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Type de textesource
TitreÉlémens de littérature
AuteursMarmontel, Jean-François
Date de rédaction
Date de publication originale1787
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, article « Fiction », t. III, p. 425-429

Fiction. Production des arts, qui n’a point de modèle complet dans la nature.

L\'imagination compose et ne crée point: ses tableaux les plus originaux ne sont eux-mêmes que des copies en détail; et c\'est le plus ou le moins d\'analogie entre les differens traits qu\'elle assemble, qui constitue les quatre genres de fiction que nous allons distinguer, savoir, le parfait, l\'exagéré, le monstrueux, et le fantastique.

La fiction qui tend au parfait, ou la fiction en beau, est l’assemblage régulier des plus belles parties dont un composé naturel soit susceptible; et dans ce sens étendu, la fiction est essentielle à tous les arts d’imitation. En peinture, les Vierges de Raphaël et les Hercule du Guide n’ont point dans la nature de modèle individuel ; il en est de même, en poésie, des caractères d’Andromaque, de Didon, d’Orosmane, etc. Qu’ont fait les artistes ? Ils ont recueilli les beautés éparses des modèles existans, et en ont composé un tout plus ou moins parfait, suivant le choix plus ou moins heureux de ces beautés réunies. Voyez, dans l\'article critique, la formation du modèle intellectuel, d\'après lequel l\'imitation doit corriger la nature. […]

La fiction doit être une peinture de la vérité, mais de la vérité embellie par le choix et par le mélange des couleurs et des traits qu’elle puise dans la nature. Il n’y a point de tableau si parfait dans la disposition naturelle des choses, auquel l’imagination n’ait pas encore à retoucher. La nature, dans ses opérations, ne pense à rien moins qu’à être pittoresque : ici, elle étend des plaines, où l’œil demande des collines; là, elle resserre l’horizon par des montagnes où l’œil aimeroit à s’égarer dans le lointain. Il en est du moral comme du physique; l’histoire a peu de sujets que la poésie ne soit obligée de corriger et d’embellir, pour les adapter à ses vues. C’est donc au peintre à composer des productions et des accidens de la nature un mélange plus vivant, plus varié, plus attachant que ses modèles. Et quel est le mérite de les copier servilement ? Combien ces copies sont froides et monotones, auprès des compositions hardies du génie en liberté ! Pour voir le monde tel qu’il est, nous n’avons qu’à le voir en lui-même ; c’est un monde nouveau qu’on demande aux arts, un monde tel qu’il devroit être, s’il n’étoit fait que pour nos plaisirs. C’est donc à l’artiste à se mettre à la place de la nature, et à disposer les choses suivant l’espèce d’émotion qu’il a dessein de nous causer, comme la nature les eût disposées elles-mêmes, si elle avoit eu pour premier objet de nous donner un spectacle riant, gracieux, ou touchant, ou terrible.

Dans :Zeuxis, Hélène et les cinq vierges de Crotone(Lien)

, art. « Comédie », t. II, p. 140

La tragédie est un tableau d’histoire ; la comédie est un portrait : non le portrait d’un seul homme, comme la satire, mais d’une espèce d’hommes répandus dans la société, et dont les traits les plus marqués sont réunis dans une même figure.

Dans :Zeuxis, Hélène et les cinq vierges de Crotone(Lien)