11e janvier 1771, à Ferney
J’étais, Monseigneur, en colère comme Ragotin quand on ne lui ouvrait pas la porte assez tost.
Je grondais votre Eminence dans le même temps que vous m’écriviez, et que je vous devais des remerciements.
Si je réussis dans ma prédiction, je ne vous importunerai point pour les états du pape, mais je demanderai votre protection pour ceux du grand Turc. C’était là le grand objet du commerce de ma colonie. Cette branche a été anéantie par la guerre avec les Russes. Le Roy de Prusse m’a enlevé douze familles qui devaient s’établir dans mon hameau; et les fermiers généraux en ont fait déserter deux par leurs petites persécutions. Mais si Moustapha me reste je suis trop heureux. Je vous prierai donc de faire au plustôt la paix entre lui et la victorieuse Catherinne seconde. C’est la grâce que j’attends, si vous retournés de Rome à Versailles comme je l’espère. Quoi qu’il arrive je suis sûr que vous serez heureux soit à Versailles, soit à Rome. Est Ulubris, est hic, animus si te non deficit æquus.
Agréez toujours Monseigneur les tendres respects de ce vieillard si colère.
V.