25 février 1767
Ne vous laissez point subjuguer, mon cher ami, par un plan tout à fait antithéâtral qu'on propose.
Je ne réponds pas de l'effet d'une pièce où tout est simple et naturel, dans un temps où le public égaré semble ne vouloir que des événements incroyables, entassés les uns sur les autres avec des vers aussi barbares que ceux de Garnier et de Hardy. Résistez au torrent du goût le plus détestable qui ait jamais déshonoré la nation. J'aime mieux tomber avec un ouvrage fait selon les règles de l'art, que de réussir par un poème barbare.
Je ne puis d'ailleurs m'imaginer que la nature ne parle pas au cœur des Parisiens comme elle nous parle; et je ne vois pas pourquoi ce qui nous fait répandre des larmes, serait mal reçu chez vous.
Je vous ai envoyé quelques changements, et je me flatte que vous en avez fait usage. En voici encore un au 4e acte dans lequel Indatire a nécessairement trop raison contre Athamare. Je fortifie votre rôle autant que la situation le permet; c'est après ce vers d'Indatire,
A servir sous un maître on me verrait descendre!ATHAMARE
Va, l'honneur de servir un maître généreux,Qui met un digne prix aux exploits belliqueux,Vaut mieux que de ramper dans une républiqueInsensible au mérite et même tyrannique.Tu peux prétendre à tout en marchant sous ma loi.J'ai parmi&ca.
Il faut encore mon cher ami que je vous dise que si dans la scène entre Obéïde et son père, au 5e acte, il y a encore quelques longueurs, il faudra retrancher les quatre vers d'Obéide,
Mais j'avoue que je les supprimerais à regret. Encore une fois, laissez dire les critiques de cabinet, et rapportez vous en à l'effet que fait la pièce au théâtre, il n'y a point de meilleur juge.