7e juill. 1769 [de Fernex]
J'ai envoié, ma chère amie, à Mr Le Fevre, une Lettre assez instructive qui montre l'impossibilité que l'homme en question soit l'auteur du livre qu'on lui attribue.
Je crois qu'il vous montrera cette Lettre, elle ne met pas à la chose plus d'importance qu'il en faut.
Auriez vous lu le mémoire de la chambre des comptes? Je m'y intéresse. On dit qu'il est très bien fait. J'ai prié Mr De Nicolaï d'avoir la bonté de permettre qu'on m'en envoiât un éxemplaire.
A l'égard de Mr D'Argental, je puis tirer du peu d'argent que j'ai placé, dix mille livres que je lui prêterai. Celà me gênera, et j'y perdrai un intérêt que certainement je ne lui redemanderai pas; mais je croirai gagner beaucoup en le prévenant par cette marque d'amitié. Je vais lui en écrire.
Ce serait bien dommage qu'on ne jouât pas les Guebres. Cramer a bien pleuré en lisant cette pièce. Dumoins on l'imprimera, et celà fera une bonne diversion.
Le Kain va dit-on aux eaux; on ne poura pas jouer les Scythes; c'est un très petit malheur.
Je vous recommande toujours vos affaires, ma chère amie; il ne faut point se lasser de faire des instances à Mr De La Sourdière. Si on ne presse pas l'affaire de la succession cet argent ne sera touché que par vos arrières neveux.
A l'égard de mes petites affaires j'espére qu'elles iront bien de toutes les façons. Mais la meilleure de toutes serait d'achever ma vie auprès de vous.
Je n'ai point entendu parler de ces Lettres que La Duchêne voulait publier.
J'attends Mr Le marquis De Jaucourt dans quelques jours. Ce sera probablement la dernière fois que j'ouvrirai ma porte.
On a fait deux nouvelles éditions du siècle de Louis 15. Peut être serait-il à propos que j'en fisse présenter une au Roi. Celà est dans le département de Mr De St Florentin. Celà est aussi dans celui du premier gentilhomme d'année. Il serait à désirer qu'une de ses amies pût aimer un peu la lecture, et surtout celle d'un livre qui est plein de la gloire d'un homme à qui elle est attachée. Mais on craint toujours de faire de fausses démarches dans le païs qu'elle habite. Bon soir ma chère amie, je vous aimerai jusqu'à ce que je ne sois plus.
V.