A Ferney, 19 mars 1766, par la commodité de m. Souchai,
marchand de drap au Lion d'or, à Genève
Quand je n'avais que soixante ans, monsieur, vous m'auriez vu venir à cheval au devant de monsieur l'ambassadeur; mais j'en ai soixante et douze passés et il y a plus d'un an que je ne suis pas en état de sortir de ma chambre; je m'adresse à vous hardiment pour faire agréer mes excuses et mon respect.
Je prends cette liberté avec vous, parce que je vous ai obligation. On m'a dit, monsieur, que c'est à vous que je dois quelques anecdotes tirées du dépôt des affaires étrangères: de plus, monsieur de Chabanon, qui est très véridique, m'assure que vous m'honorez de quelque bonté, je vous supplie de me la conserver et de me procurer celle de son excellence. Si j'avais de la santé, je viendrais vous présenter cette double requête, et vous assurer des sentiments respectueux avec lesquels j'ai l'honneur d'être, monsieur,
Votre très humble et très obéissant serviteur
Voltaire
gentilhomme ordinaire du roi
M. de Chabanon dit encore que vous daignez venir dans ma cabane, quand vous serez las de vous crever à Genève. Gardez vous bien de me faire cet honneur avant deux heures. Demandez à m. Hennin.