16e Mars 1772
J’ai montré au jeune avocat la lettre du 9e Mars, qui est bien plus pour lui que pour moi.
Il est bien difficile de le guérir de la prévention où il est que sa pièce ne sera que du réchauffé: et je l’ai vu tout prêt à quitter la poësie ainsi que le Barrau. Je l’ai ranimé autant que je l’ai pu; mais je n’ai rien eu à lui dire sur la reconnaissance et l’attachement qu’il a pour le quatuor. Il m’a paru de ce côté là beaucoup plus parfait que sa pièce.
J’ai tiré de lui quelques changements à la fin du second acte; je vous les envoie. Ces corrections me paraissent nécessaires; le dialogue est plus pressé et plus vif. L’aristocratie des Crêtois me semble bien mieux dévelopée. Je vous suplie donc avec lui de faire porter ces changements sur la pièce que vous avez.
Il ne faut pas surtout oublier une correction encor plus nécessaire au 5e acte.
DATAME
Il aporte à tes pieds sa joie et sa douleur.ASTERIE
Que dis-tu?AZEMON
Quoi mon fils!AZEMON
Teucer n’est pas vainqueur!DATAME
Il l’est, n’en doutez pas, je suis le seul à plaindre.AZEMON
Vous vivez l’un et l’autre, et je n’ai rien à craindre.O ciel! ô providence! enfin triomphe aussiDe tous ces dieux affreux que l’on adore icy!
Cette correction est essentielle.
Made Denis a éxaminé la pièce avec les yeux les plus sévêres. Elle pense fermement qu’elle vaut mieux que tous les plaidoiers de nos avocats. Elle dit qu’il est bien à désirer qu’on la joue immédiatement après Pâques, pour des raisons qui sont fort bonnes et que je ne puis détailler icy.
Je n’ai point reçu le bon bouru du bon Goldoni. Je l’ai acheté. Cette comédie m’a paru infiniment agréable. C’est une époque dans la littérature française qu’une comédie du bon ton faitte par un étranger.
Je suis enchanté de l’aprobation du Duc d’Albe.
Ma colonie est à vos pieds, et vous remercie de vos bontés. Je me joins à elle et à nôtre jeune avocat pour vous dire que si j’avais un peu de santé nous viendrions tous faire nos pâques dans vôtre paroisse.
V.