le 2^e 9^bre 1776

J'ay eu L'honneur, Monsieur, de vous Ecrire de Chantilly, sous La contresignature de m^r Le garde des sceaux, pour vous assurer du plaisir qu'auroit M^r Le prince de Condé, de vous être utile auprès du controlleur gel͞.
Je vous marquois, Monsieur, Le danger des Jours de M^r de Cluni. Tout est changé, parce que tout change sans cesse. Voilà M^r Nekre, qui mérite d'estre de vos amys, En pouvoir de vous obliger, c'est à dire de seconder L'habitude où vous êtes de faire Le bien aux peuples qui vous Environnent. Si la maitre du palais-Bourbon, ainsi que ses sujets, y peuvent quelque chose vous n'avés qu'à dire.

Je vous ay aussi, dans le temps, rendû Compte de la Comédie d'Orpello. Je vous diray rien de L'abbé grossier, digne successeur de son patron, et vertueux Emule de L'abbé Clement, à qui Le public déferoit L'employ de Freron.

M^r le prince de Condé, qui aime à s'attacher des gens de mérite, vient de faire le Jeune Champfort secrétaire de ses commandements. Ce Jeune auteur vient de donner à Fontainebleau, sa tragédie de Mustapha, qui a eu un grand succès. C'est la seulle nouveauté qui ait Complètement réüssit. S. A. avoit déjà donné un brevet de Lecteur à M^r de S^t Alphonce, frère de la Jolie m^e La Borde, qui a esté en pélerinage à Ferney avec sa mère, et son mary. Voicy des vers que j'ay adressé à cet aimable S^t Alphonce après avoir assisté à la représentation d'une de ses pièces à Chantilly. Ce sont des conseils d'expérience sous le nom d'un vieux pauvre du vilage. Vous trouverés La réponse plus Jolie que la demande; mais vous pourés donner L'un et L'autre au bon père Adam, pour se faire des papïlottes. Votre vieux admirateur du palais-Bourbon, dit touts les Jours son chapelet pour la conservation de vos Jours & de votre santé.