1769-11-19, de Voltaire [François Marie Arouet] à Catherine Josephte de Pougny de Guillet, baronne de Monthoux.

Madame,

Il est vrai que si je n'avais cru que mes sentiments respectueux pour vôtre personne, et ma sensibilité pour vôtre triste état, j'aurais écrit à Monsieur L'avocat général du sénat de Chambéry, mais étant partie dans cette affaire, je n'ai pas osé prendre cette liberté.
Il m'a paru qu'un étranger ne devait qu'attendre le jugement de s'y soumettre. D'ailleurs tout ce qu'on m'a dit de Monsieur L'avocat général me fait croire que les solicitations sont très inutiles auprès delui. Je sais qu'il ne connait que l'éxacte équité, et qu'il est beaucoup mieux informé de vôtre affaire que je ne puis l'être. On m'assure de tous côtés qu'il est aussi bienfesant qu'éclairé. Vôtre cruelle situation l'a sans doute attendri. Je vous conseille de faire comme moi, Madame, d'attendre son raport, et de vous conformer à ce qui sera décidé. Je ne puis croire que la grâce que le Roi vous a faitte vous devienne jamais inutile.

J'ai l'honneur d'être avec respect

Madame

Vôtre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire