1776-03-23, de Voltaire [François Marie Arouet] à Pierre Samuel Du Pont de Nemours.

Oui, Monsieur, ce qu'on a jamais écrit de mieux sur les Corvées, c'est l'Edit des corvées.
Je trouve que l'amour du bien public est la plus éloquente de toutes les passions. Mais j'aime bien autant la préfaces des maitrises. Béni soit soit l'article 14 de l'édit qui abolit les confréries! Si on avait aboli en Languedoc les confréries des pénitents bleus, blancs et gris, le bon homme Calas n'aurait pas été roué et jetté dans les flammes. Voicy l'âge d'or qui succède à l'âge de fer. Celà donne trop envie de vivre, et cette envie ne me sied point.

Dites moi donc je vous prie, Monsieur, si ce beau siècle sera pour nous le siècle du sel, et s'il est vrai que nous aurons deux mille huit cent minots de Pecais.

Je me trompe fort, ou le père de la nation ne souffrira pas longtems que des moines aient des sujets du Roi pour esclaves. Je vous prierai quelque jour de coopérer à cette bonne œuvre, et de m'avertir quand il sera tems de présenter requête au libérateur de la nation.

Je trouve fort plaisant le discoureur qui a dit au Roi que les peuples pouraient bien se révolter si on les délivrait des corvées et des jurances. Ma foi si on se révolte ce ne sera pas chez nous.

Je vous remercie du fond de mon coeur, Monsieur. V: t: h: o: sr

V.