1773-08-09, de Voltaire [François Marie Arouet] à François Louis Claude Marin.

On prétend que Linguet a fait de nouveaux ennemis à Mr De Morangiés dans le parquet, dans le Barrau, et parmi les gens de Lettres.
Rien n’est plus triste, et rien ne me fait plus trembler pour cette malheureuse affaire qui va se juger deffinitivement. Je suis historien sincère; vous qui l’êtes, aidez moi. Je ne vois pas qu’il ait le moindre droit de se plaindre qu’on répète ses propres paroles sans y faire aucune réfléxion.

Mr Pigeon serait bien plus en droit de se fâcher, mais il faut préférer la vérité à tout. Cette vérité aura bien de la peine à gagner sa cause au parlement. Elle court grand risque d’être écrasée par les formes. Elle aura pour mortel ennemi la prévention où l’on est contre Linguet. On dit qu’il va donner un nouveau mémoire; il faut espérer qu’il prouvera dans cet écrit les choses qu’il a promis de prouver.

Bonsoir, mon cher historiographe qui ne dites pas tout ce que vous savez.

Je pense qu’il faudrait imprimer sans délai ma morangeade telle que je vous l’envoie, en attendant la lalliade qui est annoncée dès la première ligne du procès Morangies. Le mémoire de l’inspecteur Dupuis est sans réplique. Il n’y a que des raisons, et c’est ce qu’il faut.

Je vous embrasse bien tendrement.

le très vieux et très malade V.