1760-08-29, de Voltaire [François Marie Arouet] à Pierre Jean Grosley.

Je ne crois pas, Monsieur, qu'il y ait dans le monde un plus mauvais correspondant que moi; je ne vous ai point encor accusé la réception du paquet que vous m'avez envoïé par Mr Bouret; mais Comment voulez vous que je fasse tenir ce paquet à Berlin; je n'écris dans ce païs là que quand le Roy de Prusse m'en donne l'occasion, je crois vous l'avoir déjà mandé; je mets alors les gros paquets dans le sien, et il a la bonté de payer le port; mais il faut lui épargner les petites dépenses, attendu que son thrésor est un peu écorné; je ne lui écris point depuis l'ouverture de la Campagne.
Celle de Fréron, à ce qu'on me mande, n'a pas été heureuse à Paris, et qu'un certain Jérome Carré l'a battu à platte couture. Si Fréron a un fils, je ne lui conseille pas d'acheter la charge de son père; je ne sçais à qui vous donnerez la place de l'abbé Trublet; quoique vous vouliez la rendre héréditaire, elle a tout l'air de tomber au parties casuelles. Vôtre idée de rendre les gens ridicules de père en fils est fort plaisante; je la transmettrai à Formey quand je pourai; car je crois qu'il a des Enfans; pour moi je suis fort aise de n'en point avoir.

V. t. h. ob. str

V.