1776-05-15, de Voltaire [François Marie Arouet] à Anne Louise Élie de Beaumont.

Madame,

La Lettre dont vous m'avez honoré du 5 avril, et que j'ai reçue ces jours cy par Mr D'Hornoy, ressemble aux ordonnances qu'on donnait autrefois sur le trésor roial où mon neveu demeure; elles fesaient d'abord grand plaisir, mais on ne les paiait point.

On ne m'a point envoié ce que vôtre Lettre m'annonce. Je me flatte qu'à la fin vous serez obéïe. Je vous remercie d'avance; car je sais que vous réussissez dans vôtre sorte d'éloquence autant que Monsieur De Beaumont dans la sienne; et l'on aurait bien de la peine à dire laquelle des deux doit avoir la préférence. J'aime bien Monsieur, j'aime bien Madame. Je suis très respectueusement attaché à l'un et à l'autre depuis longtems; c'est un sentiment que je conserverai jusqu'au dernier moment de ma vie. Il sera plus vif que jamais si je suis paié au trésor roial de la belle ordonnance que vous m'avez envoiée. Agréez, Madame, le très humble respect du très vieux malade de Ferney.

V.