1770-05-20, de Pierre Michel Hennin à Voltaire [François Marie Arouet].

Aussitôt que je l'ai pû M. je suis allé chez M. Rigot, le Sindic de la garde, à qui j'ai fait part de l'avis que vous donnez.
Il doit avoir vû à la manière dont je lui ai parlé que l'affaire étoit très sérieuse. Votre Lettre n'entrant en aucun détail je n'ai pû l'assurer qu'il y eût des témoins. Il m'a dit qu'aucune raison n'empêchant le sr Dufour Vincent d'entrer dans Geneve le plus simple étoit qu'il vint lui même faire sa déposition et lors ce que je lui ai demandé s'il m'assuroit qu'il n'y seroit point insulté il m'a répondu que non, mais qu'on en feroit bonne et prompte justice si le fait étoit avéré. Je crois donc qu'à tous égards il convient que le sr Dufour vienne ici au plustôt, qu'il amène des témoins s'il y en a et que pour plus de sûreté il se fasse accompagner par deux François. Il ira chez M. Rigot qui fera recevoir sa plainte par un auditeur, et vous pouvez être certain que je suivrai cette affaire avec toute l'attention qu'elle mérite. La Lime est un des plus grands Pendards de la Répube. J'avois avis depuis longtems qu'il guettoit les natifs pour les insulter s'il pouvoit les trouver seuls dans les chemins. En France il seroit roüé. Nous verrons ce qu'on en fera ici.

J'aurai soin M. de rendre compte au Ministre du commencement et de la fin de cette affaire et je n'oublierai pas de l'instruire de l'intérêt que vous y avez pris.

Il ne seroit pas inutile de faire faire une notte de tous les faits dont les natifs se plaignent. Je prévois que si nous n'avons pas justice nous recevrons ordre de nous la faire. C'est fort mon avis et j'en écrirai dans ce sens.

J'ay l'hr d'ètre &c.

P. S. Je viens d'apprendre qu'il y avoit des témoins et leurs noms. Que Dufour fasse en sorte de les rassembler et qu'ils aillent tous chez M. Rigot en disant que c'est moy qui leur ai fait savoir qu'ils devoient s'y rendre et qu'ensuite ils viennent m'instruire de ce qui ce sera dit et fait pour la poursuite de cette affaire.