Type de texte | source |
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Titre | Traité des statuës |
Auteurs | [Lemée, François] |
Date de rédaction | |
Date de publication originale | 1688 |
Titre traduit | |
Auteurs de la traduction | |
Date de traduction | |
Date d'édition moderne ou de réédition | 2012 |
Editeur moderne | Bodart, Diane H.; Ziegler, Hendrik |
Date de reprint | Weimar, VDG, 2 vol. |
, « Des sculpteurs » (numéro chapitre II) , p. 28-29
Car selon Platon [[1:Lib. 2 de Rep. Initio]] un peintre peut faire le portrait d’un corroieur, d’un charpentier, et de tous autres artisans sans en sçavoir les arts, et cette ignorance n’empêchera pas s’il excelle d’ailleurs, que ses tableaux ne surprennent les simples et les mauvais connoisseurs, qui ne les prendront point pour des peintures, mais pour des hommes veritables.
C’est pourquoy Apellés ne perdit pas sa réputation pour un soulier qui n’étoit pas dans toute la justesse possible, et le reformant suivant l’advis qu’un cordonnier luy en donna ; il apprit par-là aux autres à n’avoir pas plus d’entêtement que luy, qui se cachoit ordinairement derriere ses ouvrages, dans le dessein de profiter de ce que le public en pensoit. Il ne donnoit pas neantmoins indifferemment dans tout ce que l’on en disoit, et il se moqua de ce même cordonnier [[1:Ne sutor ultra crepidam. Plin. l. 35. c. 10]] qui revenant à la charge controloit mal à propos une jambe qu’il avoit peinte. S’il n’eût eu cette maxime, il n’auroit rien finy non plus que Protogénes, ou semblable à Apollodore qui n’étoit jamais content pour vouloir trop penetrer les secrets de l’art, il auroit souvent brisé de tres belles pieces.
Dans :Apelle et le cordonnier(Lien)
, « De l’utilité des statuës » (numéro chapitre X) , p. 258
Il est très-certain que les hommes n’auroient jamais taillé les statuës de tant d’objets differens, si elles n’étoient aucunement utiles : or peut-on dire qu’elles ne le soient pas, après cette satisfaction que l’on a de regarder le portrait des personnes qui nous plaisent [[1:Maxim. Tyr. dis.]]. On aime à contempler jusqu’aux peintures des choses qui sont d’elles-mêmes hideuses [[1:Arist. lib. de Poet. c. 4]] ; et sans ce plaisir, d’où viendroit la passion qu’ont les curieux d’amasser tant de marbres et de bronzes, et d’entreprendre de penibles voyages pour voir quelque piece achevée ?
Dans :Cadavres et bêtes sauvages, ou le plaisir de la représentation(Lien)
, « De la forme ou figure des statuës » (numéro chapitre IV) , p. 65
Cette conformité[[5:entre la copie et l’original.]] ne contribuë uniquement qu’à les rendre plus parfaits, et l’on dit que nous en sommes redevables à l’ingenieux Dedale. On trouva en effet ses statuës si au naturel, qu’on disoit qu’elles marchoient, par ce qu’il leur separa les pieds et les jambes, leur dégagea les mains et les bras, et leur ouvrit les yeux : ce qui n’avoit point enore esté pratiqué, quelqu’unes même avant luy ayant esté privées de toutes ces parties-là.
Dans :Dédale et l’invention de la sculpture(Lien)
, « Des origine, noms, définition, et division des statuës » (numéro chapitre premier) , p. 1-2
Il n’y a rien de plus incertain que l’origine des statuës ; ceux qui en ont parle [[1:Plin. lib. 35. c. 12]] disent qu’un potier commença la premiere en couvrant d’argile certains lineamens que sa fille s’avisa de tracer sur l’ombre de son amant, qu’une muraille luy rendoit à la lueur de la chandelle : mais quoy qu’il soit assez vray-semblable qu’une telle circonstance ait donné lieu à la peinture et à la statuaire, il faut pourtant demeurer d’accord que leur découverte est plus ancienne que cette jeune amante, qu’on dit être la fille de Dibutades.
Dans :Dibutade et la jeune fille de Corinthe(Lien)
, « De la matiére des statuës » (numéro chapitre III) , p. 37
J’ay remarqué cy-dessus que Dibutades passe selon quelques-uns pour avoir donné lieu aux images de terre. Il y en a encore qui donnent cet honneur à Rhoecus et à Theodore de l’Isle de Samos.
Dans :Dibutade et la jeune fille de Corinthe(Lien)
, « De l’ornement des statuës » (numéro chapitre V) , p. 106
Ce furent de telles peintures qui irriterent avec raison un sçavant du siecle passé. Il ne pouvoit souffrir qu’on en remplît les maisons, et que les riches fissent chercher par tout de ces malheureux ouvriers qui vendent bien cher les funestes modeles d’une vie libertine. Car assurement il y en a beaucoup qui n’imitent pas cette fille, du temps de Varron, laquelle ne voulut jamais representer d’hommes, de crainte peut-être d’être tentée de les mettres nuds à la mode de son siecle.
Dans :Femmes peintres(Lien)
, « Des sculpteurs » (numéro chapitre II) , p. 24-25
La connoissance des mathematiques étoit encore necessaire, particulierement celle de l’optique, de l’arithmétique et de la géométrie : sans cela il est difficile de bien disposer et proportionner les parties d’une statuë selon son modele, ou selon la distance du lieu, où elle doit être posée. Pamphilus premier peintre sçavant a crû qu’on ne pouvoit se rendre parfait dans la peinture sans les deux dernières sciences dont je viens de parler. En effet, ce fut par leur moyen que sept excellens statuaires fort eloignez les uns des autres, vinrent heureusemnet à bout d’un colosse de bronze qu’ils avoient entrepris : les parties que chacun d’eux fit separément, étant ajustées, representerent un homme tres-bien proportionné.
Dans :Pamphile et la peinture comme art libéral(Lien)
, p. 32-33
Après cette inclination que les puissances mêmes ont eû pour la peinture, je ne m’étonne pas, qu’elle en ait obtenu à Rome des privileges semblables à ceux dont joüissoient les professeurs des arts liberaux. Il en étoit ainsi chez les Grecs, dont il n’y avoit au commencement que les plus qualifiez qui se mêlassent de peindre ; et si l’on permit depuis à quelques autres personnes de s’addonner à cet art, ce n’étoit qu’à condition de ne le point enseigner à la canaille ni aux esclaves, qui en étoient exclus pour toûjours par édit public [[1:Pline lib. 35. c. 10]]. Aussi ne trouvoit-on point de tableaux, de reliefs, ni autres pieces faites au ciseau, ou au burin, qui sortissent d’une main servile.
Dans :Pamphile et la peinture comme art libéral(Lien)
, « Des sculpteurs » (numéro chapitre II) , p. 20-21
Il est vrai que si les peintres et les sculpteurs avoient tous ressemblé à Socrates, qu’on pretend avoir excellé dans la sculpture ; la philosophie les auroit garantis de beaucoup d’égaremens, où plusieurs sont tombez. Ne faisant rien de mal à propos, ils n’auroient eu au contraire que deux choses pour but, la vertu et la perfection de leur art ; mais ne les ayant pas toûjours pû joindre ensemble, au moins devoient-ils avoir les bonnes mœurs que Platon exige en chaque artisan [[1:τὸ μὲν ἐκ τῆς τέκνης, τὸ δὲ ἐκ τῆς ἀῥρετῆς. Lib. 3 de Repub.]], et éviter sur tout la cruauté de Parrhasius, qui mit à la gesne un vieil captif pour peindre un Promethée sur un si triste modele [[1:Senec. lib. 10. Declam.]]. Je croirois qu’il n’y auroit eu que des païens capables d’un tel excès, mais on dit qu’un fameux peintre d’Italie fit aussi au siecle passé un Christ mourant sur un pauvre homme qu’il avoit inhumainement crucifié.
Dans :Parrhasios, Prométhée(Lien)
, « De quelques effets surprenants des statuës » (numéro chapitre XIV) , p. 378
Si cette statuë avoit ainsi retenu les innocentes marques de la foiblesse du sexe qu’elle representoit, combien d’autres en ont-elles conservé les criminels attraits. [[1:Cujus aspectus insensato dat concupiscentiam et diligit mortuæ imaginis effigiem sine anima. Sap. 25. v. 5]] Il y en a qui par des charmes aussi surprenants que pernicieux, ont donné de l’amour aux insensez qui les ont regardées, et leur ont fait cherir l’image d’une personne qui n’étoit plus.
Ovide est admirable sur l’aventure de Pigmalion [[1:Metamorphos. lib. 10]], qui n’avoit jamais pu aimer de femme, que celle qu’il se fit luy-même avec de l’yvoire. La Venus de Gnide, la Bonne Fortune d’Athennes, le Cupidon de Tespir, et celui de Pare, ont eu des amans, et l’on ne sçauroit parler qu’avec horreur de la folie ou plûtôt de la rage de Clisophus le Selymbrien [[1:Natal. Comes l. 7 c. 16. Mythol.]].
Dans :Praxitèle, Vénus de Cnide(Lien)