1770-08-08, de Voltaire [François Marie Arouet] à Nicolas Claude Thieriot.

Je vous envoiai il y a plus d'un mois, mon ancien ami, un tome de ce que vous demandiez, sous l'envelope de Mr D'Ormesson, et je comptais vous faire parvenir le reste volume par volume.
Mais comme vous ne m'avez point accusé réception de mon paquet je n'ai pas osé un second envoi. Je commence à croire qu'on a ouvert le paquet à la poste et qu'on l'a retenu. Je pense que le sistême de la nature a produit cette attention sévère. C'est un terrible livre, et qui peut faire bien du mal.

Je crois qu'on aura le dépositaire à la Comédie vers la fin de l'automne.

Il y a des gens assez absurdes pour m'attribuer les anecdotes sur Fréron. Je suis obligé d'en appeller à vôtre témoignage; vous savez ce qui en est. J'ai encor l'original que vous m'avez envoié; j'ignore l'auteur, il serait très important que je le sçusse.

Comme, Dieu merci, je n'ai jamais vu ni Frèron ni aucun de ceux qui sont cités dans les anecdotes; et comme, Dieu merci encor, mon stile est très différent de celui de l'auteur sans être meilleur, il faut être absurde pour m'imputer un tel ouvrage. J'ai des affaires un peu plus sérieuses et plus agréables, mais je ne néglige rien; je ne néglige point surtout l'amitié.