à Ferney le 5 juillet [1767]
Le nouveau succès que je viens d'obtenir monsieur, et que vous avez la bonté de m'annoncer, me devient plus agréable par l'intérêt que vous semblez y prendre.
Les conseils que vous me donnez me paraissent remplis de sagesse et d'amitié, et je compte bien en profiter. J'avoue que j'ai été trop vite, que j'ai trop négligé l'intérêt. Entraîné vers les choses grandes et fortes, je n'ai pas assez approfondi les ressorts qui meuvent les hommes rassemblés, et j'ai trop ignoré qu'on pouvait faire de belles scènes, sans faire une bonne pièce. Vous me trouverez très converti, les disgrâces, les réflexions et l'entretien journalier d'un grand homme m'ont éclairé, et j'espère que vous pourrez vous apercevoir à la lecture de Barmecide, combien mes principes sont changés. Je soumettrai cette pièce à vos lumières, à celles de m. l'abbé Arnaud, et des autres véritables gens de lettres; leur suffrage m'est d'autant plus précieux, que j'en ai rien à attendre des écrivains subalternes, que j'ai eu l'imprudence d'offenser, et qui ne pardonnent pas plus que les dévots.
Vous n'êtes point du tout inconnu à m. de Voltaire, je lui ai lu l'article de votre lettre qui le regarde, il en a été très satisfait, il m'a chargé de vous témoigner toute sa reconnaissance, et de vous dire qu'il vous croit un des plus éclairés et des plus ardents zélateurs de la bonne cause et de la bonne littérature. J'accepte avec grand plaisir la commission que m. Saurin et vous me donnez; j'avais déjà répondu à Champfort sur cet article, vous pouvez vous en rapporter à l'envie que j'ai de vous obliger. Vous n'avez rien du tout à me rembourser; toutes les bagatelles que vous me demandez sont à ma disposition, et je puis en envoyer autant qu'il me plaît. L'usage que j'en ferai, est bien en droit de plaire au Papa grand homme: il revoit actuellement son histoire universelle, et son siècle de Louis XIV; où l'article de l'écrivain est plus développé et plus étendu. Cette nouvelle édition sera bien intéressante, il semble avoir pris pour devise qui n'a plus qu'un moment à vivre n'a plus rien à dissimuler. Mais quoi qu'il en dise, il vivra encore longtemps. Vous pouvez assurer tous ses amis qu'il jouit d'une santé parfaite, mais il vous prie de dire à tous les autres qu'il est mourant. Recevez de nouveau tous mes remerciements, des compliments pour m. l'abbé Arnaud, et l'assurance des sentiments avec lesquels j'ai l'honneur d'être monsieur votre très humble &a
de Laharpe
L'article de Calvin ne nous a point paru concluant. Une conséquence générale, et implicite n'est point un dogme, et d'ailleurs de ce que ceux qui ont offensé père et mère sont dans le cas d'être punis de mort, il ne s'ensuit nullement que ce soient les pères et mères qui doivent être les juges et les bourreaux.