1766-04-04, de Voltaire [François Marie Arouet] à Étienne Noël Damilaville.

Mon cher ami, il n'y a qu'une pauvre petite lettre à la poste d'Italie pour m. d'Alembert, je la lui ai envoyée dans un paquet adressé à m. d'Argental qui demeure dans son quartier.

Je saurai demain si vous avez reçu une lettre adressée à monsr d'Ausch, ou plutôt à frère Patouillet auquel il n'avait que prêter son nom.

M. Thomas m'a envoyé l' Eloge de m. le dauphin. Il y a de l'éloquence et de la philosophie. Il n'est pas vraisemblable qu'il ait attribué à ce prince des qualités et des connaissances qu'il n'aurait pas eues; il se serait décrédité auprès des honnêtes gens. Enfin de tout ce que j'ai lu sur ce triste événement, il est le seul qui m'ait instruit, et qui m'ait fait plaisir. Il y a quelques défauts dans son ouvrage; mais en général c'est un homme qui pense beaucoup et qui peint avec la parole.

En lisant le dictionnaire je m'aperçois que le chlier de Jaucourt en a fait les trois quarts. Votre ami était donc occupé ailleurs? Mais, par charité, dites moi pourquoi ce livre qui à mon gré est nécessaire, au monde, n'est pas encore entre les mains des souscripteurs? Au nom de qui l'examine-t-on? qui sont les examinateurs? quelles mesures prend on?

Vous m'aviez bien dit que la comédie que vous m'aviez envoyée était meilleure à voir qu'à lire. Bonsoir, mon très cher philosophe.