1767-02-15, de Henri Louis Lekain à Charles Augustin Feriol, comte d'Argental.

Acte premier

Scène troisième

SOZAME

'J'y voudrais être né; tout mon regret, mon frère.'

Comme toute cette scène est d'un style très simple et très amical, je crains encore que le mot de frère n'y donne le ton du couvent.

Scène cinquième

LE SCYTHE

'Il veut cacher les pleurs que je l'ai vu répandre.'

Je crois qu'il faudrait, pour le sens juste et grammatical: Que je lui ai vu répandre.

INDATIRE

'Nous mourrons à tes pieds, avant qu'un téméraire
Pût manquer seulement de respect à mon père.'

Cet imparfait du subjonctif est dur à la prononciation, et plus dur encore à l'oreille; si ce verbe était au futur, la consonnance en serait plus douce, et le sens aurait peut-être la même valeur, en disant:

'Nous mourrons à tes pieds, avant qu'un téméraire Puisse jamais manquer de respect à mon père.'

Acte deuxième

Scène première

OBEIDE

'Laisse dans ces déserts ta fidèle Obéïde.'

SULMA

'Ah! que la mort plutôt frappe cette perfide.'

Quoique l'épithète de perfide se rapporte à Sulma, il est peut-être à craindre qu'il n'y ait amphibologie, à cause du nom d'Obéïde qui finit le vers précédent.

Scène deuxième

INDATIRE

'Et mon âme qui vole au-devant de ton âme.'

Quoique cette expression soit simple et ingénue, je crains que la répétition ne paraisse aux plaisants du parterre, un jeu de mots.

Scène troisième

HERMODAN

'Notre culte, Obéïde, est simple comme vous.'

Je croyais avoir lu dans le manuscrit: 'Et simple comme nous.' Peut-être me suis-je trompé; je laisse à m. d'Argental à décider si l'expression étant rélative aux mœurs communes des Scythes, ne serait pas meilleure.

Scène cinquième

HIRAN

'L'indépendance .........
Ils savent la défendre, ils aiment la vengeance.'

Il me semble n'avoir rien vu dans les mœurs des Scythes, qui les fit soupçonner d'aimer la vengeance; on peut ne pas pardonner une offense, sans, pour cela, être caractérisé d'aimer la vengeance.

ATHAMARE

'Insulte mon amour, outrage mon honneur?'

Dit-on: insulter l'amour de quelqu'un? Je n'ai vu cette expression dans aucune tragédie.

Acte cinquième

Scène première

HERMODAN

'Sosame a-t-il appris à sa fille qu'il aime? etc'

M. d'Argental est convenu que l'on prierait m. de Voltaire de changer ce dernier hémistiche.

HERMODAN

'Tu ne peux rejeter un droit si légitime.'

Je crois qu'il est cruel de proposer à Obéïde, comme un droit légitime, de tuer son amant; peut-être l'expression de loi légitime, loi indispensable, serait plus forte: car il est bien extraordinaire qu'Obéïde se taise sur ce droit affreux. Le mot de loi serait, peut-être, la seule chose qui pourrait prévenir toute réponse contradictoire.

Scène cinquième

HERMODAN

'Joins la miséricorde à la sévérité.'

Je sais que le mot de miséricorde est beau et sonore; mais cette expression n'est pas dramatique. Quelques mauvais plaisants peuvent la trouver plus théologique que théâtrale.

ATHAMARE

'Je meurs pour Obéïde, et meurs pour mon pays.'

Il est bien vrai qu'il meurt pour Obéïde; mais est-il aussi constant qu'il meure, pour son pays. La grâce accordée aux Persans de sa suite est un effet de la grandeur d'âme d'Obéïde, et nullement un sacrifice qu'Athamare a fait aux siens.