1777-12-23, de Voltaire [François Marie Arouet] à Charles Frédéric Gabriel Christin.

Le vieux malade a écrit à Mr le chevalier De Chatellux, mais j'avertis mon très cher correspondant, le protecteur des persécutés, que Mr D'Aguessau n'a jamais voulu lire le livre de la félicité publique; qu'il n'en a jamais dit un mot à l'auteur quoique son neveu, et que le grand oncle de la félicité publique est un homme un peu difficile en affaires.

Je souhaitte à mon cher deffenseur des infortunés tout le succez que sa constance mérite. J'avoue que je crains toujours ces 24 personages qui déclarèrent leur communauté esclave par devant notaire. Je n'ai pas de peine à croire que ce notaire était un étranger, un mal vivant et un yvrogne. Je viens d'avoir à faire à un procureur qui est tout celà, et cependant j'ai perdu mon procez. Que ne suis-je à portée d'intéresser Mr Neker dans cette affaire! Il est je crois le seul qui pourait engager Mr de Maurepas à signaler son ministère par l'abolition de la servitude, en imitant le roi de Sardaigne.

J'embrasse bien tendrement mon très cher ami le maire de St Claude, qui mériterait d'être le maire de Londres.

V.