4e 7bre 1777
Je réponds d'abord, Monsieur, à la fin de la lettre dont vous m'honorez, du 19 auguste, ou peut être du 29: car je perds les yeux comme tout le reste.
Je pleure bien amèrement la mort de Mr De Trudaine, et ce n'est pas seulement parce qu'il était le seul homme en place qui me fût resté de tous ceux qui pouvaient favoriser ma colonie et adoucir la fin de mes jours; c'est parce que sa vertu aimable, et son goût pour les belles lettres me le rendaient infiniment cher. Je passerai le peu de temps qui me reste, à regretter Mr et Made De Trudaine. J'ose me flatter que vous daignerez faire souvenir de moi Monsieur De Fourqueux et Madame D'Invau. Je ne sçais si elle aura reçu dans son temps une Lettre dans laquelle je pris la liberté de mêler ma douleur à la sienne.
Je n'aurai pas la consolation de voir Mr et Made De Vaines dans mon malheureux désert. Le changement qu'on fait dans les postes les retient à Paris. Ils amenaient probablement avec eux Mr Barthe dont vous me parlez. Je me fesais un grand plaisir de voir son ouvrage qui doit être plein d'esprit et de raison; car tout ce que je connais de lui est dans ce goût.
Je ne puis jamais avoir l'honneur de vous écrire, Monsieur, sans vous parler de cette félicité publique, qui a fait la mienne. Je pense, et je dis hautement que ce livre est rempli de plus de vérités utiles, que l'esprit des loix et je ne veux point mourir sans le prouver.
Conservez moi Monsieur, les bontés consolantes dont j'ai besoin, et agréez mon respect.
V.