A Milan, ce 23 d'avril 1769
Monsieur,
A mon retour des îles Boromée, où son excellence m. le comte Frédéric m'a gardé trois semaines, pour y prendre l'air, et me remettre de la maladie que j'ai eue, mm. Origoni et Parraviccini m'ont remis 25 sequins de Florence, par votre ordre, dont je leur ai donné reçu au compte de mm. François et Louis Bontems de Genève.
Je ne puis assez vous en marquer ma reconnaissance, et vous ne pouviez, monsieur, m'envoyer plus à propos ce secours, manquant de linge et d'habits. Quoique votre générosité portât l'ordre de me compter ce que j'aurais besoin sans en limiter la somme, j'ai cru ne devoir pas abuser de vos bontés; et j'ai, sur l'instant même, employé ces 25 sequins en un habit que j'ai trouvé fait sur ma taille, et en quatre chemises que je fais faire: ce qui me mettra au moins en état de paraître décemment dans les maisons de condition où l'on a la bonté de m'admettre. J'y ai fait part de vos bontés, et l'on m'a loué de n'avoir exigé que cette somme, quoique votre générosité ne l'eût pas bornée.
Que je finirais avec tranquillité ma carrière, au cas que j'eusse le malheur de vous survivre, si vous vouliez bien m'assurer de quoi supporter l'état affreux de ma situation! état que j'ai si peu mérité! Je l'espère de vos bontés, monsieur. Je n'aurais alors plus à désirer que de me procurer l'occasion de vous en aller marquer ma vive reconnaissance. J'en attends l'heureux moment avec impatience, et vous supplie d'être persuadé du respectueux attachement avec lequel j'ai l'honneur d'être,
monsieur,
votre très humble, &c.
Jore
chez m. le comte Alari, où mes lettres me viennent franches de port