1765-02-07, de Voltaire [François Marie Arouet] à Paul Claude Moultou.

Mon cher philosophe, je ne puis m'empêcher de vous gronder encor de m'avoir forcé à vous donner ce malheureux tître, audessus duquel vous êtes si fort élevé.
Vous l'avez voulu, j'ai obéï malgré moi, parce qu'il faut servir ses amis comme ils le veulent, et non pas comme on veut. Mais je vous jure encor sur ma tête que cette précaution était très inutile, et qu'elle pouvait être très dangereuse; j'en juge ainsi, puisque je n'ai pas reçu aujourd'hui Jeudi le passeport que j'attendais. J'écris à mr le Duc de Praslin pour le remercier et pour le presser. J'ai bien peur qu'il ne se croie obligé de conférer avec mr le Cte de st Florentin, c'est se noier dans son crachat.

Un jour viendra que les Hottentots en lisant l'histoire de nôtre religion ne pouront pas croire nôtre excez d'imbécilité et de folie.

J'avoue que made la Duchesse D'Anville a bien raison de souhaitter qu'on vous refuse. Puis-je compter que vous viendrez me consoler dans mon hermitage?