1774-11-11, de Voltaire [François Marie Arouet] à Mme — Joly.

Madame,

Vos bontés me font sentir mon tort.
J'aurais dû vous prévenir, mais vous pardonnez à un octogénaire malade. Nous avons vu, made Denis et moi, dans made de Florian tout le mérite que l'éducation reçue de vous, a dû lui donner, joint à toutes les grâces qu'elle tient de la nature. Nous nous sommes attachés à elle dès le premier jour que nous l'avons vue. Elle n'a pas un jeune mari, mais elle a un très bon mari et cela vaut beaucoup mieux.

J'ai tout lieu de me flatter qu'elle jouira longtemps d'un bonheur dont bientôt je ne serai plus le témoin. Le petit dérangement de sa santé n'est rien; elle est si bien faite, et paraît si bien constituée, que cet accident passager ne peut jamais avoir de suites fâcheuses.

Mademoiselle sa soeur paraît bien digne de vous et d'elle. Je lui souhaite bientôt un mari tel que mr de Florian, si nous en trouvons. Made Denis fait tous ses efforts pour leur rendre la vie de la campagne agréable. Pour moi qui n'existe presque plus, je suis réduit à être le témoin de leur félicité sans pouvoir y contribuer.

Je vous souhaite made &a.

Voltaire