à Ferney 28e 7bre 1776
Messieurs,
Aiant fait tout ce que j'ai pu pour reculer les paiements que je dois faire, sans aucune remise, à la fin de cette année, et pour vous faciliter aussi le paiement de ce que vous me devez; me trouvant enfin dans la nécessité absolue de satisfaire mes créanciers dans le mois de Décembre prochain, j'ai eu recours à la justice et à la générosité de Monseigneur Le Duc De Virtemberg.
Je lui ai demandé Trente mille Livres pour le 15 Décembre sur la somme que vous me devez depuis trois ans. Voicy ce qu'il a la bonté de me répondre.
Vôtre prétention sur ma recette de Montbelliard étant juste, je viens, Monsieur, de Donner les ordres les plus précis à mon conseil de Régence de cette ville, de faire ensorte que vous puissiez toucher les trente mille Livres que vous demandez vers la fin de cette année.
Je vous conjure, Messieurs, d'avoir pour moi les mêmes attentions dont Monseigneur m'honore. Joignez vous à lui pour me faire toucher au 15 Décembre ces Trente mille Livres indépendament de mes rentes ordinaires. Si vôtre recette ne vous fournit pas cette somme aiez la bonté de le prier de vous la fournir lui même sur les revenus de son Duché.
Quand je demande au bout de trois ans et demi Trente mille Livres sur soixante et dix mille, je mérite que vous m'écoutiez, et que vous me sauviez d'une ruine totale. Je compte sur vôtre équité, et sur vôtre humanité.
J'ai l'honneur d'être avec tous les sentiments que je vous dois
Messieurs
Vôtre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire