1771-10-16, de Voltaire [François Marie Arouet] à Anne Charlotte de Crussol-Florensac, duchesse d'Aiguillon.

Madame,

Je vous ai importunée deux fois fort témérairement: la première pour un gentilhomme qui disait n’avoir point tué un prêtre et qui l’avait tué, la seconde pour moi, qui disais ne point recevoir de réponse de monsieur le duc d’Aiguillon, et qui le moment d’après en reçus une pleine d’esprit, de grâces et de bonté, comme si vous l’aviez écrite.
Cela prouve que je suis un jeune homme de soixante et dix huit ans très vif et très impatient, ce qui autrement veut dire un radoteur. Mais je ne radote point en étant persuadé que mr le duc d’Aiguillon écrit mieux que mr le cardinal de Richelieu, et que je vous donne sans difficulté la préférence sur made la duchesse d’Aiguillon, première du nom.

Il est vrai que je meurs dans l’impénitence finale sur les testaments, mais aussi je meurs dans le respect et dans la reconnaissance finale avec laquelle j’ai l’honneur d’être

madame &c.