1778-01-10, de Voltaire [François Marie Arouet] à Jean Baptiste Claude Delisle de Sales.

Je suis plus fâché que vous, monsieur, du refus que nous avons essuyé.
Vous n'avez perdu que ce que j'ai quitté. Je me flatte que vous trouverez dans votre patrie ce que nous cherchions ailleurs pour vous. Je deviens malheureusement tous les jours plus inutile. La mort m'a enlevé presque tous mes amis, et me rejoindra bientôt à eux. Mais il est impossible que votre mérite ne vous procure pas bientôt quelque place. Vous n'aurez jamais de recommandation plus forte que vous même; montrez vous, et vous réussirez. Il me semble d'ailleurs que du pain dans sa patrie vaut encore mieux que des biscuits en pays étrangers.

La manière dont on vous a refusé des biscuits est un peu dure. J'espère que vous trouverez plus de douceur chez les Français; car tous ne sont pas Velches, et je crois qu'il y en a beaucoup dignes de vous connaître et de vous accueillir. Je vous embrasse avec douleur, mais avec espérance.