1er auguste 1767
Mes associés, monsieur, vous ont envoyé ce que vous demandez et ce qui vous était dû.
Si rien ne vous est parvenu il ne s'en faut prendre qu'à l'interruption du commerce, car il est plus difficile, comme j'ai déjà eu l'honneur de vous le dire, plusieurs fois, d'envoyer des ballots de ce pays-ci que d'en recevoir; les bijouteries sont surtout prohibées.
J'ai vu votre ami à la campagne qui traîne une vie assez languissante. Je lui ai parlé du sieur de la Beaumelle en conformité de votre dernière lettre du 25 juillet. Il m'a dit que ce malheureux étant sur le point de faire réimprimer ses calomnies contre tout ce que nous avons de plus respectable, on s'était trouvé dans la nécessité de présenter l'antidote contre le poison, que cela ne se pouvait faire décemment que par un mémoire historique lequel n'a été adressé qu'aux personnes intéressées, aux ministres et aux gens de lettres. S'il avait été possible que le jeune m. Lavaysse eût mis un frein à la démence horrible de son beau-frère, et si le repentir avait pu entrer dans l'âme d'un homme aussi méchant et aussi fou, on aurait pris d'autres mesures.
L'aventure de Saintefoix est très vraie, on informe criminellement depuis un mois. L'évêque d'Agen a jeté un monitoire. Il y a beaucoup de protestants en prison. On ne sait pas un mot de tout cela à Paris. Il y aurait cinq cents hommes de pendus en province que Paris n'en saurait pas un seul mot; mais le ministère est très instruit.
Vous avez dû recevoir de votre ami la copie de la lettre qu'il a écrite au sr Cogé. Il m'a dit qu'il était obligé de faire la guerre toute sa vie, mais que c'était l'état du métier. Il vous est toujours bien tendrement attaché. Toute ma famille vous présente ses obéissances. Est il bien vrai que mon ancien compatriote Jean Jaques Rousseau est établi en Auvergne?
J'ai l'honneur d'être, monsieur, avec les sentiments les plus inviolables, votre très humble et très obéisst serviteur
Boursier