1777-02-10, de Henri Louis Lekain à Jacques Joseph Marie Decroix.

Monsieur,

J'ai Reçu, avec Reconnaissance, Et Lû, avec beaucoup de plaisir, L'ouvrage que vous avés eû la bonté de m'Envoyer; Le jugement Que vous portés sur mr de Voltaire, me paraist bien vray, et sans En communiquer rien à personne, j'ai pensé, depuis Long temps, Tout ce Que mr de Saint Lambert à hasardé de mettre aujour sur ce Grand homme; un jour àvenir, Tout Le monde sera d'accord sur cette vérité, mais il faut, pour cela, Que L'autheur ne soit plus Que de La poussière; il sera alors Le Législateur de son art, comme Homère Le fut et L'est Encor du poéme épique.

Je ne suis pas tout à fait si confiant, Que vous l'étes monsieur, sur Le Célébre Rameau, et je vous avouë Que, dans Toute Lès ouvrages de cet homme célébre, je n'ai jamais éprouvé une satisfaction bien Complette; peutètre, est-ce déffaut d'organisation, peut-ètre est-ce déffaut de goût; beaucoup de gens croyent Que notre musique Est Encor dans L'enfence; cela peut être, mais je Le croirai, Lorsque j'en pourai faire le parallelle avec celle des virtuoses d'Italie Qui mettent en musique plusieurs de nos opéra français.

Aumoins suivraije, à cet Egard, Le simple instinct Que La nature m'a donné, et peut ètre, mon jugement alors, vaudrat-il celui du plus fameux Compositeur. Je Regrètte beaucoup, monsieur, Que vous vous soyés Borné, dans votre ouvrage, aux seule éloges de messieurs de Voltaire et Rameau; vous eussiés pû donner bien plus d'étendue à votre sujet, en parlant de nos sculpteurs, de nos graveurs, et de Queleques uns de nos peintres; Quele ques uns des arts méchaniques auraient pû Encor Trouver place dans votre brochure, et il faut convenir Que ce siècle à produit Les plus Excellents ouvriers de L'Europe; je ne pénètre pas plus avant dans vos idées, et je me borne à vous assurer de la Reconnaissance bien réspectueuse avec Laquelle je serai, Toute ma vie,

Monsieur,

Votre très humble et trés obéissant serviteur

Lekain

Je n'ai rien découvert Encor sur Arthémire, mais il me Reste Quelque espérance Que L'on me communiquera Le manuscript de La police.