1772-02-01, de Pierre Paul Sirven à Voltaire [François Marie Arouet].

Monsieur,

J’ay l’honneur de vous confirmer ce que mon cœur vous témoigna de avoir obtenu l’arrêt de rélaxe par ma lettre du 27 9bre dernier.
Je vous dois encore de plus la bonne recéption que mon beau fils et ses père et mère ont faite à son épouse et à son fils, de même qu’au surplus de ma famille. Nous arrivâmes chés lui avant hier, sans accident dans la route.

Permettés, Je vous en supplie Monsieur, que je vous rappelle la grâce, que vous voulés bien ajouter à tous vos bien faits dont vous m’avés comblé d’obtenir de la grande chancelerie, des Lettres pour mes deux filles, afin d’être relevée du laps de tems, qui s’est écoulé depuis la sentence de 1764 qui les condamne au banissement perpétuel et à la confiscation des biens, pour qu’elles puissent purger leur contumace, en la chambre tournelle du parlement de Toulouse, qui est nantie de la procédure. Malgré l’arrêt de relaxe que j’ai obtenu de cette cour souveraine, mes deux filles sont toujours tachées d’Infamie et Inhabiles à succéder ni tester jusques à ce qu’elles soient purgées. La bonté de vôtre coeur pour les oprimés me fait espérer que vous voudrés bien m’acorder encore vos tendres soins, afin que ma famille puisse jouir dans leur patrie de la qualité de citoyen qu’on leur a si injustement ravie.

Je prie l’être suprême de répandre sur vous Monsieur ses plus précieuses faveurs, qu’il vous fasse jouir de la vie la plus reculée et la plus heureuse. Ce sont les vœux les plus ardents que je ne cesserai de faire pour vous.

J’ai l’honneur d’être avec le plus profond respect

Monsieur

Vôtre très humble & trés obéissant serviteur

Sirven