs doivent être arrangées,
Ensuite, au gré du jour, plus ou moins ombragées ;
Comment il faut toucher les contours et le trait,
Et tout ce qui peut rendre un ouvrage parfait ;
Qu’enfin l’art est monté, par l’étude et l’exemple,
À ce degré suprême où notre œil le contemple,
Digne de la grandeur du roi que nous servons,
Digne de la splendeur du siècle où nous vivons.
Dans :Dibutade et la jeune fille de Corinthe(Lien)
, p. 224
Votre art en même temps, pour comble de sa gloire,
Fera mille tableaux, d’éternelle mémoire ;
Avec un soin égal, les fruits représentés
Par les oiseaux déçus se verront becquetés
Et là, d’un voile peint avec un art extrême
L’image trompera les yeux du trompeur même.
Dans :Zeuxis et Parrhasios : les raisins et le rideau(Lien)